Le samedi 9 janvier 2010, les secours suisses reçoivent l'appel d'un homme paniqué : la femme de son père est morte, chez elle, au Moulin de Vaux-sur-Morge, à une vingtaine de kilomètres de Lausanne. Il a essayé de la réanimer pendant une heure, sans succès. Il est 21h16. Ce coup de fil va déclencher plus de deux ans d'instruction, trois expertises médico-judiciaires et deux procès. Car l'homme à l'origine de l'appel, un brillant généticien français, est accusé dès les premières heures de l'enquête, d'avoir assassiné sa belle-mère. A l'arrivée des secours, Catherine Ségalat baigne dans une mare de sang, au sous-sol de sa maison. Elle porte des plaies sur le visage et le cuir chevelu. Quand les policiers demandent à son beau-fils pourquoi il a tenté de la réanimer au lieu d'appeler les secours, il parle d'un téléphone à l'étage.
Catégorie
✨
PersonnesTranscription
00:00:30Laurent Ségala, pourquoi cet homme aurait-il tué sa belle-mère ?
00:00:36C'était un généticien reconnu en France, il avait eu une belle situation, pas de problème d'argent.
00:00:40Pas de problème d'héritage non plus, il devait reprendre la librairie de son père à Lausanne.
00:00:45Pas de conflit avec celle qu'il aimait comme sa mère.
00:00:49Alors pourquoi aurait-il tué cette femme, appréciée de tous dans son petit village suisse ?
00:00:55La police helvétique avait ni larmes du crime, ni témoins, ni mobiles, ni aveux, mais elle n'a jamais douté.
00:01:02Laurent Ségala était coupable, il en portait la preuve sur le visage.
00:01:07Lausanne, en Suisse, samedi 9 janvier 2010, 21h16.
00:01:20Bonsoir, 144, les ambulances.
00:01:25Oui, bonsoir, je vous appelle parce que j'ai trouvé ma mère au bas de l'escalier, dans une fac de sang.
00:01:34J'ai essayé de la... j'ai fait tout ce que j'ai pu, mais je n'ai pas réussi à la sauver.
00:01:38Comment ça ? Elle est décédée ?
00:01:41Oui, j'ai essayé de faire des massages cardiaques, bouche à bouche, tout.
00:01:44Il y a combien de temps ?
00:01:46Je ne sais pas, pendant une heure, j'ai essayé de la...
00:01:50Pendant une heure, vous avez fait ça ?
00:01:51Vous auriez dû nous appeler pour qu'on puisse vous aider un peu avant, monsieur.
00:01:54La standardiste 844 informe les policiers à notre centrale qu'elle a eu un appel d'un homme
00:02:13qui a dit avoir découvert une femme qui baignait dans son sang à Vaux-sur-Morge, dans une maison,
00:02:20et qu'elle a trouvé l'attitude de cette personne plutôt particulière.
00:02:29Une patrouille part immédiatement à Vaux-sur-Morge, à une vingtaine de kilomètres de Lausanne.
00:02:35Ce soir-là, il neige beaucoup.
00:02:37Les policiers roulent plus de trois quarts d'heure avant d'atteindre cette maison isolée.
00:02:45Quand on arrive sur les lieux, on découvre qu'on a affaire à une victime qui est une femme,
00:02:50visiblement d'une soixantaine d'années, plutôt corpulente.
00:02:57La victime s'appelle Catherine Ségala, elle a 66 ans.
00:03:02Elle est allongée sur le dos, au rez-de-chaussée de la maison.
00:03:08Son corps est recouvert d'une couverture.
00:03:11Il y avait plusieurs plaies du visage et du cuir chevelu prédominant à gauche.
00:03:25Et il y avait une plaie béante derrière la tête, une plaie assez large,
00:03:31en présence visiblement aussi de fractures.
00:03:35Donc ça méritait effectivement des investigations rapides.
00:03:37Les policiers montent voir l'homme qui a contacté les secours.
00:03:44Il se trouve à l'étage, assis dans un fauteuil, en état de choc.
00:03:50Il a un comportement qui est absolument inadéquat par rapport à la situation.
00:03:54C'est-à-dire, c'est quelqu'un qui reste prostré, c'est quelqu'un qui regarde ses souliers,
00:03:59c'est quelqu'un qui ne regarde pas les gens qui s'adressent à lui.
00:04:01Il répond poliment, mais de manière très réfléchie aux questions qui lui sont posées.
00:04:08Mais surtout, il n'a aucune question auprès des policiers sur ce qui s'est passé.
00:04:15Souvent, les policiers sont harcelés de questions par les proches,
00:04:18par les gens qui ont découvert un événement particulier hors normes.
00:04:22Les gens ont besoin de comprendre ce qui s'est passé.
00:04:24Et là, rien.
00:04:25Il mange du chocolat, la boîte de chocolat est ensanglantée, ses habits sont ensanglantés.
00:04:33Mais c'est surtout son visage qui surprend la police.
00:04:38L'homme est comme griffé.
00:04:41Des marques rouges, toutes fraîches.
00:04:44C'est anormal, c'est pas quelque chose qu'un être humain peut se faire tout seul,
00:04:47c'est pas quelque chose qui a été fait par le passé, c'est quelque chose qui est récent.
00:04:51Laurent Sigala s'explique.
00:04:52Catherine n'est pas vraiment sa mère, comme il l'a dit au téléphone.
00:04:56En fait, c'est la femme de son père, sa belle-mère.
00:05:01Il passait la voir et la trouvait au pied de l'escalier.
00:05:05Les policiers s'étonnent, car le corps ne s'y trouve plus.
00:05:09On a une victime qui a été déplacée,
00:05:12puisqu'on voit des traces qui indiquent que la victime a été traînée
00:05:17de la buanderie en direction de la pièce voisine,
00:05:21qui est une forme de bibliothèque dans laquelle on a retrouvé la victime.
00:05:28Autre élément troublant, l'absence de sang.
00:05:31Les policiers constatent que le soleil est mouillé,
00:05:36que visiblement il y a des traces de sang, mais qui ont été lavées.
00:05:42Devant le lavabo, deux serpillères sont encore mouillées et ensanglantées.
00:05:47Laurent Sigala a fait le ménage.
00:05:49Il s'est aussi changé.
00:05:53La chemise qu'il portait à son arrivée, il l'a déposée dans un sac,
00:05:58au pied de la machine à laver.
00:06:01Cet élément-là, en plus tous les autres éléments
00:06:03qui sont retrouvés par les policiers sur les lieux,
00:06:06nous oriente très rapidement vers un homicide.
00:06:09Dans la logique des choses,
00:06:11le policier va poser la question à Laurent Sigala,
00:06:14mais est-ce que vous n'avez pas commis une bêtise ?
00:06:16Monsieur Sigala baisse la tête
00:06:19et puis s'offusque en quelque sorte de ce genre de questions,
00:06:23sans toutefois y répondre d'une manière formelle, directe.
00:06:29La nuit s'annonce longue pour Laurent Sigala.
00:06:32L'homme est d'abord conduit à l'hôpital pour une prise de sang
00:06:34à la recherche d'éventuelles traces d'alcool ou de drogue.
00:06:38Puis il est amené au commissariat.
00:06:43Il est 3h du matin.
00:06:45Quand Laurent Sigala arrive dans les bureaux de la police vaudoise.
00:06:51Dans le cadre de l'audition,
00:06:53les premières questions qu'on va lui poser,
00:06:55ce n'est pas son rôle dans ce qui vient de se passer,
00:06:58mais on va essayer de comprendre à qui on a affaire.
00:07:04Quand on commence l'audition,
00:07:07il refuse de répondre à certaines questions
00:07:09sur son passé, sur son enfance,
00:07:11sur son parcours personnel.
00:07:13Je ne voyais pas pourquoi on parlait de ma petite enfance,
00:07:18si j'avais des soucis financiers,
00:07:19comment je m'entendais avec mes frères et soeurs,
00:07:21alors que j'avais simplement trouvé une Catherine au bas de l'escalier.
00:07:28Laurent Sigala accepte finalement de raconter sa soirée.
00:07:31Il devait être entre 19h30 et 20h30,
00:07:35quand il est arrivé au Moulin,
00:07:37la maison de son père et de sa belle-mère.
00:07:40Il passait récupérer des cadeaux pour sa fille.
00:07:43L'homme s'apprêtait à rentrer par la buanderie
00:07:46quand il a aperçu sa belle-mère à travers la porte vitrée.
00:07:50Elle était gisante au bas de l'escalier,
00:07:54dans le hall d'entrée de la maison.
00:07:58Et j'ai tout de suite vu que c'était grave.
00:08:02J'ai vu qu'il y avait beaucoup de sang.
00:08:06Catherine était inconsciente.
00:08:08Laurent lui a pris le pouls
00:08:09et il a tenté de se souvenir des cours de secourisme
00:08:12qu'il avait suivis 10 ans plus tôt.
00:08:14Il parlait à la victime,
00:08:16même s'il ne répond pas,
00:08:18lui parlait, lui montrait qu'on est là.
00:08:20Il me semblait que Catherine était encore vivante.
00:08:24Et puis, il me revenait une brive
00:08:26qui était un blessé à froid.
00:08:29C'est là que j'ai pris la décision,
00:08:30qui n'a peut-être pas été une bonne décision,
00:08:32de la transporter dans la pièce qui était juste à côté.
00:08:36Selon ces déclarations,
00:08:38une victime ne devait pas rester sur un sol dur et froid
00:08:42pour pratiquer la réanimation,
00:08:43mais qu'il fallait la mettre dans la pièce d'à côté
00:08:45qui, elle, était chauffée.
00:08:52Je garde le sentiment, 5 ans après,
00:08:55de ces membres qui m'échappaient
00:08:56à cause de la viscosité qui est due au sang.
00:09:00Et donc, j'essayais de l'asseoir,
00:09:01de la mettre sur mon dos,
00:09:04de la transporter d'une manière ou d'une autre
00:09:06et retomber, enfin, ça s'est révélé incroyablement
00:09:08plus compliqué et difficile que je l'avais imaginé.
00:09:13Laurent Ségala finit par y arriver.
00:09:16Il pense alors à appeler les secours,
00:09:18sauf qu'à cet endroit de la maison,
00:09:20le réseau mobile ne passe pas.
00:09:23Il y a bien un téléphone fixe à l'étage,
00:09:25mais il faudrait laisser Catherine toute seule.
00:09:26Donc, c'est là où j'ai tenté cette réanimation
00:09:30de manière de plus en plus énergique,
00:09:33pour ne pas dire frénétique.
00:09:37Jusqu'au moment où j'ai constaté
00:09:39que je ne pouvais plus rien faire.
00:09:47Catherine Ségala est morte.
00:09:49Laurent monte à l'étage,
00:09:52il trouve un annuaire et compose le 144.
00:09:56En attendant l'arrivée des secours,
00:09:58il redescend et commence à nettoyer.
00:10:02Il y avait tout ce sang par terre
00:10:04et je pense que dans une réaction de répulsion,
00:10:08c'était une manière de...
00:10:09de conjurer un peu ce qui s'était passé avant,
00:10:16ou je ne sais pas, cette vue du sang.
00:10:18Et puis aussi, je pense,
00:10:21par respect pour les gens qui allaient arriver,
00:10:23qui ne marchent pas simplement dans des flingues de sang.
00:10:26Donc, j'ai à la serpillière, grossièrement,
00:10:29enlevé le...
00:10:31passé la serpillière par terre et c'est tout.
00:10:35Laurent Ségala passe dans la salle de bain
00:10:37pour se laver le visage et les mains.
00:10:39C'est à ce moment-là, dit-il,
00:10:40qu'il change de chemise.
00:10:42Il en trouve une autre propre,
00:10:43dans l'armoire de son père
00:10:45et dépose la sienne avec le reste du linge sale.
00:10:49Le suspect apporte des réponses
00:10:51à chacune des questions des policiers.
00:10:53Ils en viennent maintenant à la plus épineuse.
00:10:56On lui a posé un certain nombre de questions,
00:10:58notamment en relation avec sa blessure aux doigts
00:11:00et ses griffures au visage.
00:11:02Et là, il a tergiversé
00:11:03avant de donner certaines explications.
00:11:04L'explication que je leur ai donnée
00:11:08et qui est pour moi
00:11:10toujours la même,
00:11:13c'est que ces éraflures
00:11:15ou ces rougeurs, je me les suis faites
00:11:16en essayant de déplacer Catherine,
00:11:19notamment en essayant de la prendre
00:11:20sur mon épaule
00:11:23et puis après, lors du massage cardiaque,
00:11:24de plus en plus frénétique.
00:11:30Laurent Ségala en est persuadé,
00:11:32ce sont les bijoux de sa belle-mère
00:11:34qui l'ont griffé.
00:11:34Et je tout de suite pensais
00:11:39qu'elle avait un malaise
00:11:40et qu'elle était tombée dans l'escalier.
00:11:46Quand mes enfants étaient petits,
00:11:48on avait la peur panique
00:11:49de cet escalier,
00:11:49qui est un escalier en béton.
00:11:51Et non seulement moi,
00:11:53mais des amis,
00:11:54d'autres membres de la famille,
00:11:55ils disaient régulièrement à mes parents
00:11:56qu'il fallait faire quelque chose
00:11:57pour cet escalier.
00:11:59Sa belle-mère est tombée,
00:12:01il en est certain.
00:12:02Et si quelqu'un l'a tué,
00:12:03en tout cas, ce n'est pas lui.
00:12:04Après quatre heures d'audition,
00:12:08l'homme peine à convaincre
00:12:09de son innocence.
00:12:12On est face à une personne
00:12:14qui donne des explications,
00:12:17qui est clairement impliquée
00:12:19dans ce qui s'est passé,
00:12:20sans pour autant qu'on puisse définir
00:12:22de manière précise son rôle.
00:12:24On ne sait pas encore exactement
00:12:25comment les faits se sont passés.
00:12:28On est sur une scène de crime
00:12:29qui a été fortement modifiée.
00:12:32Donc on se rend très bien compte
00:12:33qu'on est sur une affaire criminelle
00:12:35qui sera complexe,
00:12:36qui va prendre du temps.
00:12:40Laurent Ségala
00:12:41est placé en garde à vue.
00:12:42C'est de loin la pire soirée de ma vie.
00:12:49Vous arrivez avec quelqu'un
00:12:50que vous aimez beaucoup,
00:12:51qui est de votre famille,
00:12:52est gravement blessé,
00:12:53ou d'essayer de le sauver,
00:12:57vous n'y arrivez pas.
00:12:58Après, vous connaissez la suite du cauchemar.
00:13:00Enfin, c'est la pire soirée de ma vie.
00:13:02– Éric Cotier, vous êtes procureur général
00:13:12du canton de Vaud.
00:13:14Qui est ce Laurent Ségala
00:13:15qui vient d'être placé en garde à vue ?
00:13:17– Eh bien, on sait de lui
00:13:18que c'est un scientifique réputé,
00:13:21que c'est une personne
00:13:22qui a fait une carrière professionnelle
00:13:24avec une réussite certaine.
00:13:26Il travaille au CNRS de Lyon,
00:13:29si mes souvenirs sont bons.
00:13:30– Parce que lui, c'est un Français, c'est ça ?
00:13:32– C'est un Français.
00:13:33Et on va apprendre qu'il est estimé
00:13:35de ses collègues,
00:13:36estimé de ses collaborateurs,
00:13:37des professeurs qui travaillent avec lui.
00:13:40On va aussi apprendre qu'il a une vie,
00:13:42je ne veux pas dire sans histoire,
00:13:44mais en tout cas,
00:13:44qui ne comporte aucune aspérité,
00:13:47aucun élément d'ombre
00:13:49qui suggérerait un soupçon sur le personnage.
00:13:53On a un homme, Laurent Ségala,
00:13:55est un homme, on va dire,
00:13:56c'est l'expression égale vaudée,
00:13:57bien sous tous les rapports.
00:13:58– Il est marié, il a des enfants ?
00:14:00– Il a été marié avec trois filles,
00:14:03sauf erreur.
00:14:04Une première fois, il a divorcé.
00:14:06Il vit à l'époque des faits
00:14:08avec une personne avec laquelle
00:14:10il n'est pas encore marié
00:14:11et avec une petite fille.
00:14:13– Et que savez-vous de la victime ?
00:14:15– Alors, Catherine Ségala est suissesse,
00:14:17elle a 66 ans,
00:14:18c'est la troisième épouse
00:14:20du père de Laurent Ségala,
00:14:22Roger-Jean Ségala.
