Entre 2003 et 2006, cette bande de malfaiteurs a attaqué des banques et des convoyeurs de fonds dans les régions Rhône-Alpes et Poitou-Charentes. Laurent Cocogne et Serge Quemin, deux beaux-frères, et leurs complices ont mis au point une recette astucieuse pour éviter que les billets soient maculés d'encre, ce qui leur a valu le surnom de "souris vertes". Acrobates, intelligents et non-violents, ces braqueurs sont arrêtés le 30 mars 2006 après une course poursuite avec les gendarmes dans les environs de Lyon. En janvier 2010, leur procès se tient devant la cour d'assises du Rhône.
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00:00:00Bonjour, c'est Dominique Rizet, dans ce podcast, nous allons vous raconter, Frédéric Lantieri
00:00:12et moi, l'histoire du gang des souris vertes, un épisode de Faites entrer l'accusé, écrit
00:00:18par Imane Guali et réalisé par Bernard Faron. Bonne écoute.
00:00:22Laurent Cocogne et Serge Kemin, deux beaux frères soudés, les cerveaux d'un gang qu'on
00:00:43a appelé les souris vertes. Bosseurs, ingénieux, avec leurs complices, ils ont découvert la recette
00:00:49que tous les braqueurs rêvent un jour de mettre au point. Une recette qui sonne comme une comptine,
00:00:54trempez-la dans l'huile, trempez-la dans l'eau, ça fera un magot tout chaud. Avec cette méthode,
00:01:00ils ont déjoué les pièges de malettes inviolables, celles que les banques utilisent
00:01:05pour transporter leurs billets. Ça a duré trois ans, mais à trop jouer avec la chance,
00:01:10elle finit par tourner. Aérodrome de Bron, près de Lyon. Les gendarmes s'en souviennent encore de
00:01:24ce 30 mars 2006. Lieutenant-colonel Eric Espinal, pilote d'alerte de l'hélicoptère de la gendarmerie
00:01:30de Lyon. On apprend qu'un vol à main armée vient d'avoir lieu sur la commune de la Verpillière.
00:01:34Une prise d'otages est présentement en cours. Nous décollons donc pour retrouver cette voiture
00:01:40dans le secteur de la Verpillière. La Verpillière dans l'Isère. Un fourgon a été attaqué, le plan
00:01:46Milan vient d'être déclenché. Au sol, la 807 des braqueurs est prise en chasse. Les gendarmes
00:01:54traquent un gang hyper organisé qui sévit depuis des mois dans la région. Cette fois,
00:02:00pas question de laisser filer. Après sept kilomètres de course aux poursuites, la voiture
00:02:05s'arrête. Des coups de feu claquent, un homme tombe. C'est la fin d'une équipe de braqueurs
00:02:18au palmarès hallucinant. Un palmarès qui commence trois ans plus tôt, retour sur un parcours hors du
00:02:25commun. 3 avril 2003, il est 8h20 quand le directeur de la banque populaire de Chabeuy
00:02:35arrive avec deux de ses employés. Comme chaque matin, il commence par déverrouiller l'alarme.
00:02:41Mais là, surprise, ils ne sont pas seuls, il y a déjà du monde dans la banque. Adjudant chef
00:02:47Manuel Noguera, section de recherche de Grenoble. Là, il se trouve immédiatement confronté à deux
00:02:53individus, déjà présents dans l'agence, deux individus cagoulés, armés, qui bien sûr les
00:03:00neutralisent immédiatement. Adjudant chef Frédéric Arriva, directeur d'enquête, section
00:03:05de recherche de Grenoble. Les braqueurs mettent tout de suite la pression en disant, si quelqu'un
00:03:11bouge, vous allez avoir du sang. Les malfaiteurs connaissent parfaitement le nombre d'employés
00:03:15présents dans la banque puisque, après avoir maîtrisé les trois premiers arrivants, ils décident
00:03:20d'attendre la quatrième employée, qui est une femme donc, et qui arrive quelques instants plus tard
00:03:26et qui est également maîtrisée à son tour. Mais un client se présente. Sans perdre leur sang-froid,
00:03:32les braqueurs ordonnent à l'un des employés de le rembarrer, tandis qu'ils gardent ses collègues
00:03:36en otage. Et comme ils ne veulent plus être dérangés... Ils leur demandent de baisser les
00:03:44stores et également d'imposer une affichette sur la porte d'entrée dans laquelle ils précisent que
00:03:51la banque n'ouvrira qu'à 9h. À 8h35, la banque est sous contrôle. Les braqueurs se séparent. L'un va
00:03:59au coffre avec une partie des employés, l'autre s'occupe du distributeur automatique de billets.