00:14:23– Comment se comporte Laurent Ségala,
00:14:26en garde à vue ?
00:14:26Est-ce qu'il coopère avec les policiers ?
00:14:28Est-ce qu'il est prostré ?
00:14:30– Ce que nous pouvons constater assez rapidement,
00:14:32ce que les enquêteurs vont constater rapidement,
00:14:35c'est que Laurent Ségala a une volonté
00:14:37de contrôler les auditions,
00:14:39de contrôler la discussion.
00:14:42Il n'aime pas qu'on leur mette en cause.
00:14:44Lorsqu'il est contredit sur un point,
00:14:46même sur un point de détail,
00:14:47assez rapidement, il corrige
00:14:49ceux qui sont en face de lui.
00:14:51Il va raconter ce qui s'est passé selon lui.
00:14:54Et puis après, il se tiendra à cette première version.
00:14:56Son discours sera « Je ne me souviens plus,
00:14:59mais je vous ai tout dit dès le départ.
00:15:01Allez donc regarder ce que je vous ai dit au départ. »
00:15:03– Combien de temps dure une garde à vue en Suisse ?
00:15:06– Le système suisse de l'époque
00:15:07place ce que vous appelez la garde à vue,
00:15:10que nous appelons à cette époque-là
00:15:11la détention préventive,
00:15:13dans la compétence du juge d'instruction.
00:15:15Le juge d'instruction, en 2010,
00:15:17peut garder une personne jusqu'à 14 jours
00:15:20dans un régime d'arrestation.
00:15:21– Ce dimanche matin,
00:15:25les policiers doivent annoncer la mort
00:15:27de Catherine Ségala à son mari Roger.
00:15:31L'homme se trouve à l'hôpital,
00:15:33où il a été admis la veille du drame
00:15:35pour une maladie respiratoire.
00:15:36– Nous avons deux enquêteurs
00:15:39qui se sont déplacés à l'hôpital,
00:15:41qui sont entrés en contact avec les médecins
00:15:42qui s'occupaient de M. Ségala
00:15:45pour déjà savoir s'il était en état
00:15:48de recevoir une information aussi grave.
00:15:52– Les policiers ont pu lui annoncer
00:16:00non seulement le décès de son épouse,
00:16:03mais aussi le fait que nous avions des doutes
00:16:07sur l'attitude et l'implication de son fils
00:16:10dans cet homicide.
00:16:11– Sa femme morte,
00:16:15son fils en garde à vue,
00:16:18le monde de Roger Ségala s'écroule.
00:16:20– Les enquêteurs ont essayé
00:16:23d'obtenir quelques informations de sa part
00:16:25qui n'étaient pas faciles,
00:16:25il était sur un tas de choc.
00:16:26– La dernière fois qu'il a vu son fils,
00:16:30c'était juste avant le drame.
00:16:33Laurent est passé à l'hôpital en fin d'après-midi.
00:16:35– Ce qu'il a dit tout de suite,
00:16:37c'est qu'il s'étonnait
00:16:38qu'il ait eu des griffures au visage,
00:16:39puisque quand il avait quitté l'hôpital,
00:16:41il n'avait absolument qu'une griffure au visage.
00:16:44– Roger Ségala s'étonne,
00:16:46mais il est formel.
00:16:48Son fils n'a pas pu faire de mal à Catherine,
00:16:50il s'entendait très bien avec elle.
00:16:53Les policiers doivent se contenter
00:16:54de ses déclarations.
00:16:56L'homme très éprouvé ne leur en dira pas plus.
00:17:00Pendant ce temps-là, son fils Laurent
00:17:02est conduit au centre de médecine légale de Lausanne.
00:17:06Les policiers ont demandé à un légiste
00:17:08de l'examiner.
00:17:12– J'ai été frappé par le nombre de lésions,
00:17:14à vrai dire.
00:17:15Il avait des bleus linéaires,
00:17:17donc des traits rougeâtres,
00:17:19au niveau du cou,
00:17:20des deux côtés,
00:17:22qui pouvaient en partie s'expliquer,
00:17:25par exemple, par une chaîne qu'il portait.
00:17:28Mais il avait, effectivement,
00:17:29au niveau des deux côtés du nez,
00:17:32plusieurs égratignures,
00:17:34donc, moi, je dirais des griffures.
00:17:36Ça faisait penser, en tout cas,
00:17:38à des griffures.
00:17:48Certaines lésions pouvaient s'expliquer
00:17:49par le frottement de la bague,
00:17:51voire du bracelet,
00:17:52voire du collier.
00:17:53Mais je trouvais que M. Segalat avait
00:17:56beaucoup de lésions
00:17:58au niveau du cou et du visage,
00:18:00et donc je trouvais ça moins
00:18:01compatible avec une réanimation
00:18:05d'une personne inconsciente.
00:18:06Donc, ça pouvait, effectivement,
00:18:11être des lésions
00:18:12d'une personne
00:18:14qui voulait se défendre,
00:18:15c'est possible.
00:18:18C'est maintenant le corps
00:18:20de Catherine Segalat
00:18:21que les légistes vont chercher
00:18:22à faire parler.
00:18:24Le scanner révèle
00:18:25de nombreuses fractures
00:18:26du crâne et des côtes.
00:18:28J'étais frappée
00:18:30par le nombre de lésions
00:18:32qu'elle avait sur le visage
00:18:34et sur le cuir chevelu.
00:18:36Il y avait sept lésions
00:18:38au niveau du visage à gauche,
00:18:40vers l'œil,
00:18:41qui remontait vers la région temporale,
00:18:44où commençait
00:18:46cette énorme plaie
00:18:47du cuir chevelu
00:18:48derrière la tête.
00:18:51Cette plaie s'étend
00:18:52sur toute la largeur du crâne.
00:18:54La peau est décollée
00:18:55sur 14 centimètres.
00:18:56Pour nous,
00:18:58cette dame avait été déplacée
00:18:59par la peau de la tête,
00:19:01parce que normalement,
00:19:02on ne peut pas avoir
00:19:02le cuir chevelu
00:19:03décollé sur 14 centimètres
00:19:05suite à une chute
00:19:05dans l'escalier.
00:19:08Alors, bien sûr,
00:19:09qu'une chute
00:19:09peut vous faire une plaie,
00:19:11après, vous glissez encore
00:19:12et ça peut se décoller un peu.
00:19:14Mais 14 centimètres,
00:19:15il faut vraiment trouver
00:19:16un scénario extraordinaire.
00:19:19Ce qui n'est pas possible,
00:19:21mais c'est plus difficile.
00:19:26Catherine Ségala
00:19:29est-elle tombée
00:19:30ou a-t-elle été tuée ?
00:19:32Chacune des plaies
00:19:33peut avoir été causée
00:19:34par un coup
00:19:34ou une chute.
00:19:36C'est leur nombre
00:19:37qui pose problème.
00:19:39Si c'était un accident,
00:19:40cela voudrait dire
00:19:40que Catherine serait tombée
00:19:42sept fois du même côté.
00:19:44Le légiste n'y croit pas.
00:19:45Les constatations
00:19:47qui sont faites
00:19:47par les médecins légistes
00:19:48démontrent très clairement
00:19:49que le décès
00:19:51de Catherine Ségala
00:19:52est dû à l'intervention
00:19:54d'un tiers
00:19:54avec des coups
00:19:56extrêmement violents
00:19:57qui ont été portés
00:19:58sur la tête
00:19:59de Catherine Ségala.
00:20:03Ça peut difficilement
00:20:04s'expliquer
00:20:05par un acte accidentel,
00:20:07donc on est clairement
00:20:08sur un homicide.
00:20:08Les conclusions
00:20:21de l'autopsie sont claires.
00:20:23Catherine Ségala
00:20:23a été tuée.
00:20:25L'étau se resserre
00:20:26tout de suite
00:20:26sur le seul témoin
00:20:27de l'affaire,
00:20:28celui qui porte
00:20:29les stigmates du drame
00:20:30sur le visage,
00:20:31son beau-fils,
00:20:32Laurent.
00:20:33Dès le lendemain,
00:20:34les inspecteurs
00:20:35de l'identité judiciaire
00:20:36et la police scientifique
00:20:37vaudoise
00:20:38passer la maison familiale
00:20:40au peigne fin.
00:20:43La police scientifique
00:20:45investit le moulin
00:20:46à la recherche
00:20:46de traces de sang.
00:20:49Elle dispose
00:20:50d'un outil redoutable,
00:20:52le Bluestar,
00:20:54un produit chimique
00:20:55pulvérisé dans la pénombre
00:20:57qui fait apparaître
00:20:58en bleu
00:20:59du sang invisible
00:21:00à l'œil nu.
00:21:04Et du sang,
00:21:05les policiers
00:21:06vont en trouver.
00:21:08On est surpris
00:21:11lorsqu'on diffuse
00:21:13le Bluestar,
00:21:14c'est que même
00:21:14les parois verticales
00:21:15sont toutes nettoyées.
00:21:18On voit ces gestes
00:21:18de nettoyage
00:21:19sur pratiquement
00:21:20toute la surface du mur.
00:21:21On va retrouver du sang sur les escaliers
00:21:31et sur les parois des escaliers
00:21:33jusqu'à peu près
00:21:34aux deux tiers
00:21:34de la hauteur
00:21:35de la cage d'escalier.
00:21:36Donc au final,
00:21:37on a une surface
00:21:38de à peu près 28 mètres carrés
00:21:40où on a des traces de sang
00:21:41qui ont été lavées.
00:21:43Elle nous révèle
00:21:44l'ampleur du nettoyage
00:21:45qui n'est pas juste
00:21:46une sorte de nettoyage
00:21:48de confort
00:21:49pour éviter de glisser
00:21:50dans le sang.
00:21:50Il y a vraiment un nettoyage
00:21:51approfondi qui a été réalisé.
00:21:53En tous les cas,
00:21:54il a pris le soin
00:21:55de nettoyer
00:21:56l'ensemble de la salle
00:21:57de crime
00:21:57depuis le haut
00:21:58de l'escalier
00:21:58jusqu'en bas
00:21:59de la bianderie.
00:22:01Mais s'il y a eu crime,
00:22:03les policiers
00:22:04n'ont encore
00:22:04aucune arme.
00:22:09La police scientifique
00:22:10a retrouvé trois marteaux,
00:22:12donc un des trois
00:22:13qui réagissait faiblement
00:22:15au Bluestar,
00:22:17donc qui potentiellement
00:22:18pouvait avoir été
00:22:19contaminés avec du sang.
00:22:21En même temps,
00:22:22les analyses n'ont pas
00:22:22démontré la présence
00:22:24de sang
00:22:25ni de traces d'ADN
00:22:27exploitable.
00:22:27La visite de la buanderie
00:22:33réserve en revanche
00:22:35une surprise
00:22:35aux enquêteurs.
00:22:39On s'est rendu compte
00:22:40que dans le tambour
00:22:41de la machine
00:22:42à laver le linge,
00:22:43il y avait une chemise
00:22:44bleue
00:22:45comme celle
00:22:45qu'il portait,
00:22:46qui avait été mise
00:22:47dans le sac,
00:22:48qui était avec deux boutons
00:22:49arrachés
00:22:50et totalement ensanglantés.
00:22:52Elle se trouvait
00:22:53sous le linge
00:22:54et non pas à la vue
00:22:55de tout un chacun.
00:22:58Les policiers
00:22:59ont maintenant la preuve
00:23:00que Laurence et Gala
00:23:00s'est changé deux fois.
00:23:02La première chemise,
00:23:03celle qu'il leur a
00:23:04spontanément montré
00:23:05la veille,
00:23:06ne présente que
00:23:07quelques traces de sang
00:23:08autour des boutonnières
00:23:09et au niveau des poignets.
00:23:11La deuxième,
00:23:11en revanche,
00:23:12celle que la police
00:23:12vient de retrouver
00:23:13dans la machine
00:23:14est plus compromettante.
00:23:18Sur cette deuxième chemise,
00:23:20on se rend compte
00:23:21qu'il y a beaucoup plus
00:23:21de traces de sang.
00:23:24Une trace qu'on retrouve
00:23:25au niveau du haut
00:23:26de la chemise
00:23:27on va pouvoir voir
00:23:29que ça correspond
00:23:30à la même trame
00:23:31de maille
00:23:32du pull de la victime
00:23:33ce qui prouve
00:23:34qu'il y a eu un contact
00:23:35entre le pull
00:23:36ensanglanté de la victime
00:23:37et cette chemise
00:23:38que portait Laurence et Gala.
00:23:39Alors cette chemise,
00:23:41effectivement,
00:23:42vu ses traces,
00:23:42correspond plus aux déclarations
00:23:44qu'il donne,
00:23:46transport,
00:23:47réanimation
00:23:47et par la suite,
00:23:48nettoyage
00:23:49vu qu'on a aussi
00:23:49du sang dilué.
00:23:52À première vue,
00:23:54cette chemise
00:23:55valide donc
00:23:56la version de Laurence et Gala.
00:23:58Mais la policière
00:23:59est intriguée
00:24:00par des projections
00:24:01à l'intérieur du col.
00:24:03Celle-ci nous donne
00:24:05une direction
00:24:06et qui nous montre
00:24:07qu'il y a eu
00:24:07devant la poitrine
00:24:09de Laurence et Gala
00:24:10un choc violent.
00:24:15Ça peut être
00:24:16un coup de poing
00:24:17très violent
00:24:18qui va arriver
00:24:19sur une surface de sang
00:24:20et qui va projeter
00:24:21mais c'est aussi
00:24:22le genre de traces
00:24:23qu'on retrouve
00:24:23lorsqu'on frappe
00:24:24quelqu'un
00:24:25avec un objet contendant.
00:24:27Ça peut être
00:24:27un marteau
00:24:28ou une barre de fer.
00:24:29Donc ce qu'on déduit
00:24:32de cette chemise
00:24:33c'est que
00:24:34c'est probablement
00:24:35l'habit
00:24:36qu'il portait
00:24:36au début.
00:24:38C'est l'habit
00:24:39qui a été utilisé
00:24:40pour tuer
00:24:41sa belle-mère
00:24:42et il s'en est débarrassé
00:24:44non seulement
00:24:45parce qu'il s'est probablement
00:24:45rendu compte
00:24:46que les boutons
00:24:46avaient été arrachés
00:24:47mais également
00:24:48par le fait
00:24:48qu'elle était
00:24:49fortement sanglantée
00:24:50avec des traces
00:24:50de giclure.
00:24:52S'il y a du sang
00:24:53sur les chemises
00:24:54et dans l'abus
00:24:55en drie,
00:24:56il n'y en a pas
00:24:56en revanche
00:24:57là où la police
00:24:58aurait dû en trouver.
00:24:59selon la version
00:25:01de Laurence Ségala.
00:25:02Comme il le déclare
00:25:04il pénètre
00:25:05dans la maison
00:25:06par la porte
00:25:07de la buanderie
00:25:08et là
00:25:08il aurait tout de suite
00:25:09vu sa belle-mère
00:25:10en bas des escaliers.
00:25:11Ce qui est étonnant
00:25:12c'est que
00:25:12venant de l'extérieur
00:25:13il devait porter
00:25:14sa doudoune.
00:25:16Un proche
00:25:16voyant
00:25:17quelqu'un dans cet état
00:25:18va tout de suite
00:25:19porter secours
00:25:19alors que
00:25:20cette veste-là
00:25:21son manteau d'extérieur
00:25:22n'a aucune trace
00:25:23de sang.
00:25:24Et on la découvre
00:25:25en fait
00:25:25accrochée
00:25:26et suspendue
00:25:27à une chaise
00:25:27dans une pièce
00:25:28voisine de la buanderie.
00:25:29Éric Cotier
00:25:34Laurent Ségala
00:25:35est inculpé
00:25:36dès le lendemain
00:25:36du drame
00:25:37pour quel motif ?
00:25:38Il est inculpé
00:25:39de l'homicide
00:25:40du meurtre
00:25:41de Catherine Ségala.
00:25:42Mais à ce stade
00:25:43vous n'avez
00:25:43ni aveu
00:25:45ni arme du crime
00:25:46ni mobile.
00:25:47Vous avez raison.
00:25:48En revanche
00:25:48il y a
00:25:49toute une série
00:25:49d'indices
00:25:50convergents
00:25:51qui désignent
00:25:53Laurent Ségala
00:25:53comme étant
00:25:55le plus probablement
00:25:56à l'origine
00:25:57de la mort
00:25:58de Catherine Ségala.
00:25:59A-t-on retrouvé
00:25:59des cellules
00:26:00de peau
00:26:01de Laurent Ségala
00:26:01sous les ongles
00:26:02de la victime ?
00:26:04On a retrouvé
00:26:04de l'ADN
00:26:05de Laurent Ségala
00:26:06sous un ongle
00:26:07de Catherine Ségala
00:26:08dans ce qu'on appelle
00:26:09un profil de mélange
00:26:10dans le jargon
00:26:11c'est-à-dire
00:26:11qu'il y a
00:26:11de l'ADN
00:26:12de Catherine Ségala
00:26:12et de l'ADN
00:26:14de Laurent Ségala.
00:26:14Sur combien d'ongles ?
00:26:16Sous un seul ongle
00:26:17Les autres ongles
00:26:19Ce n'est pas beaucoup
00:26:19quand même ?
00:26:20Non, les autres ongles
00:26:21apparemment n'ont pas
00:26:22fait l'objet
00:26:22d'un tel prélèvement
00:26:24c'est la police
00:26:25la police scientifique
00:26:26qui en fonction
00:26:27de critères
00:26:28qui sont appliqués
00:26:28à tous les cas
00:26:29décide des prélèvements
00:26:31et j'ajouterais
00:26:32qu'au besoin
00:26:34on pourrait ordonner
00:26:34l'examen
00:26:35d'autres ongles
00:26:38ni le juge
00:26:39d'instruction
00:26:39ni la défense
00:26:41ni les parties civiles
00:26:42de l'ont estimé
00:26:43nécessaire en l'espèce.
00:26:44Il est incarcéré
00:26:45Laurent Ségala ?
00:26:47Laurent Ségala
00:26:47est en détention
00:26:48oui.
00:26:49Et pourquoi ?
00:26:49Parce que vous avez peur
00:26:50qu'il fuit en France
00:26:51puisqu'il n'est pas suisse ?
00:26:53Laurent Ségala
00:26:54en tant que français
00:26:55présente ce risque.
00:26:57Finalement
00:26:57aucune autre piste
00:26:59n'a été envisagée ?
00:27:01Aucune trace
00:27:02d'ADN
00:27:03ne révélera
00:27:04un profil autre
00:27:05que les profils
00:27:07de Catherine
00:27:07Laurent
00:27:09et Roger-Jean Ségala
00:27:11et l'enquête
00:27:12qui sera menée
00:27:12sur la personnalité
00:27:13de Catherine Ségala
00:27:14pour déterminer
00:27:15si elle peut avoir
00:27:16des ennemis
00:27:17révélera
00:27:18qu'elle fait un peu
00:27:19de politique
00:27:19à l'échelle
00:27:20du petit village
00:27:21de 200 habitants
00:27:22dans lequel elle habite.
00:27:24Elle fait partie
00:27:24des autorités
00:27:25politiques locales.
00:27:27Bien sûr
00:27:27elle a quelques personnes
00:27:28avec lesquelles
00:27:29elle nourrissait
00:27:29des contradictions
00:27:30sur le plan politique
00:27:31mais rien de suffisamment
00:27:33consistant
00:27:34pour envisager
00:27:35une vengeance
00:27:36de la part
00:27:37d'un ennemi politique
00:27:38qu'on n'est véritablement
00:27:39pas à ce niveau-là.
00:27:40Et une fois de plus
00:27:41il n'y a aucune preuve
00:27:42ou aucun élément
00:27:43même
00:27:43qui suggère
00:27:45l'intervention
00:27:45d'un tiers.
00:27:50La mort brutale
00:27:52de Catherine Ségala
00:27:53et l'arrestation
00:27:53de son beau-fils
00:27:54s'ébrouillent très vite
00:27:56à Vaux-sur-Morge
00:27:56mais aussi au-delà
00:27:58car la famille
00:27:59jouit d'une jolie renommée.
00:28:10Vaux-sur-Morge
00:28:11est une petite communauté
00:28:12à l'époque
00:28:12il y avait à peu près
00:28:13180 habitants
00:28:14donc c'est vraiment
00:28:15un tout petit village
00:28:16même à l'échelle suisse.
00:28:20Et c'est clair
00:28:20que tout d'un coup
00:28:21quand quelqu'un
00:28:21de connu
00:28:23et d'unanimement apprécié
00:28:24comme Catherine
00:28:25est décédé
00:28:26la nouvelle
00:28:27a déclenché
00:28:28une stupeur
00:28:29et puis une très grande
00:28:30tristesse
00:28:31dans le village.
00:28:37On ne comprenait rien
00:28:38on était un peu
00:28:39dans le sous-choc
00:28:41complet
00:28:42parce que
00:28:43rien ne laissait supposer
00:28:44que ça allait se terminer
00:28:46comme ça
00:28:47qu'il allait se passer
00:28:48un drame pareil
00:28:48personne ne pouvait imaginer.
00:28:52Puis après
00:28:52évidemment ça a vite fait
00:28:54le tour
00:28:54parce qu'on l'a entendu
00:28:56par la radio
00:28:58avant de le lire
00:28:59dans les journaux.
00:29:02Le fait divers
00:29:03passionne les rédactions.
00:29:05Les journalistes
00:29:06accourent.
00:29:08Qu'est-ce que c'est
00:29:08que cette histoire
00:29:09dans ce petit village
00:29:10perdu
00:29:11en-dessus de Morge
00:29:12dans une vallée
00:29:14qu'on appelle
00:29:14la vallée sèche
00:29:15parce qu'il n'y a pas
00:29:15de bistrot
00:29:16il n'y a pas de café
00:29:17un endroit un peu perdu.
00:29:22Et dans le village
00:29:23tout était silencieux
00:29:24les gens évidemment
00:29:25a priori
00:29:26ne voulaient pas parler
00:29:27on rasait les murs.
00:29:32Peu à peu
00:29:33les langues se délient.
00:29:34Catherine Ségala
00:29:38est une femme
00:29:39adorée
00:29:40très aimée
00:29:40très populaire
00:29:42le facteur
00:29:43par exemple
00:29:43l'adore
00:29:44aller boire le café
00:29:45avec elle
00:29:46elle lui parlait
00:29:47de ses roses
00:29:48elle a une vie sociale
00:29:50très établie
00:29:51et elle est vraiment
00:29:53appréciée
00:29:54et aimée
00:29:55de tout le village
00:29:55tout le monde
00:29:56la connaît évidemment
00:29:56vu ses fonctions
00:29:57politiques.
00:29:59Catherine Ségala
00:30:00avait su se faire
00:30:01une place
00:30:01dans sa commune
00:30:03elle était conseillère
00:30:04municipale
00:30:05chargée des affaires
00:30:06sociales.
00:30:08C'était une personne
00:30:08qui était de conviction
00:30:10qui croyait très fortement
00:30:12ce qu'elle faisait
00:30:13et puis qui était vraiment
00:30:15quand elle se lançait
00:30:16dans quelque chose
00:30:16qui allait jusqu'au bout
00:30:17des choses.
00:30:20C'était une femme
00:30:21extrêmement sympathique
00:30:22extrêmement chaleureuse
00:30:24extrêmement souriante
00:30:26je pense avec un caractère
00:30:30assez fort
00:30:31mais qui était
00:30:32vraiment quelqu'un
00:30:33de très prenant.
00:30:39Moi je trouvais
00:30:40que c'était une femme
00:30:40extraordinaire
00:30:41et elle était bonne
00:30:45et puis j'avais jamais
00:30:46rencontré quelqu'un
00:30:47qui était
00:30:48foncièrement bon.
00:30:56Il n'y avait pas
00:30:56d'artifices
00:30:57il n'y avait pas
00:30:58j'ai aimé Catherine.
00:31:06Catherine laisse un grand vide
00:31:08auprès de ses amis
00:31:10sa famille
00:31:11et bien sûr son mari.
00:31:14Roger
00:31:15elle l'a rencontré
00:31:16en poussant la porte
00:31:17d'une librairie
00:31:18un jour de 1972
00:31:20un coup de foudre.
00:31:23Ah mais c'était
00:31:24oui c'était le bon Dieu
00:31:26qui était ascendé vers elle
00:31:27qui était intelligent
00:31:28qui était beau
00:31:30et puis alors ce monsieur magnifique
00:31:38il aimait Catherine
00:31:40et puis c'était l'amour.
00:31:42il avait cette librairie
00:31:47et puis c'était un petit peu
00:31:50un homme du monde.
00:31:52Roger Ségala
00:31:53est un homme brillant
00:31:54un spécialiste
00:31:56des livres rares.
00:31:58Sa librairie
00:31:59est l'une des plus réputées
00:32:00de Suisse.
00:32:02C'est un érudit
00:32:03c'est un curieux
00:32:03c'est un passionné
00:32:04et c'est quelqu'un
00:32:05de très connu
00:32:06dans le monde
00:32:08de la bibliophilie
00:32:09et dans le monde
00:32:10littéraire parisien.
00:32:12Il a signé
00:32:13des livres importants
00:32:14notamment sur
00:32:15les grandes affaires criminelles.
00:32:17Roger Jean Ségala
00:32:18vous êtes le rédacteur
00:32:19en chef d'une encyclopédie
00:32:21internationale
00:32:22du crime
00:32:22et de criminologie.
00:32:24J'essaie de faire
00:32:24quelque chose
00:32:25qui est l'histoire du crime
00:32:26qui n'existe pas
00:32:27qui est très difficile à faire.
00:32:29Donc gloire aux criminels.
00:32:30Donc gloire aux criminels
00:32:31oui.
00:32:31Gloire du moins
00:32:32à certains criminels.
00:32:35Ironie de l'histoire
00:32:3640 ans plus tard
00:32:38le crime s'invite
00:32:39dans sa maison.
00:32:40Son fils
00:32:41est accusé
00:32:42d'avoir tué
00:32:42sa femme.
00:32:44Un fait divers
00:32:44digne d'une tragédie grecque.
00:32:47On sent très très vite
00:32:48qu'il y a
00:32:49les bons ingrédients
00:32:50les bons éléments
00:32:51qui font une bonne histoire.
00:32:52On sent assez vite
00:32:53que cette histoire
00:32:54va durer
00:32:55parce qu'il y a
00:32:56un mystère.
00:32:57Il y a une dame
00:32:58conseillère municipale
00:33:00de Vaux-sur-Morche
00:33:01qui est assez connue
00:33:02dans la région
00:33:02qui est une notable
00:33:04de la région.
00:33:05Le mari est un libraire
00:33:06relativement connu
00:33:08sur la place de Lausanne
00:33:09et surtout,
00:33:10on a le beau-fils.
00:33:16On découvre
00:33:17qu'il est généticien,
00:33:18qu'il travaille
00:33:18pour le CNRS,
00:33:19qu'il est passé
00:33:20un mois avant,
00:33:21jour pour jour,
00:33:22à une émission
00:33:23de Frédéric Taddeï
00:33:24sur la télévision française.
00:33:25Laurent Ségala,
00:33:27comme son père,
00:33:28a eu droit
00:33:28aux honneurs
00:33:29de la télévision.
00:33:30Depuis quelques temps,
00:33:31il publie lui aussi
00:33:32des livres.
00:33:34La science,
00:33:34c'est plus que ça.
00:33:35La science,
00:33:36c'est aussi
00:33:36un foisonnement d'idées,
00:33:38c'est aussi expliquer
00:33:39le monde qui nous entoure
00:33:41et ça,
00:33:42ça doit se faire
00:33:43avec beaucoup de liberté.
00:33:45Un mois plus tard,
00:33:46le généticien
00:33:47se retrouve cantonné
00:33:48à la rubrique
00:33:48des faits divers.
00:33:50Les journalistes
00:33:51apprennent
00:33:51qu'il s'apprêtait
00:33:52à tout quitter
00:33:53pour reprendre
00:33:54la librairie familiale.
00:33:55Qu'est-ce qu'il vient faire
00:33:57à Lausanne
00:33:57sur les hauteurs
00:33:59de la ville
00:34:00à la Pontaise
00:34:01dans cette librairie
00:34:02qui certes
00:34:03est prestigieuse,
00:34:04mais enfin,
00:34:04on s'est dit
00:34:04il y a un décalage
00:34:06avec le statut.
00:34:07Comment de chercheur
00:34:08au CNRS,
00:34:11on se retrouve
00:34:12petit libraire
00:34:12à Lausanne ?
00:34:13Il y a quelque chose
00:34:14qui ne colle pas.
00:34:17Les journalistes
00:34:18contactent le CNRS
00:34:19à Lyon
00:34:20et découvrent
00:34:21que l'employeur
00:34:22de Laurent Ségala
00:34:23ignore tout
00:34:24de cette reconversion
00:34:25pourtant bien avancée.
00:34:29Le généticien
00:34:30travaille plusieurs jours
00:34:31par semaine
00:34:32à la librairie.
00:34:33Il a même déménagé.
00:34:35Il vit en face
00:34:35de Lausanne
00:34:36sur les bords
00:34:36du lac Léman
00:34:37côté français.
00:34:39Par supposition,
00:34:40on se disait
00:34:40que s'il pouvait
00:34:41cacher certaines choses,
00:34:42il donnait l'impression
00:34:42de vouloir cacher
00:34:43certaines choses
00:34:44sur sa vie professionnelle,
00:34:45il pouvait aussi
00:34:46vouloir cacher
00:34:47certaines choses
00:34:47sur d'autres aspects
00:34:48et peut-être
00:34:49sur cette mort mystérieuse
00:34:51de Mme Ségala.
00:34:52Donc ça l'a rendu
00:34:52un peu suspect
00:34:53à la base.
00:34:57Les journaux
00:34:58accablent Laurent Ségala
00:34:59au point que
00:35:00même sa compagne
00:35:01se met à douter.
00:35:02C'était vraiment
00:35:05cauchemardesque
00:35:06de le voir
00:35:07comme ça
00:35:08en photo
00:35:08dans des articles
00:35:09de presse,
00:35:12dans les pages judiciaires.
00:35:15Donc moi,
00:35:16j'apprenais
00:35:16les choses comme ça
00:35:17et du coup,
00:35:18bon,
00:35:18évidemment,
00:35:19j'essayais de me faire
00:35:19une idée
00:35:20de ce qui s'était passé.
00:35:21Du coup,
00:35:22j'apprenais comment
00:35:23on avait trouvé Catherine,
00:35:25voilà,
00:35:26l'histoire de l'escalier.
00:35:28Mais effectivement,
00:35:29je me dis,
00:35:29bon,
00:35:30soit il est devenu fou,
00:35:31soit il y a quelque chose
00:35:33que j'ignore.
00:35:35Entre eux,
00:35:36à ce moment-là,
00:35:36il y a peut-être
00:35:37un mystère
00:35:37dans la famille
00:35:38que je ne connais pas,
00:35:40dont il ne m'a jamais parlé.
00:35:43Voilà,
00:35:43c'était les deux
00:35:44seules possibilités.
00:35:48Un huis clos
00:35:49comme dans
00:35:50les meilleurs polars.
00:35:52Pour comprendre
00:35:52ce qui s'est passé
00:35:53au moulin,
00:35:54les policiers
00:35:55se penchent
00:35:55sur l'emploi
00:35:56du temps
00:35:56de Catherine
00:35:57et Laurent Ségala.
00:35:59Quand Laurent est-il
00:36:00arrivé sur
00:36:01les lieux,
00:36:02s'il a vu
00:36:02sa belle-mère
00:36:03ce soir-là,
00:36:04leur tête-à-tête
00:36:05a duré
00:36:05combien de temps
00:36:06et que se sont-ils
00:36:07dit ?
00:36:10Ce samedi 9 janvier,
00:36:14on devait aller
00:36:15au moulin
00:36:15tous les trois,
00:36:16moi, Laurent
00:36:17et notre fille,
00:36:18puisque Roger
00:36:19et Catherine
00:36:20avaient passé
00:36:20les fêtes
00:36:21de fin d'année
00:36:21à l'île d'Elbe
00:36:22et donc on ne les avait
00:36:24pas vues,
00:36:24donc on devait
00:36:25les voir
00:36:25ce samedi-là.
00:36:26de manière traditionnelle,
00:36:31on ne faisait pas
00:36:32Noël
00:36:33ni même
00:36:34le Nouvel An
00:36:35avec mes parents
00:36:35parce qu'ils partaient
00:36:36en voyage,
00:36:37mais le week-end
00:36:38suivant le Nouvel An,
00:36:40on y allait en famille
00:36:40pour faire
00:36:41une espèce
00:36:42de Noël Bisse.