00:04:04Un agent de la banque est laissé à l'accueil, pour sourire et répondre au téléphone.
00:04:12On sent clairement dans l'attitude des braqueurs, dans le sang-froid qu'il a fallu, au moment
00:04:17proprement dit du braquage, qu'on n'est pas en face, entre guillemets, de gamins,
00:04:21mais bien en face de gens chevronnés, qui ont une certaine expérience derrière eux.
00:04:25Ils sont extrêmement professionnels et communiquent par un système d'oreillettes, on ne sait pas à
00:04:33l'instant si ce sont des téléphones ou des radios, avec quelqu'un qui visiblement est à
00:04:37l'extérieur. Le chef de cette équipe va informer la personne qui elle est à l'extérieur que le
00:04:43travail a commencé, que ça fait cinq minutes, que le coffre va s'ouvrir et qu'ils vont pouvoir
00:04:48sortir. En moins de quinze minutes, l'opération est pliée. Ils vont réussir à aller au but,
00:04:58c'est-à-dire qu'ils vont récupérer l'argent du coffre, près de 33 000 euros. Une belle opération
00:05:02menée de main de maître. Avant leur départ, les malfaiteurs prennent soin d'emmener tout le
00:05:11personnel dans la salle des coffres, éligotent tout le monde avec du scotch et ils quittent les
00:05:20lieux en passant par une petite fenêtre qui se trouve dans la petite salle qui donne accès
00:05:25au distributeur automatique de billets. Dernière précaution avant de partir, les braqueurs embarquent
00:05:31le système de vidéosurveillance. À 8h59, les employés réussissent à se détacher. Ils déclenchent
00:05:38l'alarme hold-up et quelques minutes plus tard, les gendarmes sont sur place. Ils n'ont plus qu'à
00:05:44faire les constatations. A première vue, la banque ne montre aucune trace d'effraction. Alors, par où
00:05:51les braqueurs ont-ils bien pu passer ? Les malfaiteurs sont entrés par les toits en enlevant
00:05:57quelques tuiles. Ils ont fait une découpe dans la soiture, ont pénétré dans les combles et là,
00:06:05ils ont également fait une ouverture dans le plafond en prenant soin de placer des vis afin
00:06:13d'éviter, lors de la découpe, que cette partie ne tombe et ne déclenche l'alarme volumétrique de
00:06:18la banque. Dernière étape, fixer la corde qui permet aux braqueurs de se glisser dans la banque.
00:06:29Il est clair pour nous qu'on a affaire à une équipe qui sort du lot. On sent que derrière,
00:06:33il y a une grosse, grosse préparation et qu'on a affaire à une équipe qui est
00:06:36soudée et qui ne travaille pas comme ça du jour au lendemain avec Pierre, Paul ou Jacques.
00:06:40Colonel Tabel, à l'époque, vous êtes à la tête de la section de recherche de Grenoble. Les
00:06:50employés de la banque ont-ils pu vous donner un signalement précis des braqueurs ? L'un
00:06:54mesurait à peu près 1m80. Il avait les yeux bleus. L'autre, 1m70, les yeux marrons. Ils sont
00:07:03tous les deux vêtus de combinaisons de travail de couleur bleue, de cagoule et ils portent des gants.
00:07:10Comment les braqueurs ont-ils fait pour ne pas déclencher l'alarme en sautant du plafond dans
00:07:14la banque ? Ils minutaient leur coup. C'est-à-dire qu'une fois qu'ils étaient dans le plafond de la
00:07:21banque, qu'ils avaient découpé d'ailleurs, ils avaient quelques secondes pour laisser rentrer
00:07:27les employés et les laisser déconnecter l'alarme. Et à ce moment-là, dès que l'alarme était
00:07:33déconnectée, ils jaillissaient depuis le plafond. Un braquage par les toits en bleu de travail,
00:07:39c'est la première fois que vous êtes confronté à ce genre d'exercice ? Oui. De mémoire, la section
00:07:46de recherche de Grenoble n'avait pas été confrontée à de tels braquages. Cependant, notre service
00:07:54national de rapprochement, le STRJD, une fois qu'on les a interrogés, nous ont signalé plusieurs faits
00:08:01qui ressemblaient, dans le mode opératoire, à ce type de braquage. Alors, on les appelait les
00:08:05mécanos. Je pense que c'était lié à la fois au mode opératoire, parce qu'ils effectuaient quand
00:08:11même un travail de préparation assez important. Il fallait découper le toit, il fallait de l'outillage
00:08:19et puis surtout, ils avaient les conditions des bleus de travail, ce qui nous a évidemment conduit
00:08:24à les désigner sous le sous le vocable des mécanos. Et donc, votre service a réussi à
00:08:29identifier combien d'autres affaires ? Alors, au total, onze affaires ont été recensées par la
00:08:35police nationale, en zone de police nationale, trois par la gendarmerie, donc au total 14.