00:36:44La veille,
00:36:45Catherine
00:36:46nous a appelés
00:36:47et a dit
00:36:48à Laurent
00:36:48ne venez pas,
00:36:50on est trop fatigués,
00:36:52éventuellement,
00:36:53viens seul,
00:36:54viens seul,
00:36:55comme ça,
00:36:56au moins,
00:36:56on te verra
00:36:57et puis comme ça,
00:36:58on pourra régler
00:36:59les problèmes
00:37:00courants
00:37:01de la librairie.
00:37:05Le matin
00:37:05du 9 janvier,
00:37:07c'est donc seul
00:37:08que Laurent Ségala
00:37:08quitte son domicile
00:37:10pour se rendre
00:37:11à Vaud-sur-Morge.
00:37:13C'est seulement
00:37:14sur le chemin
00:37:15que M. Ségala,
00:37:16Laurent Ségala,
00:37:17apprend que son père
00:37:18est à l'hôpital,
00:37:19qu'il a eu
00:37:20des problèmes
00:37:20de respiration.
00:37:24Moi,
00:37:25j'étais déjà parti,
00:37:26Catherine m'a appelé
00:37:27pour me dire
00:37:28que mon père
00:37:28avait eu,
00:37:29comme ça lui arrivait
00:37:29de temps en temps,
00:37:30une bronchite obstructive
00:37:31dans la nuit
00:37:31et qu'il avait été
00:37:32transporté
00:37:34à l'hôpital de Morge.
00:37:38Laurent Ségala
00:37:39poursuit sa route.
00:37:40Il passe
00:37:41à la librairie
00:37:41puis il rejoint
00:37:43sa belle-mère
00:37:43pour un repas
00:37:44en tête-à-tête.
00:37:48On a déjeuné
00:37:49ensemble,
00:37:49comme ça nous arrivait
00:37:50de le faire,
00:37:51en se racontant
00:37:52nos périodes
00:37:53de Noël respectives.
00:37:56Ils se sont ensuite
00:37:56déplacés ensemble
00:37:57à l'hôpital
00:37:58pour rencontrer
00:37:59Roger Ségala.
00:38:01Le père,
00:38:02le fils
00:38:02et la belle-mère
00:38:03discutent
00:38:04pendant une petite heure.
00:38:06C'est la dernière fois
00:38:07qu'ils seront réunis.
00:38:08qu'à un certain moment,
00:38:10ils se sont séparés.
00:38:11Laurent Ségala
00:38:12s'est rendu
00:38:13à la librairie
00:38:13pour travailler
00:38:14et Mme Ségala,
00:38:15après un certain temps,
00:38:16est repartie
00:38:16à son domicile.
00:38:18Elle avait un certain nombre
00:38:18de travaux à faire.
00:38:22Il est environ
00:38:2315h30
00:38:24quand Laurent Ségala
00:38:26arrive à la librairie.
00:38:27Ce jour-là,
00:38:30j'avais eu pas mal
00:38:30de rangements à faire
00:38:31parce que Catherine
00:38:31était assez tatillon
00:38:33sur les rangements.
00:38:35Comme c'est elle
00:38:35qui devait ouvrir
00:38:37la librairie le lundi matin,
00:38:39il m'avait pas eu
00:38:40pas mal de temps
00:38:40pour ranger.
00:38:42Combien de temps
00:38:43Laurent Ségala
00:38:43a-t-il travaillé ?
00:38:45Les policiers
00:38:46vont s'appuyer
00:38:46sur les relevés téléphoniques
00:38:48et l'ordinateur
00:38:49de la librairie.
00:38:51À 16h56,
00:38:53l'homme téléphone
00:38:53à sa belle-mère.
00:38:55Il veut savoir
00:38:55à quelle heure
00:38:55il peut passer au moulin.
00:38:57À 17h26,
00:38:59il éteint l'ordinateur
00:39:00de la librairie.
00:39:01C'est la dernière preuve
00:39:02matérielle
00:39:03de son emploi du temps.
00:39:05Dominique,
00:39:06que s'est-il passé
00:39:06entre 17h26
00:39:08et 21h16,
00:39:10l'heure à laquelle
00:39:10il appelle les secours
00:39:11sur le numéro
00:39:12d'urgence 144 ?
00:39:14Alors on sait,
00:39:15Frédéric,
00:39:15précisément qu'à 17h26,
00:39:17Laurent Ségala
00:39:18est à la librairie
00:39:19de Lausanne
00:39:20parce que c'est à ce moment-là
00:39:21qu'il éteint son ordinateur.
00:39:23À partir de là,
00:39:24on n'a plus aucune preuve
00:39:25matérielle
00:39:25de son emploi du temps.
00:39:26Alors lui prétend
00:39:27qu'un client s'est présenté,
00:39:29qu'ils ont discuté longuement
00:39:30et qu'il est reparti
00:39:31sans rien l'acheter.
00:39:32On va essayer
00:39:32de le retrouver,
00:39:33ce client.
00:39:34C'est d'ailleurs
00:39:34la femme de Laurent Ségala
00:39:36qui va passer
00:39:37un appel à témoins
00:39:38dans la presse locale
00:39:39pour essayer
00:39:40de faire en sorte
00:39:41que cette personne
00:39:42se manifeste.
00:39:43On ne la retrouvera
00:39:44jamais.
00:39:45Mais il y a un autre
00:39:46élément qui est facile
00:39:47à vérifier,
00:39:47c'est son arrivée
00:39:48à l'hôpital
00:39:49puisqu'il va voir son père.
00:39:50Il est à Lausanne,
00:39:51il va jusqu'à Morge,
00:39:52il prend l'autoroute,
00:39:53autoroute enneigée.
00:39:55On va estimer
00:39:56le temps de trajet
00:39:57parce que les conditions
00:39:58de circulation
00:39:58sont assez difficiles.
00:40:00Entre 25 et 30 minutes,
00:40:01ça fait une arrivée
00:40:01à l'hôpital
00:40:02à 18h15.
00:40:04Laurent Ségala
00:40:05dit qu'il est resté
00:40:06entre 15 et 30 minutes
00:40:08au chevet de son père,
00:40:09mais il ne porte pas
00:40:10de montre,
00:40:10son père non plus.
00:40:11C'est une estimation,
00:40:12mais jusqu'ici,
00:40:13ça colle
00:40:14et sa version est crédible.
00:40:16C'est après
00:40:16que ça va se compliquer.
00:40:17Il quitte donc l'hôpital
00:40:18vers 18h45.
00:40:20Combien de temps
00:40:20lui faut-il
00:40:21pour rejoindre
00:40:22le moulin de ses parents ?
00:40:24Le moulin de ses parents
00:40:24c'est ici,
00:40:25à Vaux-sur-Morge.
00:40:26Effectivement,
00:40:26ça fait moins long
00:40:27à première vue
00:40:28que Lausanne-Morge,
00:40:30mais c'est une petite route
00:40:31de montagne signeuse.
00:40:32Je vous l'ai dit,
00:40:32il neige,
00:40:33il n'a pas des pneus
00:40:34adaptés sur sa voiture,
00:40:36donc on considère
00:40:37que le temps de trajet
00:40:38est là encore
00:40:38de 25-30 minutes
00:40:39et ça fait une arrivée
00:40:40au moulin
00:40:41vers 19h15.
00:40:43Lui prétend
00:40:44qu'il est arrivé
00:40:44entre 19h30
00:40:46et 20h30.
00:40:47Ensuite,
00:40:48on a 21h16,
00:40:50l'heure à laquelle
00:40:50Laurence et Gala
00:40:51appellent le 144,
00:40:53les urgences.
00:40:54Il dit,
00:40:54je suis en train
00:40:55de tenter de ranimer
00:40:56ma mère
00:40:57depuis une heure.
00:40:59Donc une heure,
00:41:00si on fait un rétro-calcul,
00:41:0121h16,
00:41:02ça fait 20h16.
00:41:03Et s'il est arrivé
00:41:04à 19h15,
00:41:05il y a une heure
00:41:06de battement.
00:41:08D'accord ?
00:41:08Ça veut dire
00:41:09qu'il n'est pas resté
00:41:10une heure sur place
00:41:10comme il le prétend,
00:41:11mais qu'il est resté
00:41:12deux heures sur place.
00:41:14La question est,
00:41:15qu'est-ce qu'il a bien
00:41:15pu faire pendant ces deux heures ?
00:41:17Pour le savoir,
00:41:20le juge d'instruction
00:41:21organise une reconstitution
00:41:22sur les lieux du drame
00:41:23quatre jours plus tard seulement,
00:41:26en présence du prévenu
00:41:27et de ses avocats.
00:41:28C'est le jour de la reconstitution,
00:41:31c'est le petit matin,
00:41:33on est en hiver,
00:41:34il fait très froid.
00:41:37Je t'essuie...
00:41:38Il me fait l'impression
00:41:40d'un homme totalement brisé,
00:41:43totalement perdu.
00:41:46Il redoute d'être amené,
00:41:48menotté dans cet état-là,
00:41:50dans la maison de son enfance.
00:41:52Là, c'est le pire supplice
00:41:57que j'ai subi de ma vie.
00:42:01Vous êtes là quasiment
00:42:02comme une bête de foire,
00:42:03avec des tas d'intrus
00:42:04qui sont dans votre maison,
00:42:06qui violent l'intimité
00:42:08de cette maison.
00:42:10C'est horrible,
00:42:11c'est horrible.
00:42:11C'est le pas avec précision,
00:42:13mais l'attache de sein,
00:42:14il faisait quoi ?
00:42:15Un diamètre de un mètre ?
00:42:18Non, ça ne venait pas jusque là.
00:42:20Mais il y avait pas mal de sang, oui.
00:42:22En fait, on n'avait pas un scénario
00:42:25compatible avec nos constatations.
00:42:27Pour nous, c'était très important
00:42:28de voir comment M. Ségala
00:42:30allait expliquer ses gestes
00:42:32pour voir si les lésions
00:42:34que nous avions constatées
00:42:35sur Mme Ségala
00:42:35ou sur M. Ségala
00:42:37étaient compatibles
00:42:38avec la version de M. Ségala.
00:42:40Donc, je la prenais
00:42:41par un côté,
00:42:43par l'autre,
00:42:44de face.
00:42:44Enfin, j'essayais de faire...
00:42:47Allez, j'ai dit...
00:42:47Allez !
00:42:49Allez, accroche...
00:42:49Une fois, j'ai passé sa main
00:42:50comme ça.
00:42:51Je disais, allez !
00:42:52Et puis...
00:42:54Je disais, allez !
00:42:55Allez, on va y arriver
00:42:57parce que j'essayais
00:42:57de la protéger.
00:42:58Allez, accroche-toi !
00:43:00Accroche-toi !
00:43:01Il veut pas la blesser,
00:43:02il essaie de la soulever légèrement.
00:43:04Il décrit une scène apocalyptique
00:43:05où véritablement,
00:43:07il lutte pour essayer
00:43:08de l'amener au chaud
00:43:09sur un tapis
00:43:11à l'écart de ce carrelage
00:43:13et de la sortir
00:43:14de la flaque de sang
00:43:15dans laquelle elle baigne.
00:43:16La belle-mère de Laurent
00:43:26pesait 80 kilos.
00:43:28La figurante qui joue son rôle
00:43:30est moins lourde.
00:43:33Pourtant, Laurent Ségala
00:43:34a du mal à la transporter.
00:43:37Alors qu'il fait une pause,
00:43:39la substitut du procureur
00:43:41revient sur l'origine
00:43:42de ses blessures.
00:43:44Est-ce qu'il y a d'autres questions ?
00:43:45Oui ?
00:43:45Oui, monsieur Ségala,
00:43:46vous avez beaucoup
00:43:47de griffures,
00:43:48que ce soit aux mains,
00:43:49au visage.
00:43:51Vous devriez avoir un souvenir
00:43:53un peu plus vif de ça.
00:43:58Écoutez, je vous dis simplement
00:43:59que je suis souvent...
00:44:01J'ai souvent des griffures au visage.
00:44:03Toutes les personnes
00:44:03qui me connaissent
00:44:04vous le diront,
00:44:05qui viennent du fait
00:44:05que je suis maladroit.
00:44:06et donc, très souvent,
00:44:08je pars au bureau
00:44:09avec des griffures
00:44:11parce que je me suis...
00:44:13griffé en me rasant
00:44:19et que d'autre part,
00:44:21il arrive aussi fréquemment
00:44:22et ça, vous pourrez vérifier
00:44:26que ma compagne me griffe.
00:44:31Voilà.
00:44:35La brigade du lac
00:44:37part immédiatement
00:44:38chercher sa compagne
00:44:39à Tonant-les-Bains.
00:44:41Moi, je ne savais pas
00:44:42qu'il y avait eu la reconstitution
00:44:43et qu'il avait dit
00:44:44que je le griffais.
00:44:46Et du coup,
00:44:46il y a eu beaucoup
00:44:47de questions autour de ça.
00:44:48Alors moi, évidemment,
00:44:49je dis, bah non,
00:44:49je ne le griffe pas.
00:44:51Et du coup,
00:44:52ils avaient réussi leur coup.
00:44:54Elle nous dit très clairement
00:44:55et très honnêtement
00:44:56que lorsqu'ils ont
00:44:58des rapports sexuels,
00:44:59ça se passe tout à fait normalement
00:45:00et que le matin en question,
00:45:03quand Laurent a quitté
00:45:05le domicile,
00:45:06il n'avait aucune griffure,
00:45:07aucune blessure au visage.
00:45:11Ça nous démontre
00:45:12que les explications
00:45:13qu'il donne
00:45:13ne correspondent pas
00:45:14à la réalité.
00:45:17Mais je n'avais pas du tout
00:45:18dit que c'était elle.
00:45:19Parmi les éventualités,
00:45:21puisqu'on me pressait
00:45:21de questions
00:45:22et qu'on me pressait
00:45:24d'en trouver d'autres,
00:45:24j'ai dit,
00:45:24mais peut-être,
00:45:26c'est ça.
00:45:27C'est à partir de ce moment-là,
00:45:29malgré tout,
00:45:29que l'intuition de départ
00:45:31qui nous poussait
00:45:32à investiguer
00:45:33est arrivée
00:45:33sur une certaine conviction.
00:45:35Alors que l'audition
00:45:36de la compagne
00:45:37de Laurent Ségala
00:45:38se poursuit,
00:45:39au Moulin,
00:45:40la reconstitution reprend.
00:45:42Oui, oui, et puis je lui...
00:45:43Je ne peux pas vous le montrer,
00:45:49mais je lui disais...
00:45:51Je lui disais,
00:45:52réveille-toi, réveille-toi.
00:45:53Réveille-toi.
00:45:58Je ne peux plus.
00:45:59Je suis pas m'asseoir.
00:46:09Ça, c'est toujours pas,
00:46:10rien.
00:46:11Il m'a eu bien
00:46:11de la prison.
00:46:14Ce que j'ai ressenti,
00:46:16c'est un grand désarroi
00:46:19de la part de Laurent Ségala.
00:46:20Une grande peine,
00:46:22une grande angoisse
00:46:24face à ces actes
00:46:26qu'on lui demandait
00:46:26de reproduire
00:46:27et qu'il replongeait
00:46:28dans cette soirée
00:46:29extrêmement pénible.
00:46:34Et nous nous sommes rendus compte
00:46:36que quand il avait
00:46:36de la peine à user ses propos,
00:46:38il changeait totalement
00:46:39de comportement.
00:46:40Il pouvait pleurer,
00:46:41il pouvait se lamenter,
00:46:42alors que dans des moments
00:46:43plus faciles pour lui expliquer,
00:46:45il arrivait à retrouver
00:46:46son naturel.
00:46:52Le prévenu reprend ses esprits
00:46:54et consent à refaire
00:46:55ses fameux gestes
00:46:57de réanimation frénétique.
00:47:01Oui, mais elle résiste, là.
00:47:10Il y a quelque chose qui...
00:47:12Mais c'est pas pareil,
00:47:15parce que là,
00:47:16alors que ma mère,
00:47:17elle était plutonique
00:47:18à ce moment-là,
00:47:18donc elle avait des bras
00:47:19comme des chiffons.
00:47:23Alors...
00:47:23il va prendre ses deux poignets,
00:47:25bras tendus,
00:47:26et commencer à écarter
00:47:27et refermer les bras
00:47:28pour essayer de pratiquer
00:47:31cette réanimation.
00:47:32Et c'est comme ça
00:47:33qu'il se serait blessé
00:47:35au visage
00:47:36avec les ongles
00:47:37de Catherine Segalat.
00:47:39Et quand il essaye
00:47:39de le pratiquer,
00:47:41on voit très bien
00:47:41que c'est pas possible.
00:47:42« Effectivement, c'est difficile
00:47:46de se faire griffer
00:47:48par une personne
00:47:49qui est inconsciente,
00:47:50dont les muscles
00:47:51n'ont aucune rigidité,
00:47:52donc c'est pas des membres
00:47:54rigides,
00:47:55la main n'est pas rigide.
00:47:58Les gestes tels
00:47:59qu'expliqués par M. Segalat
00:48:01ne pouvaient pas expliquer
00:48:03ni la globalité
00:48:05de ses lésions à lui,
00:48:08ni les lésions
00:48:09ou une partie des lésions
00:48:11de Mme Segalat. »
00:48:13On peut peut-être
00:48:14s'étonner, dire
00:48:15« Tiens, avec une réanimation
00:48:16classique,
00:48:17faite dans des conditions
00:48:18optimales,
00:48:20ça n'est pas compatible.
00:48:21Maintenant,
00:48:22par rapport au récit
00:48:23qui a été fait,
00:48:23par rapport à la panique
00:48:24qui est la sienne,
00:48:25par rapport à l'émotion
00:48:27qui est la sienne,
00:48:29je pense qu'on ne peut pas
00:48:30être aussi affirmatif. »
00:48:31Il avait tenté
00:48:32de sauver Catherine Segalat,
00:48:33il avait échoué,
00:48:34on lui redemandait
00:48:35de justifier
00:48:37tous ces gestes
00:48:37les uns après les autres.
00:48:39C'était impossible
00:48:40à faire pour Laurent Segalat,
00:48:41« Vous la gardez, la veste ? »
00:48:42Le juge d'instruction
00:48:43doit maintenant
00:48:44se pencher
00:48:44sur une question essentielle,
00:48:46celle du nettoyage.
00:48:47« Vous ne lavez que le sol ? »
00:48:49« Je ne me souviens pas,
00:48:50monsieur le juge.
00:48:51De mon souvenir, oui. »
00:48:54Les images au Blue Star
00:48:56ont pourtant révélé
00:48:57un nettoyage approfondi
00:48:59des murs
00:48:59et de l'escalier.
00:49:00« Est-ce que vous avez
00:49:03lavé les murs ?
00:49:04Vous les portez des armoires ? »
00:49:06« Je ne me souviens pas. »
00:49:08« Écoutez,
00:49:08j'ai une espèce
00:49:10de brouillard
00:49:11qui…
00:49:12C'est trop dur
00:49:14ce que vous me demandez
00:49:14de faire aujourd'hui. »
00:49:16« Il a le brouillard,
00:49:17mais il a le brouillard
00:49:17seulement quand
00:49:18un certain nombre
00:49:19d'éléments
00:49:20l'arrange. »
00:49:21« C'est quand même
00:49:21important pour l'enquête,
00:49:23donc… »
00:49:23« Non, je comprends bien,
00:49:24mais je demande aussi
00:49:27de… »
00:49:27« Il faudrait faire
00:49:29l'exercice, n'est-ce pas,
00:49:30chacun de nous
00:49:31après trois nuits
00:49:32sans sommeil
00:49:33et voir où arrive
00:49:35le brouillard
00:49:35et où il disparaît.
00:49:36Je pense qu'on aurait
00:49:37peut-être une vision
00:49:38un peu différente
00:49:39des choses
00:49:39que quand on regarde
00:49:40ce film de reconstitution
00:49:42assis dans un fauteuil. »
00:49:44Le brouillard
00:49:45qui entoure
00:49:46Laurent Ségala
00:49:46va s'épaissir
00:49:48encore un peu plus.
00:49:49Les enquêteurs
00:49:50lui révèlent
00:49:50qu'ils ont retrouvé
00:49:51une autre chemise.
00:49:52« La chemise
00:49:55que vous m'avez désignée,
00:49:56elle est dans ce sac.
00:49:56On l'a matérialisée
00:49:58par cette photo-là.
00:50:00Dessous des piles
00:50:01du linge,
00:50:03on retrouve
00:50:04une seconde chemise
00:50:05qui est encore
00:50:07plus tachée dessin.
00:50:11C'est ça
00:50:12qu'on aimerait bien
00:50:12comprendre.
00:50:16Cette chemise
00:50:17peut être à moi.
00:50:21J'aimerais qu'on arrête
00:50:24là parce que
00:50:25c'est un peu plus tachée.
00:50:28On tergivère
00:50:29autour de cette
00:50:29deuxième chemise
00:50:30mais en tous les cas
00:50:31il ne peut pas
00:50:33contester le fait
00:50:35que c'était sa chemise,
00:50:36qu'elle est ensanglottée
00:50:37et qu'il y a
00:50:37des boutons qui manquent.
00:50:39Je ne sais pas pourquoi
00:50:39on a fait tout un flanc
00:50:40de ce changement d'habit
00:50:41alors que si j'avais voulu
00:50:41dissimuler quelque chose
00:50:44parce que c'est comme ça
00:50:44que les policiers
00:50:45l'interprètent,
00:50:45j'aurais changé aussi
00:50:46mon pantalon.
00:50:46Moi j'y vois plutôt
00:50:50un geste à nouveau
00:50:51un peu incohérent,
00:50:53dissociatif,
00:50:55difficile à expliquer
00:50:57après coup
00:50:57mais qui finalement
00:50:58s'inscrit assez bien
00:50:59dans l'état psychologique
00:51:01qui est le sien
00:51:02au moment des faits.
00:51:02Mon sentiment n'est pas
00:51:07que cette reconstitution
00:51:08l'accable,
00:51:09mon sentiment c'est
00:51:10que cette reconstitution
00:51:11montre la détresse
00:51:14dans laquelle il est
00:51:14et révèle par elle-même
00:51:17qu'elle ne se situe pas
00:51:18au bon moment
00:51:19finalement des investigations.
00:51:21On avance trop vite
00:51:22et on essaye
00:51:23de reconstituer une scène
00:51:24dont on ne sait
00:51:25encore presque rien.
00:51:26Du côté de l'enquête,
00:51:33personne ne croit
00:51:34Laurent Ségala.
00:51:35Même sans aveu,
00:51:36même sans arme,
00:51:37l'accusation est convaincue
00:51:39de sa culpabilité.
00:51:41Reste à lui trouver
00:51:41un mobile.
00:51:42La famille détient
00:51:44sans doute
00:51:44la clé de l'énigme.
00:51:47Quand Catherine rencontre Roger,
00:51:48elle a 29 ans,
00:51:51travaille comme éducatrice
00:51:52auprès d'enfants
00:51:53et rêve de maternité.
00:51:54Mais Roger, lui,
00:51:56a 38 ans
00:51:57et 3 enfants.
00:51:59Elle devait s'engager
00:52:00à ne pas avoir d'enfants
00:52:01parce que comme il disait,
00:52:04j'en ai déjà,
00:52:05je n'en veux plus.
00:52:06Et Catherine,
00:52:07qui aimait tellement
00:52:07les enfants,
00:52:08c'était son métier,
00:52:09c'était une grande famille,
00:52:12elle devait être d'accord
00:52:13de ne pas avoir d'enfants
00:52:16et ça l'a beaucoup,
00:52:17beaucoup attrissé.
00:52:22Quelque part,
00:52:23j'étais un peu peut-être
00:52:24un enfant qu'elle n'avait pas eu
00:52:25parce qu'elle aurait
00:52:26beaucoup aimé avoir d'enfants.
00:52:28Quand je l'ai connue,
00:52:29je devais avoir
00:52:308 ou 9 ans
00:52:30et elle a été
00:52:32extrêmement maternelle
00:52:34avec moi.
00:52:35Et tout de suite,
00:52:35le courant
00:52:36est très bien passé.
00:52:37Et elle était vraiment adorable
00:52:39et on l'aimait tous
00:52:41beaucoup.
00:52:44Pour Laurent aussi,
00:52:46Catherine vient combler
00:52:47un manque.
00:52:48Quand ses parents ont divorcé,
00:52:50il n'était qu'un bébé.
00:52:51Il a été élevé seul
00:52:53par sa mère,
00:52:54une femme psychologiquement fragile.
00:52:56Ce qu'il raconte,
00:52:57c'est une relation difficile
00:52:59avec une mère âgée,
00:53:01en tout cas au regard
00:53:03d'un petit enfant.
00:53:04Donc il avait l'impression
00:53:04d'être un gosse de vieux,
00:53:06une mère dépressive,
00:53:07une mère qui n'avait jamais
00:53:08accepté sa séparation.
00:53:13Alors quand Laurent part
00:53:14pour les vacances scolaires
00:53:15chez son père en Suisse,
00:53:17il découvre
00:53:18une toute autre figure maternelle.
00:53:21Le contraste entre sa mère
00:53:24et sa belle-mère
00:53:26est très frappant.
00:53:28Cette belle-mère
00:53:29qui a une personnalité
00:53:30avec un fort caractère,
00:53:33avec laquelle il dit avoir eu
00:53:35un rapport très affectueux
00:53:36et avec laquelle
00:53:38il va échanger des confidences.
00:53:40Lorsqu'il aura des chagrins,
00:53:42ce n'est pas à sa mère
00:53:43qu'il va les raconter,
00:53:45c'est à sa belle-mère.
00:53:46Catherine a toujours
00:53:49préféré Laurent,
00:53:50je ne sais pas pourquoi,
00:53:51mais il était très mignon
00:53:52et puis il était très en avance
00:53:54pour beaucoup de choses.
00:53:56Peut-être que c'est ça aussi
00:53:57qui lui a plu en lui,
00:53:58il était très vif,
00:53:59il comprenait tout très vite,
00:54:00il était pas surdoué,
00:54:03je ne vais pas dire ça,
00:54:03mais un petit peu,
00:54:05quelque part.
00:54:06Cette relation se renforce
00:54:08à l'âge adulte.
00:54:09Quand Laurent fonde une famille,
00:54:11Catherine est très présente
00:54:12auprès de ses quatre
00:54:13petites filles.
00:54:14C'était une grand-mère adorable,
00:54:18elle était vraiment
00:54:19très attentionnée.
00:54:23Catherine et Laurent
00:54:24s'entendent comme mère et fils,
00:54:27en tout cas,
00:54:28jusqu'à ce que Laurent
00:54:29vienne s'installer en Suisse.
00:54:30Et si la reprise de la librairie
00:54:34avait changé la donne ?
00:54:37Un mois avant le drame,
00:54:38la demi-sœur de Laurent
00:54:39a passé quelques jours
00:54:40de vacances au Moulin.
00:54:41Ma belle-mère m'a expliqué
00:54:42justement que mon père
00:54:43voulait prendre sa retraite,
00:54:45que ça devenait vraiment difficile,
00:54:47il avait vu sa maladie,
00:54:48il était trop fatigué,
00:54:49c'était trop épuisant,
00:54:50qu'elle, elle aimerait bien
00:54:51pouvoir profiter un petit peu de lui,
00:54:53et donc qu'il allait céder
00:54:55la librairie à mon frère.
00:54:56Il souhaitait que cette librairie
00:55:00lui survive,
00:55:01il sentait qu'il vieillissait,
00:55:03et il était heureux
00:55:04que ce soit un Ségala
00:55:04qui continue à faire tourner
00:55:07cette librairie,
00:55:08donc il était vraiment heureux.
00:55:11On faisait vraiment
00:55:12une bonne équipe,
00:55:12je garde un excellent souvenir
00:55:13des journées que j'ai passées
00:55:14à la librairie avec eux.
00:55:17Cette bonne entente,
00:55:19de nombreuses personnes
00:55:20en témoignent,
00:55:21comme cette voisine,
00:55:22qui est passée à la librairie
00:55:23quelques jours avant Noël.
00:55:27On a bu un café ensemble,
00:55:29et c'est là que nous avons eu
00:55:30l'occasion de rencontrer Laurent,
00:55:33avec lequel nous avons échangé
00:55:34deux, trois petits mots,
00:55:36et voilà,
00:55:37tout semblait très serein,
00:55:39très tranquille.
00:55:42Laurent avait l'air
00:55:43de reprendre les choses
00:55:44tellement bien en main.
00:55:48Catherine se réjouissait
00:55:49de prendre une retraite
00:55:50pour vivre encore des moments
00:55:52côte à côte avec son mari,
00:55:54dans la tranquillité,
00:55:55sans avoir le poids
00:55:56de cette librairie
00:55:57qui devenait lourde.
00:56:00Et tout l'entourage,
00:56:02les membres de la famille,
00:56:02les proches,
00:56:03nous disent que la relation
00:56:04entre Catherine et Laurent,
00:56:06entre Laurent et son père,
00:56:08était plutôt bonne.
00:56:09C'était plutôt harmonieux.
00:56:11Il y avait peu de conflits,
00:56:13voire pas de conflits apparents.
00:56:16Un témoin, pourtant,
00:56:17va remettre en cause
00:56:18cette harmonie familiale.
00:56:20Barbara,
00:56:22l'une des plus proches
00:56:23amies de Catherine.
00:56:25Les deux femmes déjeunaient
00:56:26ensemble chaque semaine,
00:56:28l'occasion d'échanger
00:56:29des confidences.
00:56:30d'un côté, bien sûr,
00:56:34il y avait la version officielle
00:56:35qu'elle était ravie.
00:56:40Et ils allaient être déchargés,
00:56:44pouvoir laisser la librairie
00:56:46dans des bonnes mains.
00:56:47Et d'un autre côté,
00:56:51ils se sentaient un peu exclues
00:56:54qu'il y avait cette symbiose
00:56:57entre les deux.
00:57:00Laurent prenait-il trop de place
00:57:02au sein du couple Ségala ?
00:57:06C'était plus la même exclusivité
00:57:09pour Roger
00:57:13qu'elle avait eu pendant 20 ans.
00:57:17Catherine voyait un peu
00:57:19ce rêve
00:57:20de la vieillesse à deux
00:57:22dans un petit cocon
00:57:23sans influence extérieure
00:57:27se dissoudre
00:57:29peu à peu.
00:57:32Ce duo père-fils omniprésent,
00:57:35Catherine l'avait pressenti.
00:57:38Quand Laurent est arrivé
00:57:39à Lausanne,
00:57:40la question de son hébergement
00:57:42s'est posée.
00:57:43Catherine a alors fait
00:57:45une demande surprenante
00:57:46à son amie.
00:57:47Le moulin,
00:57:50disons-le,
00:57:51il est grand.
00:57:52Donc il y a beaucoup de place.
00:57:56Catherine m'a dit
00:57:57je ne voulais pas
00:57:58qu'il habite ici.
00:58:01Oui ?
00:58:02Est-ce qu'il peut l'habiter
00:58:04chez toi ?
00:58:05Par amitié pour Catherine,
00:58:12Barbara accepte.
00:58:14Elle prête à Laurent
00:58:15une petite maison,
00:58:16mais les relations
00:58:17se tendent rapidement.
00:58:19Laurent part au bout
00:58:20de trois mois.
00:58:21Là encore,
00:58:22pas question qu'il vive
00:58:23au moulin,
00:58:24Catherine préfère
00:58:25lui louer un studio.
00:58:26ce n'était pas
00:58:27l'harmonie parfaite
00:58:29entre un chatou.
00:58:35À force de creuser,
00:58:37les policiers
00:58:38finissent bien
00:58:38par trouver
00:58:39quelques légères tensions
00:58:40dans la famille.
00:58:41Mais rien de bien méchant,
00:58:43rien qui n'explique
00:58:44un tel crime.
00:58:45Reste alors
00:58:46le mobile financier.
00:58:47Laurent Ségala
00:58:49avait-il intérêt
00:58:50à ce que sa belle-mère
00:58:51disparaisse ?
00:58:52Et si le mobile
00:58:55c'était-elle
00:58:56la librairie familiale ?
00:59:00Laurent Ségala,
00:59:02sachant son père malade,
00:59:03aurait-il voulu
00:59:04la récupérer
00:59:05pour lui seul
00:59:05et écarter
00:59:07sa belle-mère
00:59:07de la succession ?
00:59:11Cette question,
00:59:12ce journaliste
00:59:13l'a posée
00:59:14à Roger Ségala
00:59:15quelques semaines
00:59:16avant sa mort.