00:08:4014 affaires attribuées à l'équipe des mécanos. Les gendarmes recueillent tout de suite un
00:08:47témoignage, celui d'un policier municipal qui passait devant la banque au moment du braquage.
00:08:52Adjudant-chef Manuel Noguera, section de recherche de Grenoble.
00:08:57Je remarque une 406 arrêtée, moteur tournant, avec un homme, nous décrira-t-il d'une cinquantaine
00:09:06d'années, barbe courte, poivre et sel, porteur d'une casquette. Intrigué, donc, il décide d'aller
00:09:15relever le numéro de ce véhicule et c'est au même moment qu'il voit deux individus porteurs
00:09:22d'une unité centrale rentrer à l'intérieur de cette voiture, qui quitte les lieux précipitamment.
00:09:27Le policier n'a eu le temps de relever qu'une partie de la plaque d'immatriculation,
00:09:33XN69. Mais pas besoin de chercher la 406 bien longtemps. Le lendemain soir,
00:09:41elle est retrouvée sur un chemin à quelques kilomètres de là. C'est une voiture volée
00:09:46depuis plusieurs semaines. Adjudant-chef Frédéric Arriva, directeur d'enquête,
00:09:51section de recherche de Grenoble. Les constatations autour de cette voiture vont nous permettre
00:09:55clairement de faire le lien avec le braquage de Chabeuil, puisque nous allons retrouver une
00:10:00corde en nylon qui est du même type que celle qui est attachée à l'intérieur de la banque,
00:10:04qui l'aura permis de descendre. Deux jours plus tard, le 6 avril, un promeneur fait une
00:10:11découverte encore plus intéressante. Tout près de l'endroit où la 406 a été abandonnée.
00:10:17Un promeneur découvre un pistolet automatique CZ, arme qu'il nous rapportera à la brigade.
00:10:23Cette arme est d'origine tchécoslovaque. Le chargeur contient 15 cartouches. Il est
00:10:30graillé au maximum. Cette arme, bien sûr, pour nous est un élément crucial de l'enquête. On
00:10:35se dit qu'une arme portant un numéro de série, on va pouvoir remonter son détenteur,
00:10:41éventuellement remonter sur un vol. On s'aperçoit malheureusement que c'est une arme qui a été vendue
00:10:45en Suisse et nos investigations vont s'arrêter ici. On est donc encore en face de quelque chose
00:10:51de bien prévu où on ne peut pas remonter l'arme. Les gendarmes font le tour du voisinage. La 406 a
00:10:58été vue plusieurs fois dans le coin ces 15 derniers jours. Au volant, une femme.
00:11:07La description qui nous est faite de la femme qui était au volant de cette 406 bleue nous est
00:11:13faite par l'artisan qui travaille sur le chantier, qui juste la banque, qui a vu donc cette conductrice
00:11:20à plusieurs reprises et qui nous la décrira comme ressemblant à Cléopâtre, ayant une coupe de
00:11:26cheveux à la Cléopâtre et la trouvant même mignonne. On décide très rapidement, au-delà du
00:11:32voisinage, de faire des vérifications dans les hôtels légides du secteur pour justement,
00:11:38au vu des éléments, donc un individu cheveux poivréssel, une femme avec une coupe au carré,
00:11:43voir si toutefois des gens auraient pu loger quelqu'un qui puisse correspondre. Mais personne
00:11:50n'a vu Cléopâtre, ni l'homme à la casquette. Les gendarmes n'abandonnent pas pour autant. Ils
00:11:55interrogent les compagnies d'autoroutes, saisissent des milliers de tickets de péage, vérifient des
00:12:00centaines de photos. Mais pas de chance, la 406 n'a pas été flashée. Alors, ils reviennent à la
00:12:12banque. Les braqueurs ont particulièrement bien préparé leur coup, comme s'ils connaissaient
00:12:17l'agence dans ses moindres recoins. C'est peut-être une piste. On va donc vérifier toutes les ouvertures
00:12:22de comptes qui pourraient être de fausses ouvertures de comptes avec de fausses identités,
00:12:27leur permettant justement d'avoir un contact et de regarder où est le dispositif de surveillance
00:12:30et comment fonctionne la banque. Mais là aussi, les enquêteurs font chou blanc. Aucun compte
00:12:38suspect. Ils tentent autre chose. Dans les détails, on va remarquer que les braqueurs
00:12:47descendent du plafond avec une grande aisance. Donc, ayant des capacités physiques certaines,
00:12:52on va donc s'intéresser, pourquoi pas, à des gens du cirque. Voilà, à cette époque-là,
00:12:58on a un cirque qui est non loin à quelques kilomètres. Malheureusement, cette piste ne
00:13:03va rien donner. Reste une piste à explorer, la seule erreur commise par les braqueurs. Une
00:13:11petite trace sur le ruban adhésif qui a servi à ligoter les employés. L'exploitation des
00:13:16scellés par le laboratoire va mettre en évidence une empreinte qui, tout de suite, va nous donner
00:13:23l'espoir de tomber en face de quelqu'un qui serait connu au fichier des empreintes. L'empreinte est
00:13:31comparée à des centaines de milliers d'autres. L'espoir renaît. Mais deux mois plus tard,
00:13:37le résultat tombe. Elle est inconnue du fichier. Cette fois, les gendarmes sont dans l'impasse
00:13:43et la bande des mécanos court toujours. Colonel Tabel, un mois plus tard, la bande des mécanos
00:13:50remet ça. Le 12 mai 2003, à Choré, dans l'Aie-de-Sèvres. Un convoyeur chargé d'alimenter
00:13:58un distributeur de billets se présente dans un petit supermarché casino. Il s'introduit dans
00:14:04le local qui permet l'alimentation du distributeur. Et au moment où il débute son travail d'alimentation,
00:14:14surgit donc du plafond un individu vêtu d'une combinaison bleue, cagoulé, et qui agresse donc
00:14:23le convoyeur. Il se défend quand il voit un second individu descendre du plafond. Et là,
00:14:31il se couche au sol, il est ligoté, il est baïonné. Tandis que les deux braqueurs récupèrent les
00:14:41billets qui se trouvent dans les sacs et les billets qui se trouvent dans le distributeur.
00:14:44Et ils en portent combien ? Ils en portent 107 000 euros, donc un préjudice important.
00:14:50À ce moment-là, vous avez des informations pour permettre de les identifier ?
00:14:55Toujours la même chose, pas d'éléments de matériel, pas de traces ADN, pas d'empreintes
00:15:00digitales, pas de traces téléphoniques. On n'arrive pas à identifier de téléphones
00:15:07intéressants pour l'enquête. Donc, au niveau des indices, rien.
00:15:11Les gendarmes en sont là à traquer les mécanos, mais les braqueurs changent de méthode.
00:15:21Il est 13h20, ce jeudi 3 juillet, quand deux convoyeurs se gardent devant le crédit
00:15:33agricole de Saint-Jus d'Ardèche. Adjudant-chef Frédéric Arriva,
00:15:38directeur d'enquête, section de recherche de Grenoble.
00:15:41Ces convoyeurs ont la particularité d'être en civil, puisqu'on n'a pas affaire à un transport
00:15:46de fond dit armé, mais à un transport de fond de malette. Malette qui comporte un grand nombre
00:15:52de sécurité. Tout à coup, deux hommes cagoulés et armés surgissent. Le premier pousse les
00:16:01convoyeurs dans le fourgon où il grimpe avec eux. Son complice prend le volant. Et tout de suite,
00:16:07ils ordonnent aux convoyeurs de sortir les malettes blindées, sans savoir que c'est
00:16:12impossible en une seule fois. Les braqueurs ne semblent pas être au courant du système.
00:16:20Ils ne savent pas qu'il y a une temporisation et ne sont pas très bien renseignés sur le fait
00:16:25qu'ils ne peuvent pas tirer grand chose de ces malettes. Les braqueurs sont obligés d'attendre.
00:16:30Les valises sont connectées à un système informatique qui prévoit un délai de cinq minutes entre chaque
00:16:35extraction. C'est ce qu'on appelle la fameuse temporisation. Pour patienter tranquillement,
00:16:41ils vont se mettre à l'abri. Et 15 minutes plus tard, trois valises sont déjà libérées. Un troisième
00:16:50braqueur débarque et les emporte. Son complice, lui, saisit du ruban adhésif et du fil électrique.
00:17:01Avant de quitter les lieux, pour assurer quand même leur fuite, ils vont neutraliser les
00:17:05convoyeurs. Et pour éviter que les intéressés ne téléphonent, ils vont emmener le sac de l'un d'eux.