00:59:17Les enquêteurs
00:59:19ont pensé
00:59:21que mon fils
00:59:22faisait un travail
00:59:23de sapin
00:59:24en profondeur
00:59:26pour s'emparer
00:59:27de la librairie
00:59:27alors qu'elle lui tombait
00:59:29toute cuite
00:59:30dans les mains.
00:59:31On avait décidé,
00:59:32ma femme et moi,
00:59:32d'arrêter un avril.
00:59:36Laurent Ségala
00:59:37récupérait la librairie
00:59:39trois mois
00:59:39après le drame.
00:59:40Les papiers
00:59:41étaient signés.
00:59:43Les enquêteurs
00:59:43ont beau fouiller,
00:59:44la mort de Catherine
00:59:45ne rapporte rien
00:59:46à son beau-fils.
00:59:48Et puis,
00:59:48le généticien
00:59:49ne court pas
00:59:50après l'argent.
00:59:51Ses revenus
00:59:51sont très corrects.
00:59:53La situation
00:59:54de Laurent Ségala
00:59:55est, je dirais,
00:59:57plutôt normale.
00:59:58Entre les revenus
00:59:59qu'il a
00:59:59comme chercheur
01:00:01plus les revenus
01:00:02qui lui sont versés
01:00:04par Catherine
01:00:04et son père
01:00:05pour le travail
01:00:05qu'il effectue
01:00:06à la librairie,
01:00:07lui permettent
01:00:07de vivre confortablement
01:00:09même s'il doit verser
01:00:11des pensions
01:00:12pour ses enfants,
01:00:13ce qu'il fait
01:00:14de manière tout à fait régulière.
01:00:15on voit qu'il a
01:00:16une situation financière
01:00:18qui est plutôt équilibrée.
01:00:21Laurent Ségala
01:00:22n'est pas vénal,
01:00:24tout le monde le dit.
01:00:25Sauf peut-être
01:00:26ses derniers temps.
01:00:28Selon un témoin,
01:00:29Catherine avait remarqué
01:00:30que les ventes en liquide
01:00:31finissaient souvent
01:00:32dans les poches
01:00:33de son beau-fils.
01:00:35Une mauvaise habitude
01:00:36plus qu'une escroquerie,
01:00:38mais elle avait prévu
01:00:38de lui en toucher un mot.
01:00:40Et justement,
01:00:41le jour du drame,
01:00:42l'argent semblait être
01:00:43au cœur des conversations.
01:00:45Quand nous sommes arrivés
01:00:46sur la scène de crime,
01:00:47nous avons constaté
01:00:48qu'il y avait beaucoup
01:00:48de papiers sur la table,
01:00:50notamment des livrets postaux
01:00:51et des livrets bancaires.
01:00:53Ces documents bancaires
01:00:54et postaux sur la table
01:00:55nous laissent un peu perplexes,
01:00:57surtout vers 7 ou 8 heures
01:00:59le soir un samedi
01:01:00alors que M. Ségala
01:01:00est malade.
01:01:03Pour nous,
01:01:04même si on n'a pas
01:01:05un mobile avéré,
01:01:07on a malgré tout,
01:01:08dans le cadre
01:01:09de nos investigations,
01:01:10un certain nombre
01:01:10d'éléments qui font penser
01:01:11qu'il n'y a pu y avoir
01:01:13une dispute,
01:01:13il n'y a pu y avoir
01:01:14une querelle
01:01:16pour de quelconques motifs
01:01:17et cette querelle
01:01:19a probablement dégénéré.
01:01:22Catherine avait-elle
01:01:23découvert quelque chose ?
01:01:25Menaçait-elle
01:01:25de tout raconter
01:01:27à son mari ?
01:01:28Ou bien avait-elle
01:01:30changé d'avis
01:01:31sur la succession
01:01:31provoquant la colère
01:01:33de Laurent Ségala ?
01:01:34Catherine a-t-il
01:01:36une gentillesse
01:01:37incomparable.
01:01:39Mais Catherine
01:01:40savait aussi bien
01:01:41se défendre.
01:01:42Si on l'a poussée
01:01:43dans ses gants
01:01:44et puis si elle
01:01:46n'était vraiment
01:01:47pas contente,
01:01:48elle le disait.
01:01:51À l'issue de l'enquête,
01:01:53les policiers
01:01:53n'ont pas de mobile solide
01:01:55pour expliquer
01:01:55le meurtre
01:01:56de Catherine Ségala.
01:01:57Juste des rumeurs,
01:01:59des suppositions.
01:02:02Pour ce psychiatre
01:02:02qui a examiné
01:02:03Laurent Ségala
01:02:04à la demande
01:02:05de la défense,
01:02:05il en faut
01:02:06beaucoup plus
01:02:07pour tuer
01:02:08celle que l'on
01:02:08considère
01:02:09comme sa mère.
01:02:10S'il avait tué
01:02:11sa belle-mère,
01:02:14on pourrait considérer
01:02:14que c'est un matricide.
01:02:17Pour qu'un homme
01:02:18dépourvu
01:02:19de maladie mentale
01:02:21en vienne
01:02:21à tuer
01:02:22sa mère
01:02:23ou celle
01:02:26qui a une place
01:02:27de mère,
01:02:28il faut vraiment
01:02:29des circonstances
01:02:29absolument exceptionnelles.
01:02:32Quelque chose
01:02:32qui va très au-delà
01:02:33de la simple
01:02:34petite blessure
01:02:34narcissique.
01:02:36Quelle circonstance
01:02:37exceptionnelle
01:02:38aurait pu pousser
01:02:40Laurent Ségala
01:02:40au meurtre ?
01:02:42Le psychiatre
01:02:42se doit d'envisager
01:02:43toutes les hypothèses,
01:02:44même les plus extrêmes.
01:02:46J'envisage
01:02:47l'hypothèse
01:02:48d'une séduction
01:02:50de la part
01:02:51de cette belle-mère
01:02:53à l'égard
01:02:54de Laurent Ségala.
01:02:57Et ça,
01:02:57les vieilles dames
01:02:58qui essaient
01:02:59de séduire
01:03:00les jeunes hommes,
01:03:00ça peut déclencher
01:03:01des trucs
01:03:02d'horreur.
01:03:04hypothèse
01:03:08qui ne correspond
01:03:09à rien
01:03:10ni dans son récit,
01:03:12ni dans sa relation,
01:03:14ni dans ce qu'on sait
01:03:15de cette femme.
01:03:16Donc,
01:03:17en essayant
01:03:17d'imaginer
01:03:19toutes les hypothèses
01:03:21possibles
01:03:21qui pourraient
01:03:22rendre compte
01:03:23du fait
01:03:23que Laurent Ségala
01:03:24aurait tué
01:03:25sa belle-mère,
01:03:26je n'en ai trouvé
01:03:27aucune.
01:03:27C'est difficile
01:03:30de qualifier
01:03:31l'infraction
01:03:32d'un homicide
01:03:33ou d'un matricide.
01:03:34Ce qu'il faut savoir,
01:03:35c'est que probablement
01:03:37que M. Ségala
01:03:38n'avait pas l'intention
01:03:39de tuer
01:03:40sa belle-mère.
01:03:42Qu'il ait eu
01:03:42ou non l'intention
01:03:43de la tuer,
01:03:44les enquêteurs
01:03:45estiment qu'ils ont
01:03:45assez d'éléments
01:03:46à charge
01:03:47contre Laurent Ségala
01:03:48pour boucler
01:03:49leur enquête.
01:03:50En juin 2010,
01:03:51cinq mois après
01:03:52la mort de Catherine Ségala,
01:03:54ils rendent
01:03:54leur conclusion.
01:03:55Laurent Ségala
01:03:57est l'auteur
01:03:58du meurtre
01:03:59de Catherine.
01:04:03Le mobile
01:04:04pourrait être
01:04:05indifférent
01:04:06sur la reprise
01:04:07ou les conditions
01:04:08de la reprise
01:04:09de la librairie
01:04:10par Laurent Ségala.
01:04:13Dans ce contexte,
01:04:14il y a eu une dispute
01:04:15avec la comptabilité
01:04:16qui était sur la table.
01:04:17Ces disputes
01:04:17ont probablement
01:04:19dû dégénérer.
01:04:21Catherine et Laurent
01:04:21se trouvent alors
01:04:22certainement
01:04:23en haut de l'escalier.
01:04:25il la pousse,
01:04:28elle tombe
01:04:28lourdement
01:04:29jusqu'en bas.
01:04:30C'est là que
01:04:31l'acte,
01:04:32je dirais,
01:04:33le plus grave
01:04:33intervient.
01:04:39Il y a eu
01:04:40des coups
01:04:41extrêmement violents
01:04:42qui ont été donnés
01:04:42à Catherine Ségala.
01:04:45Après avoir tué
01:04:46sa belle-mère,
01:04:48Laurent Ségala
01:04:48aurait cherché
01:04:49dans la panique
01:04:50à maquiller
01:04:51son forfait.
01:04:51il a changé
01:04:52de chemise.
01:04:55Il a essayé
01:04:56de nettoyer,
01:04:57d'enlever
01:04:58toutes les traces
01:04:59qui pourraient
01:05:00l'incriminer
01:05:01ou qui pourraient
01:05:01indiquer aux enquêteurs
01:05:02qu'on a affaire
01:05:03à un crime
01:05:04et donc d'essayer
01:05:05de camoufler
01:05:06ce crime
01:05:07en accident.
01:05:10Et ce n'est
01:05:11qu'après avoir
01:05:12soigneusement
01:05:13lavé les sols,
01:05:14les portes
01:05:14et les murs
01:05:15qu'il aurait
01:05:16contacté
01:05:17les secours.
01:05:25Maître Portejoie,
01:05:26au bout de 5 mois
01:05:27d'incarcération,
01:05:28Laurent Ségala
01:05:29veut étoffer
01:05:30son équipe de défense
01:05:31qui ne comporte
01:05:32que 2 avocats suisses.
01:05:33Il fait appel à vous.
01:05:34Vous avez accès
01:05:35au dossier.
01:05:36Que pensez-vous
01:05:37du scénario des policiers ?
01:05:39Je pense que
01:05:40le scénario des policiers
01:05:41est un scénario
01:05:42primaire.
01:05:45On ne s'est intéressé
01:05:46qu'à lui.
01:05:47C'est souvent ça
01:05:48d'ailleurs
01:05:48le début
01:05:49de l'erreur judiciaire.
01:05:50On privilégie
01:05:51une piste,
01:05:52on se fixe
01:05:53sur une piste,
01:05:54on évacue
01:05:55toute autre démarche
01:05:56et l'on considère
01:05:57que l'on a d'entrée
01:05:59le véritable coupable.
01:06:00Mais vous savez,
01:06:01c'est une vieille règle
01:06:02en matière pénale.
01:06:03Ce sont toujours
01:06:04les innocents
01:06:05qui se défendent
01:06:05le plus mal.
01:06:06Quand en plus,
01:06:08l'innocent
01:06:08est un scientifique
01:06:09qui pense que
01:06:11la justice
01:06:12est une science
01:06:13exacte
01:06:14comme la biologie.
01:06:15Il est biologiste.
01:06:16donc il pense
01:06:17lui que
01:06:17parce qu'il est innocent,
01:06:19l'innocence
01:06:19va rejaillir
01:06:20au grand jour
01:06:21sans qu'il ait
01:06:21d'efforts à faire.
01:06:22C'est pour ça
01:06:22qu'il s'est très mal
01:06:23défendu.
01:06:24Pour vous,
01:06:24s'il l'avait tué,
01:06:25il aurait agi différemment ?
01:06:27Il est tout sauf stupide.
01:06:28Il aurait pris
01:06:29des précautions
01:06:30qu'il n'a pas prises.
01:06:32Il a une chemise
01:06:33qui est tachée de sang
01:06:33après la réanimation.
01:06:36Cette chemise
01:06:37tachée de sang,
01:06:37il la met je crois
01:06:38dans...
01:06:39Dans le tambour
01:06:39de la machine.
01:06:40Dans le tambour
01:06:41de la machine.
01:06:42Oui, mais ce n'est pas
01:06:42planqué.
01:06:43On ne peut pas planquer.
01:06:44Il sait très bien
01:06:45que lorsque les enquêteurs
01:06:46vont arriver,
01:06:47ils vont perquisitionner,
01:06:49ils vont visiter la maison
01:06:50et qu'ils vont retrouver
01:06:51cette chemise.
01:06:53C'est tellement grossier,
01:06:55c'est tellement stupide
01:06:56que c'est la preuve même
01:06:57de son innocence.
01:06:59On dit,
01:06:59mais vous avez aussi
01:07:00lavé la scène
01:07:01prétendue de crime.
01:07:03Vous l'avez lavé
01:07:04avec Deloitte Javel,
01:07:05mais il l'a lavé
01:07:06de manière très grossière.
01:07:08Vous pensez bien
01:07:08que s'il avait quelque chose
01:07:10à se reprocher,
01:07:11il aurait fait ça
01:07:12de manière
01:07:13beaucoup plus méthodique.
01:07:15Ces éléments
01:07:16qui ont été considérés
01:07:17longtemps à charge
01:07:18par les enquêteurs
01:07:19sont la meilleure preuve
01:07:20de son innocence.
01:07:22Est-ce qu'il avait
01:07:22un intérêt financier
01:07:23à se débarrasser
01:07:24de sa belle-mère ?
01:07:25Aucun intérêt financier.
01:07:27Il n'y a pas de mobile.
01:07:28Pour qu'il y ait un crime,
01:07:29il faut un mobile,
01:07:30il faut une explication.
01:07:31Et là,
01:07:32on a recherché
01:07:32toutes les explications
01:07:33possibles et imaginables.
01:07:35S'il n'y a pas
01:07:35d'explication rationnelle
01:07:36à ce crime.
01:07:38On peut dire
01:07:38qu'il a perdu la tête,
01:07:41qu'il a fondu les plombs
01:07:42et c'est un geste irrationnel.
01:07:44Et là-dessus,
01:07:45nous avons deux rapports
01:07:46d'expertise
01:07:46et les deux concluent
01:07:48de la manière
01:07:48la plus claire.
01:07:49Les deux viennent dire
01:07:50que rien dans la personnalité
01:07:52de Laurent Ségala
01:07:52peut expliquer
01:07:53un passage à l'acte
01:07:54irrationnel.
01:07:56Pour vous,
01:07:56la piste de Laurent Ségala
01:07:57ne tient pas,
01:07:58mais quelle stratégie
01:07:59adoptez-vous
01:08:00pour le défendre ?
01:08:01Nous décidons immédiatement
01:08:02de réagir,
01:08:04de, comment dire,
01:08:06contre-attaquer.
01:08:08Comment contre-attaquer ?
01:08:09Eh bien,
01:08:10en sollicitant le concours
01:08:11d'un certain nombre
01:08:12de sachants,
01:08:13d'experts.
01:08:15Nous pensons tout de suite
01:08:16au professeur Dominique Lecomte,
01:08:18qui est la responsable
01:08:20de l'Institut Modic et légal
01:08:21en France.
01:08:22et légal à Paris.
01:08:23Nous pensons tout de suite
01:08:24à Daniel Zaguri
01:08:25en qualité de psychiatre.
01:08:28Nous faisons appel
01:08:28également à une criminologue
01:08:29renommée qui s'appelle
01:08:30Anne-Rachel Van der Roost
01:08:32et nous contactons
01:08:33tous ces gens-là.
01:08:35Et je veux dire
01:08:35que la justice suisse...
01:08:36Elle vous laisse faire ?
01:08:37Nous laisse faire.
01:08:38Nous laisse faire,
01:08:38c'est remarquable ça.
01:08:39Le procureur de la République
01:08:41qui mène l'enquête,
01:08:42que je consulte,
01:08:44que je contacte,
01:08:45me dit,
01:08:46mais vous avez choisi
01:08:46des experts,
01:08:47ils peuvent travailler
01:08:47dans les mêmes conditions
01:08:49que les experts suisses
01:08:50que j'ai dessinées.
01:08:54Octobre 2010,
01:08:55neuf mois après les faits,
01:08:57Dominique Lecomte,
01:08:58la directrice
01:08:59de l'Institut Médico-Légal
01:09:00de Paris,
01:09:01reprend tout à zéro.
01:09:04La justice suisse
01:09:05lui fait parvenir
01:09:06le rapport d'autopsie
01:09:07et les prélèvements
01:09:08réalisés sur le corps
01:09:09de la victime.
01:09:11Dès le départ,
01:09:13Mme Lecomte m'a dit
01:09:14qu'elle était très surprise
01:09:15par la lésion
01:09:16sur l'arrière du crâne
01:09:18de Catherine Ségala.
01:09:19Elle me disait
01:09:19que c'était des lésions
01:09:20typiques d'une fracture
01:09:22qu'on peut se faire
01:09:22sur une marche de trottoir.
01:09:24Et en ce sens-là,
01:09:24elle était très intéressée
01:09:25à voir l'escalier du moulin
01:09:28pour voir si cette lésion
01:09:29pouvait avoir été provoquée
01:09:31par le choc du crâne
01:09:32de Catherine Ségala
01:09:33sur une marche de l'escalier.
01:09:35La légiste se rend donc
01:09:37sur place
01:09:37pour faire l'inventaire
01:09:39de tout ce qui aurait pu
01:09:40blesser Catherine Ségala
01:09:41dans la cage de l'escalier.
01:09:43Elle observe longuement
01:09:44la rampe,
01:09:46la poignée,
01:09:47l'encadrement de la porte,
01:09:49les marches en ciment
01:09:50et note que la quatrième
01:09:52à partir du bas
01:09:52est cassée.
01:09:54Quand ces conclusions
01:09:55arrivent sur le bureau
01:09:56des avocats de la défense,
01:09:57elles font l'effet
01:09:58d'un séisme.
01:09:59Catherine Ségala
01:10:00n'aurait pas été tuée.
01:10:02Le rapport Lecomte
01:10:04dit l'hypothèse
01:10:05la plus plausible.
01:10:06C'est celle
01:10:07de l'accident.
01:10:08En tout cas,
01:10:08cette hypothèse
01:10:09est parfaitement envisageable
01:10:10et que les blessures
01:10:11constatées
01:10:12ne la rendent pas
01:10:13du tout exclue.
01:10:14exclue.
01:10:15Et ça,
01:10:15je dirais que ça va
01:10:16effectivement
01:10:17au-delà même
01:10:18de ce que nous imaginions.
01:10:23Avant Madame Lecomte,
01:10:24on part du principe
01:10:25qu'il y a eu
01:10:26l'intervention d'un tiers.
01:10:28Donc on cherche
01:10:28les marteaux
01:10:29et tout d'un coup,
01:10:32Madame Lecomte nous dit
01:10:32mais c'est pas un homicide,
01:10:34c'est une chute
01:10:34dans les escaliers.
01:10:36Et ça,
01:10:36ça a été vraiment
01:10:36un tournant pour nous
01:10:38dans le dossier.
01:10:39La légiste
01:10:41est formelle.
01:10:42Aucune des lésions
01:10:43constatées
01:10:43n'a pu être provoquée
01:10:45par un marteau.
01:10:47En revanche,
01:10:48deux chutes
01:10:48peuvent à elles seules
01:10:50tout expliquer.
01:10:53Catherine Ségala
01:10:53a pu avoir
01:10:54ces différentes lésions
01:10:56en tombant
01:10:57dans les escaliers
01:10:57puis peut-être
01:10:59en se relevant
01:10:59pour aller chercher
01:11:01du secours
01:11:01et en retombant
01:11:02à nouveau.
01:11:04Catherine Ségala
01:11:05serait tombée
01:11:06en avant
01:11:06dans les escaliers.
01:11:07Sa tête
01:11:09aurait pu heurter
01:11:10à plusieurs reprises
01:11:11la poignée,
01:11:13la rampe
01:11:13ou une marche.
01:11:15Ensuite,
01:11:16elle a pu se relever,
01:11:18remonter quelques marches
01:11:19et retomber
01:11:21à la renverse.
01:11:23La plaie
01:11:23à l'arrière
01:11:23de la tête
01:11:24correspond parfaitement
01:11:25à un choc
01:11:26contre la marche
01:11:27ébréchée.
01:11:30La légiste
01:11:31va encore plus loin.
01:11:32Elle donne
01:11:32une estimation
01:11:33très précise
01:11:34de l'heure
01:11:34à laquelle
01:11:34Catherine Ségala
01:11:35serait tombée.
01:11:37Mme Lecomte
01:11:40apporte
01:11:40un élément
01:11:41nouveau
01:11:41qui n'avait jamais
01:11:42été abordé
01:11:43jusqu'à ce moment-là.
01:11:44C'est la question
01:11:45du contenu gastrique.
01:11:47En fonction
01:11:47de la quantité
01:11:49retrouvée
01:11:50dans l'estomac
01:11:51de Catherine Ségala,
01:11:52elle estime
01:11:52que l'heure
01:11:54de l'arrêt
01:11:54de la digestion
01:11:55doit avoir lieu
01:11:56aux alentours
01:11:57de 17 heures.
01:12:0017 heures,
01:12:02l'heure du thé.
01:12:03Dans la cuisine,
01:12:04les enquêteurs
01:12:05ont justement
01:12:05retrouvé
01:12:06une tasse pleine.
01:12:08Un détail
01:12:08qui colle
01:12:09avec cette nouvelle version.
01:12:12On sait
01:12:13qu'il y a eu
01:12:13un événement
01:12:14traumatisant
01:12:15aux alentours
01:12:16de 17 heures
01:12:17qui stoppe
01:12:18la digestion
01:12:19de Catherine Ségala.
01:12:21Or,
01:12:21à 17 heures,
01:12:22Laurent Ségala
01:12:22ne pouvait pas
01:12:23être à vos surmarches.
01:12:26Le reste du rapport
01:12:28valide
01:12:29les autres déclarations
01:12:30de Laurent Ségala.
01:12:31Les fractures des côtes,
01:12:32typiques de celles
01:12:33sont constatées
01:12:34lors des réanimations.
01:12:36Le sang retrouvé
01:12:36sur le col de la chemise
01:12:38compatible lui aussi.
01:12:40Quant aux greffures
01:12:41sur le visage,
01:12:42là encore,
01:12:43l'allégiste
01:12:44a une explication.
01:12:47Madame Lecomte
01:12:48estime pour sa part
01:12:49que les lésions
01:12:50présentées
01:12:51par Laurent Ségala
01:12:52sur le visage
01:12:52et sur les mains
01:12:53sont parfaitement
01:12:54compatibles
01:12:55avec sa version
01:12:56des fêtes.
01:12:57On a tout d'un coup
01:12:58un expert
01:12:59de renommée mondiale
01:13:01qui confirme
01:13:02la version
01:13:04de Laurent Ségala.
01:13:11Pour moi,
01:13:12c'est une évidence.
01:13:13Pour moi,
01:13:13je sais qu'elle a eu
01:13:14un accident
01:13:14et malheureusement,
01:13:16il lui a été fatal.
01:13:18Et elle est tombée
01:13:19dans cet escalier,
01:13:20ce fameux escalier
01:13:21et qui était très dangereux.
01:13:22Le fait que ce soit
01:13:28un accident,
01:13:28c'est devenu limpide.
01:13:30Catherine était fatiguée,
01:13:32elle revenait
01:13:32la vêt de nuit
01:13:33où elle n'avait pas dormi,
01:13:34elle était quand même
01:13:35fatiguée depuis
01:13:36de nombreux mois.
01:13:37Enfin,
01:13:39donc tout concordait.
01:13:40Et vraiment,
01:13:42cette autopsie
01:13:43de Madame Lecomte,
01:13:43ça nous a vraiment
01:13:45soulagés.
01:13:46Même si Laurent
01:13:47était encore en prison,
01:13:48on avait déjà
01:13:49une réponse.
01:13:52Dominique,
01:13:58la justice suisse
01:13:59fait appel
01:13:59à un troisième
01:14:00médecin légiste.
01:14:01Que dit-il celui-là ?
01:14:02Oui, Frédéric,
01:14:03une première autopsie suisse
01:14:04qui dit meurtre,
01:14:05une deuxième expertise
01:14:06française qui dit accident.
01:14:08Et là,
01:14:08on va avoir
01:14:08une troisième expertise
01:14:09qui est confiée
01:14:10à un légiste portugais
01:14:12et qui va la rendre
01:14:13en septembre 2011
01:14:14et il conforte
01:14:15la première expertise.
01:14:16Lui aussi dit
01:14:17c'est un meurtre.
01:14:18Et il critique
01:14:19très sévèrement
01:14:20la seconde expertise
01:14:22qui est celle
01:14:23de la légiste française
01:14:24qui est le professeur
01:14:25Dominique Lecomte.
01:14:26Écoutez bien ce qu'il écrit,
01:14:27ce légiste portugais.
01:14:29Le rapport
01:14:29de Madame Le Professeur
01:14:31Dominique Lecomte
01:14:32suscite à nos yeux
01:14:33les plus fortes réserves.
01:14:35Non seulement
01:14:35il contient
01:14:36des affirmations
01:14:37et des diagnostics
01:14:38qui ne sont pas corrects,
01:14:40mais encore
01:14:41il est rédigé
01:14:42dans une perspective
01:14:43qui ne peut apparaître
01:14:44que tendancieuse.
01:14:47Et il ne prend
01:14:47en considération
01:14:48que les explications
01:14:50susceptibles
01:14:50de soutenir
01:14:51la thèse
01:14:52de la défense.
01:14:54Et cet expert
01:14:54va pointer des erreurs
01:14:55dans le rapport
01:14:56de Dominique Lecomte.
01:14:57Il dit lui
01:14:57qu'il est impossible
01:14:58comme l'a fait
01:14:59Dominique Lecomte
01:15:00de situer la mort
01:15:01dans un créneau horaire
01:15:02de deux heures.
01:15:03Lui,
01:15:04il s'en réfère
01:15:05à la première expertise
01:15:07qui donnait
01:15:07un délai
01:15:08de six heures,
01:15:09c'est-à-dire
01:15:09entre 15h15
01:15:11et 21h.
01:15:12Et dernier point,
01:15:13il dénonce
01:15:14fermement
01:15:14les résultats
01:15:15de l'analyse
01:15:16du contenu gastrique
01:15:17qui est selon lui
01:15:19absolument pas fiable.
01:15:21Celle de Dominique Lecomte,
01:15:22évidemment.
01:15:22Ce médecin légiste
01:15:23s'intéresse aussi
01:15:25aux blessures
01:15:26sur le visage
01:15:27de Laurent Ségala.
01:15:28Oui, alors,
01:15:29pour lui,
01:15:29c'est absolument clair,
01:15:31la version
01:15:31de Laurent Ségala
01:15:32ne tient pas.
01:15:34Le légiste portugais
01:15:35explique
01:15:35qu'une personne
01:15:36inanimée
01:15:37a des doigts
01:15:38mous
01:15:39qui ne peuvent pas
01:15:40provoquer
01:15:41sur un visage
01:15:41des griffures.
01:15:42Et pour lui,
01:15:43c'est clairement
01:15:44des traces de défense.
01:15:45Il l'écrit.
01:15:46Ce serait la première fois
01:15:48en plus de 25 années
01:15:49de carrière
01:15:50que nous,
01:15:51il parle de lui,
01:15:52nous nous voyons
01:15:53confronter
01:15:54à la possibilité
01:15:55qu'un corps inanimé
01:15:56ait pu produire
01:15:56des lésions typiques
01:15:57d'un comportement
01:15:59de défense.
01:16:00Pour lui,
01:16:00ça ne tient pas debout.
01:16:01La version de Laurent Ségala
01:16:02n'est pas cohérente.
01:16:04Au final,
01:16:05il confirme
01:16:06les conclusions
01:16:06du premier rapport
01:16:07et lui parle
01:16:09d'un meurtre.
01:16:10Clairement.
01:16:11Donc,
01:16:11retour à la case départ.
01:16:13Alors,
01:16:13pas vraiment
01:16:13parce que la défense
01:16:15ne va pas s'arrêter là.
01:16:17La défense
01:16:17va commettre
01:16:18un quatrième expert
01:16:19mais qui,
01:16:20cette fois-ci,
01:16:21ne sera pas un légiste.
01:16:22C'est une expertise
01:16:23qui va être menée
01:16:24par un gastro-entérologue
01:16:26de renom,
01:16:26mondialement reconnu,
01:16:28qui s'appelle
01:16:28le professeur Frid.
01:16:29Et qu'est-ce que va faire
01:16:30le professeur Frid
01:16:31pour travailler ?
01:16:32Eh bien,
01:16:32il va contacter
01:16:33le médecin traitant
01:16:34de Mme Ségala.
01:16:35Il va lui demander
01:16:36si elle prend des médicaments,
01:16:38si elle suit un traitement,
01:16:40est-ce qu'elle avait
01:16:40des problèmes de santé ?
01:16:42Et à partir de là,
01:16:43eh bien,
01:16:44le professeur Frid
01:16:45va affirmer
01:16:46qu'il dispose
01:16:47de suffisamment d'éléments
01:16:48pour être certain
01:16:50qu'un événement
01:16:51traumatisant
01:16:53a stoppé
01:16:54la digestion
01:16:55de Mme Ségala,
01:16:57écoutez bien Frédéric,
01:16:58avant 18h.
01:16:59Et ça,
01:17:00ça change tout.
01:17:01Parce que si c'est avant 18h,
01:17:03forcément,
01:17:04Laurent Ségala
01:17:04est innocent
01:17:05puisqu'il n'arrive
01:17:05à la maison
01:17:06qu'à 19h15.
01:17:13Après deux ans
01:17:14et demi d'instructions
01:17:15et quatre expertises
01:17:16médico-judiciaires,
01:17:18le procès
01:17:18de Laurent Ségala
01:17:19s'ouvre
01:17:20le 23 mai 2012
01:17:22à Renan,
01:17:23en Suisse.
01:17:23Laurent Ségala
01:17:30a-t-il
01:17:30sauvagement
01:17:31tué sa belle-mère ?
01:17:33Les cinq juges
01:17:34du tribunal
01:17:34ont un peu plus
01:17:35d'une semaine
01:17:36pour décider
01:17:37du sort
01:17:37du généticien.
01:17:39Dès l'ouverture
01:17:40du procès,
01:17:41le président
01:17:41se montre
01:17:42très direct.
01:17:44Le président
01:17:45interpelle
01:17:45dans les premières
01:17:47minutes
01:17:47de l'audience
01:17:48M. Ségala
01:17:49et il lui dit
01:17:51presque
01:17:51« Avouez,
01:17:52dites-nous
01:17:53que c'est vous
01:17:53pour qu'on puisse
01:17:53juger de cette affaire. »
01:17:57Mon impression,
01:17:58c'est qu'il doit
01:17:59être coupable
01:18:00parce qu'attaquer
01:18:01comme ça
01:18:02sans avoir
01:18:02du biscuit
01:18:03derrière,
01:18:04ce n'est pas possible.
01:18:04Ça donne
01:18:05cette impression
01:18:05en tout cas.
01:18:08Ça en dit long
01:18:09sur la première
01:18:12impression
01:18:13en tout cas
01:18:13de ces juges.
01:18:18Les juges
01:18:19comme les journalistes
01:18:20plongent d'emblée
01:18:21au cœur
01:18:21de l'affaire.
01:18:23Le film
01:18:23de la reconstitution
01:18:24est diffusé
01:18:25dans son intégralité.
01:18:29Ils refusent
01:18:30de faire
01:18:30certaines choses.
01:18:31Il est très théâtral
01:18:33dans leur constitution.
01:18:34Chaque fois
01:18:34qu'il y a une question
01:18:35qui le dérange,
01:18:36il trouve toujours
01:18:37une astuce
01:18:37pour envoyer la balle.
01:18:40Il n'est pas mauvais,
01:18:41il est très mauvais.
01:18:46Dans la salle,
01:18:47silence total,
01:18:48silence de plomb.
01:18:49on se regarde
01:18:50les uns et les autres
01:18:51et en tout cas
01:18:52pour moi,
01:18:53tout le monde se dit
01:18:53qu'il est coupable,
01:18:54qu'il est cuit.
01:18:57Laurent Ségala
01:18:58passe mal à l'écran,
01:18:59c'est une évidence.
01:19:00Fera-t-il mieux
01:19:01face au juge ?
01:19:03Le tribunal
01:19:03l'interroge longuement
01:19:04sur cette soirée
01:19:05du 9 janvier 2010.
01:19:07C'est le moment
01:19:08pour lui
01:19:08de convaincre.
01:19:11Il est prostré
01:19:12sur sa chaise,
01:19:13il gémit,
01:19:15il a une petite voix.
01:19:16on ne le sent pas,
01:19:18il est fuyant.
01:19:21C'est là
01:19:22qu'il doit faire
01:19:22la différence
01:19:23et dire
01:19:23« je suis innocent,
01:19:24voilà pourquoi ».
01:19:25C'est là
01:19:25qu'il doit clamer,
01:19:26hurler,
01:19:27ça doit sortir
01:19:29du fond de ses tripes.
01:19:30Nous, journalistes,
01:19:31on imagine ça.
01:19:34On est une espèce
01:19:35de poule mouillée
01:19:35qui dit « je ne l'ai pas fait »
01:19:36puis il ne se souvient plus,
01:19:37puis on lui pose
01:19:38une question précise
01:19:38puis il répond parfois
01:19:40de manière un peu scientifique
01:19:41même à la droite.
01:19:42On se dit
01:19:43« c'est ça,
01:19:43le grand généticien
01:19:45du CNRS ».
01:19:47C'est pas réaliste
01:19:51de dire
01:19:51« vous n'êtes pas défendu,
01:19:52vous n'étiez pas assez véhément,
01:19:56vous n'étiez pas... »
01:19:57Vous ne pouvez pas imaginer
01:19:59comme vous souffrez.
01:20:00Vous souffrez
01:20:01parce qu'il y a
01:20:04toute cette pression,
01:20:05parce que depuis deux ans et demi
01:20:06vous êtes en prison
01:20:07et que vous êtes quand même
01:20:08bien affaibli par la prison.
01:20:09Quand vous êtes incarcéré
01:20:10aussi longtemps,
01:20:12vous perdez un peu
01:20:13de votre allure.
01:20:17Le procès a mal commencé
01:20:20pour Laurent Ségala
01:20:21et la deuxième journée
01:20:22s'annonce elle aussi difficile
01:20:24avec l'audition
01:20:26de la spécialiste
01:20:27des traces de sang.
01:20:28Mais Linda Zing
01:20:29explique que les projections
01:20:31retrouvées sur le col
01:20:32de la chemise
01:20:32ne peuvent avoir été provoquées
01:20:34que par un coup violent
01:20:35porté à Catherine Ségala.
01:20:38La défense s'insurge.
01:20:41Comment être sûr
01:20:41à 100% que ces tâches
01:20:43n'ont pas été faites
01:20:44lors du transport
01:20:45ou du nettoyage ?
01:20:47Après cette question,
01:20:48la policière est moins formelle.
01:20:51Qu'est-ce qui s'est passé ?
01:20:52La policière
01:20:53qui avait rédigé
01:20:54ce document
01:20:54a dit que
01:20:55finalement elle ne pouvait
01:20:56pas exclure
01:20:56que cette micro-gouttelette
01:20:57soit arrivée
01:20:58quand j'ai manipulé
01:20:59la serpillière
01:20:59pour nettoyer.
01:21:00Ça change tout.
01:21:01Ça change tout.
01:21:05La défense
01:21:06marque un point.
01:21:08Viennent ensuite
01:21:08les experts légistes.
01:21:10D'un côté
01:21:11les tenants
01:21:11de la thèse criminelle,
01:21:13de l'autre
01:21:13Dominique Lecomte
01:21:15qui soutient
01:21:16l'hypothèse
01:21:16de l'accident.
01:21:18Le président
01:21:19est intrigué
01:21:19par cette histoire
01:21:20de marche cassée.
01:21:22Il demande
01:21:22que la brèche
01:21:23soit mesurée.
01:21:25On s'est rendu compte
01:21:26qu'il y avait
01:21:27deux points d'impact
01:21:28et que ces points d'impact
01:21:29correspondaient
01:21:30exactement
01:21:31aux deux trous
01:21:32de la lésion
01:21:33à l'arrière du crâne
01:21:34de Catherine Ségala.
01:21:35Une nouvelle victoire
01:21:38pour la défense.
01:21:39Mais Dominique Lecomte
01:21:40est alors
01:21:41violemment
01:21:42prise à partie
01:21:42par le procureur
01:21:43qui l'accuse
01:21:44d'avoir été acheté
01:21:45par la défense.
01:21:47Combien avez-vous
01:21:48touché,
01:21:48Madame Lecomte,
01:21:49pour faire cette expertise ?
01:21:51C'est que ça a commencé
01:21:52à partir un peu
01:21:52en cacahuètes.
01:21:53Il y a eu
01:21:53une certaine gêne.
01:21:57Madame Lecomte
01:21:58a terminé
01:21:59sa déposition,
01:22:00sa réponse
01:22:00à des questions
01:22:01dans une atmosphère
01:22:01extrêmement hostile.
01:22:04Elle en avait pris
01:22:04entre guillemets
01:22:05plein la figure.
01:22:08L'expertise Lecomte
01:22:09ne sera pas retenue
01:22:11par le tribunal.
01:22:12Mais la défense
01:22:13a encore
01:22:14une autre carte à jouer.
01:22:15L'expertise Frid.
01:22:17Ce gastro-entérologue
01:22:18et formel
01:22:19a un choc violent
01:22:20à stopper
01:22:21le transit
01:22:21de la victime
01:22:22avant 18h,
01:22:23qu'il s'agisse
01:22:24d'une chute
01:22:24ou d'un meurtre.
01:22:27À 18h,
01:22:28Laurence Ségala
01:22:29ne pouvait pas être là.
01:22:32Maître Portejoie
01:22:33à l'issue des débats,
01:22:34le procureur général
01:22:35requiert
01:22:3616 ans
01:22:37de détention,
01:22:3816 ans de prison.
01:22:40C'est à votre tour
01:22:40de plaider.
01:22:41Que dites-vous ?
01:22:42Nous étions
01:22:42trois avocats
01:22:43et nous décidons
01:22:44au dernier moment
01:22:45d'ailleurs,
01:22:46je devais plaider
01:22:46le dernier,
01:22:48mais au dernier moment
01:22:48je décide de plaider
01:22:49entre les deux avocats
01:22:50suisses
01:22:50pour des raisons
01:22:51qui relèvent
01:22:52de la susceptibilité
01:22:53suisse.
01:22:54Donc je plaide
01:22:55de numéro 2
01:22:56et là je plaide...
01:22:57Il ne faut pas que la parole
01:22:58revienne en dernier
01:22:59à un français,
01:23:00c'est ça ?
01:23:00Absolument.
01:23:01Je plaide en disant
01:23:01tout simplement,
01:23:02attendez,
01:23:03vous connaissez
01:23:03beaucoup de crimes
01:23:04où il n'y a pas
01:23:04de mobile ?
01:23:06Ça n'existe pas
01:23:06un crime sans mobile.
01:23:08Pas l'arme de crime,
01:23:09pas de témoin,
01:23:10pas d'aveu.
01:23:11Donc je dis,
01:23:12vous n'avez rien,
01:23:13vous n'avez rien
01:23:14pour condamner
01:23:14cet homme-là
01:23:15qui est innocent
01:23:16et vous avez commis
01:23:17une seule erreur,
01:23:18c'est de concentrer
01:23:19votre énergie,
01:23:21votre tir
01:23:22uniquement sur lui.
01:23:24Et puis...
01:23:24Vous plaidez le doute
01:23:25alors ?
01:23:25Je plaide le doute
01:23:26au début
01:23:27et puis après
01:23:27je plaide les certitudes
01:23:28parce que nous avions
01:23:30dans ce dossier
01:23:30des certitudes.
01:23:32Moi ce que je voulais
01:23:32c'est que cet homme
01:23:33soit acquitté
01:23:34non pas au bénéfice
01:23:35du doute
01:23:36mais au bénéfice
01:23:37de certitudes
01:23:37puisque nous apportions
01:23:39une preuve scientifique
01:23:40de l'impossibilité
01:23:42dans laquelle il se trouvait
01:23:43d'être là
01:23:44au moment des faits.
01:23:45Et donc vous avez
01:23:46été entendu ?
01:23:47Et nous avons été
01:23:47entendu le...
01:23:49Le verdict ?
01:23:50Le verdict acquitté.
01:23:52Ils ne disent pas
01:23:53quitter en Suisse,
01:23:53ils disent relaxer.
01:23:56La libération
01:23:57pour la défense
01:23:58et les proches
01:23:58de Laurent Ségala
01:23:59des proches
01:24:00qui espéraient
01:24:01ce verdict bien sûr.
01:24:02On était tellement surpris
01:24:04et soulagés
01:24:05et soulagés
01:24:06parce que c'était vraiment...
01:24:07Non, c'était un grand bonheur.
01:24:09Laurent Ségala
01:24:10va quitter le pénitencier
01:24:11libre
01:24:12après l'incroyable coup de théâtre
01:24:14dans l'après-midi
01:24:15auquel lui-même
01:24:16ne croyait plus.
01:24:20Oui, c'est évidemment
01:24:20une immense libération.
01:24:24Enfin, vous avez
01:24:24les nerfs qui craquent
01:24:25parce que c'est tellement
01:24:26de tensions accumulées
01:24:27pendant deux ans et demi
01:24:28qui se libèrent là.
01:24:30Mais évidemment,
01:24:30c'était...
01:24:31C'était...
01:24:34Mais c'est tellement violent
01:24:36que je n'en garde pas
01:24:37spécialement un bon souvenir.
01:24:40Le répit sera
01:24:41de courte durée.
01:24:42Le parquet fait appel
01:24:43et Laurent Ségala
01:24:45se retrouve face
01:24:46à la justice suisse
01:24:47cinq mois plus tard.
01:24:48Cette fois,
01:24:49il compare libre.
01:24:50Le généticien français
01:24:51joue la carte du sourire
01:24:53et de la décontraction.
01:24:54Le parquet a choisi
01:24:55un procès court.
01:24:57Les trois juges
01:24:58ont étudié
01:24:58le dossier sur papier.
01:25:00Ils n'entendront
01:25:01aucun témoin.
01:25:02Cet appel
01:25:03se pratique
01:25:04sans aucune
01:25:06mesure d'instruction,
01:25:07c'est-à-dire
01:25:08sans véritable audience.
01:25:09Donc, c'est dire
01:25:10que le procès,
01:25:11ça n'a que le nom.
01:25:12Il m'a posé
01:25:13quatre questions.
01:25:14Est-ce que vous avez
01:25:15repris votre travail ?
01:25:16Est-ce que vous habitez
01:25:16toujours à la même adresse ?
01:25:18Combien vous gagnez par mois ?
01:25:19Est-ce que votre situation
01:25:19de famille a changé ?
01:25:21Vous n'avez rien d'autre
01:25:22à ajouter ?
01:25:23Non, merci.
01:25:24Et puis, c'était fini.
01:25:25En quatre heures chrono,
01:25:26c'était fini.
01:25:28Le procureur requiert
01:25:29comme en première instance
01:25:3016 ans de prison.
01:25:31Le verdict est attendu
01:25:33pour le lendemain.
01:25:34Monsieur Ségala,
01:25:35est-ce que vous viendrez demain ?
01:25:37Avec ou sans
01:25:39Laurent Ségala ?
01:25:40C'est la question
01:25:41que tout le monde se pose.
01:25:44Alors, monsieur le procureur,
01:25:46il est venu
01:25:46ou il n'est pas venu
01:25:47Laurent Ségala
01:25:48à l'énoncer de son verdict ?
01:25:49Alors, Laurent Ségala
01:25:50n'est pas venu
01:25:51à l'énoncer du verdict
01:25:53de la Cour d'appel.
01:25:55Je pourrais l'interpréter
01:25:56comme une sorte d'aveu,
01:25:57mais ce serait extrapolé.
01:26:00Je pense que s'il n'est pas venu,
01:26:01il avait, lui,
01:26:02de bonnes raisons
01:26:03de savoir pourquoi
01:26:04il ne venait pas,
01:26:04c'est-à-dire que lui-même
01:26:05considérait
01:26:06que le risque
01:26:07qu'il soit condamné
01:26:07était important.
01:26:08Quel est le verdict ?
01:26:09La Cour d'appel
01:26:10va reconnaître
01:26:11la culpabilité
01:26:12de Laurent Ségala,
01:26:13retenir à son encontre
01:26:15le meurtre
01:26:15et le condamner
01:26:16à une peine
01:26:16de 16 ans de prison.
01:26:18Laurent Ségala
01:26:19ne s'est pas rendu
01:26:20à la justice
01:26:20après le verdict
01:26:21et il s'est pourvu
01:26:23en cassation.
01:26:24Exact.
01:26:25Et c'est lui
01:26:25qui va saisir
01:26:26le tribunal fédéral
01:26:27qui est l'instance
01:26:28suprême en Suisse,
01:26:28l'équivalent
01:26:29de votre Cour de cassation,
01:26:31après avoir,
01:26:32dans un premier temps,
01:26:33annulé le verdict
01:26:34sur la peine,
01:26:36en considérant
01:26:36que 16 ans
01:26:37c'était trop sévère.
01:26:38Une nouvelle peine
01:26:39sera fixée
01:26:40il y a 14 ans.
01:26:41L'affaire remontera
01:26:42par un recours
01:26:43de Laurent Ségala
01:26:44devant le tribunal fédéral
01:26:45qui cette fois-ci
01:26:46enterrinera
01:26:47le jugement
01:26:48de la Cour d'appel
01:26:48et à partir de là
01:26:50ces 14 ans
01:26:50seront exécutoires
01:26:52et par conséquent
01:26:53un mandat d'arrêt
01:26:54international
01:26:54sera délivré
01:26:56concernant M. Ségala.
01:26:57Et la France
01:26:58l'extrade ou pas ?
01:26:59La France,
01:27:00comme la plupart
01:27:01des pays
01:27:01qui partagent
01:27:02notre culture juridique,
01:27:05n'extrade pas
01:27:06ses nationaux,
01:27:07ses ressortissants.
01:27:08La Suisse
01:27:08va tenter autre chose.
01:27:10Elle va s'appuyer
01:27:10sur des accords
01:27:11internationaux
01:27:12pour demander
01:27:13à la France
01:27:13d'exécuter en France
01:27:15le jugement suisse.
01:27:17La France
01:27:17va répondre
01:27:18par la négative.
01:27:19Le ministère
01:27:19de la Justice français
01:27:20considère de son côté
01:27:22que les conditions
01:27:23prévues par ces accords
01:27:24ne sont pas remplies.
01:27:25Ça veut dire
01:27:25qu'il est sorti d'affaires,
01:27:27Laurent Ségala ?
01:27:27Il est sorti d'affaires
01:27:28si on parle simplement
01:27:30de rester en liberté
01:27:31tant qu'il reste en France.
01:27:32Au moment où
01:27:33il prendrait le risque
01:27:34d'aller à l'étranger,
01:27:36le mandat d'arrêt international
01:27:37délivré par les autorités
01:27:39suisses
01:27:39est applicable
01:27:39et si à ce moment-là
01:27:41il se fait arrêter,
01:27:43évidemment qu'il devra
01:27:43exécuter la sanction.
01:27:44Maître Portejoie,
01:27:52aujourd'hui votre client
01:27:53est en cavale.
01:27:54Est-ce qu'il a l'intention
01:27:55de se rendre un jour ?
01:27:57Il a l'intention
01:27:58de se rendre
01:27:59à la justice française.
01:28:00Mais là je sais
01:28:01qu'en Suisse
01:28:02on s'agit un peu
01:28:03pour qu'un nouveau procès
01:28:05soit organisé
01:28:06sur le territoire
01:28:06en France.
01:28:08Et moi j'y suis
01:28:09assez favorable.
01:28:10Je pense que
01:28:11c'est une très bonne idée
01:28:12que nous ayons
01:28:14un nouveau procès
01:28:15qui puisse se dérouler
01:28:16dans des conditions dignes
01:28:17comme l'ont été
01:28:20les journées
01:28:22de première instance
01:28:23en Suisse
01:28:24et je suis convaincu
01:28:25qu'à l'issue
01:28:25d'un procès
01:28:26de cette nature
01:28:27Laurent Ségala
01:28:28sera à nouveau acquitté.
01:28:29Donc je baisserai,
01:28:32nous ne baisserons
01:28:33jamais les bras.
01:28:33Laurent Ségala
01:28:40a fait appel
01:28:41de sa condamnation
01:28:42devant la Cour Européenne
01:28:43des Droits de l'Homme
01:28:43sans succès.
01:28:45La justice suisse
01:28:46attend qu'il exécute sa peine.
01:28:49Le délai de prescription
01:28:50est de 30 ans.