00:17:10Quand les convoyeurs réussissent à se détacher et à donner l'alerte, ils n'ont pas grand chose
00:17:17à raconter aux gendarmes. Les braqueurs étaient cagoulés, difficile de les décrire. L'un d'eux
00:17:22avait l'accent maghrébin. C'est maigre comme renseignement. Mais cette fois-ci, les gendarmes
00:17:29ont une piste du côté de la banque. L'exploitation du système de surveillance vidéo de la banque va
00:17:40montrer une petite séquence du vol avec arme au moment où les convoyeurs sont devant l'agence.
00:17:51Malheureusement, la séquence est trop courte. Les faits sont beaucoup trop rapides. Seule une
00:17:57voiture de type Renault Clio pourra être remarquée. Mais sur les auteurs, on ne pourra rien
00:18:02tirer de cette vidéo surveillance. Sur ce coup-là, les braqueurs ont empoché plus de 100 000 euros.
00:18:09Un succès qui donne des ailes. Sept mois plus tard, ça recommence. Toujours dans la même région,
00:18:14à Albucière. Mais cette fois, le convoyeur est seul et c'est sur la route qu'il est intercepté.
00:18:21Christophe Mugnier, convoyeur de fond.
00:18:23J'ai été interpellé par un individu qui m'avait doublé par la gauche. Il s'était mis en travers
00:18:29de la route et il est sorti de ce véhicule, s'est encagoulé. Et donc, il m'a braqué avec
00:18:33une arme en criant arrête-toi, arrête-toi, arrête-toi, descends, descends, descends.
00:18:38Impossible de reculer, une deuxième voiture bloque l'arrière. Le fourgon est pris en
00:18:44sandwich. Tout de suite à l'arrêt, j'ai eu un bruit, un fracas soudain sous ma droite et en fait,
00:18:50je me suis aperçu qu'il y avait un deuxième braqueur qui avait cassé la vitre avec la
00:18:55crosse de son revolver ou son pistolet sur la droite et il me tenait en joues. Donc là,
00:19:03j'étais cerné et c'est à partir de là, tout s'est enchaîné. Ça a été très clair. On m'a
00:19:07dit donne tout, il faut tout sortir, toutes les valises, tous les conteneurs, il faut tout sortir.
00:19:12J'aurais fait compter que voilà, je viens de livrer mon point de chute à Albucière.
00:19:16Ne pas vous donner ce que vous voulez. Il faut attendre un peu. Donc là, j'ai vu qu'il
00:19:22commençait à agiter, il commençait à s'agiter. Il m'a dit monte, monte, monte, monte. Vite,
00:19:29vite, prends le volant, dégage, dégage, dégage. Il est derrière, il me braque avec son arme,
00:19:33il est bien derrière moi et il m'a dit de rouler, donc je roule.
00:19:37Le braqueur se fait expliquer le système et retire une valise. De temps en temps,
00:19:44il dit deux, trois mots à ses complices. Tout à coup, il fait arrêter le fourgon,
00:19:49il veut une deuxième mallette, qu'il passe à son copain.
00:19:52Le convoi redémarre, le temps d'une nouvelle temporisation.
00:19:59J'ai pensé beaucoup à mes enfants, j'ai pensé à ma famille, ma femme et j'ai dit soit, je sais pas,
00:20:08je vais trouver un endroit, du moment où je vais rouler, je vais trouver un endroit où sauter du
00:20:12véhicule en marche. Mais si je saute, est-ce que je vais pas me faire mal ? Est-ce qu'il va pas me
00:20:17tirer dessus tout de suite derrière ? Est-ce que je vais avoir le temps de m'échapper sans qu'il me
00:20:19tire dessus ou sans qu'il réagisse assez rapidement ? Voilà, je me suis posé la question, ça a duré
00:20:24une pointe de seconde. Mais bon, j'ai rien fait, j'ai continué. Après un autre arrêt, les braqueurs
00:20:33se font remettre une troisième puis une quatrième valise. Mais soudain, il s'excite, il force le
00:20:41convoyeur à en arracher deux autres sans attendre la fin de la temporisation.
00:20:45Ça a explosé, j'ai eu, en fait, ça m'a explosé la figure. Là, ça m'a fait tout drôle et j'ai pris
00:20:54mon visage à deux mains, bien sûr, parce que ça me brûlait, c'est assez irritant. Et là,
00:21:03j'ai eu le réflexe de geindre un petit peu. Déstabilisés, les braqueurs prennent la fuite
00:21:12et ils abandonnent le convoyeur tout seul dans les bois. Les quatre valises contenaient 265 000
00:21:18euros. Cette fois, c'est la police judiciaire qui est saisie. Elle retrouve très vite la voiture
00:21:23ouvreuse, une 406. Brigadier-chef Axel Ponçart-Charère, antenne de police judiciaire de
00:21:31Valence. La 406 est retrouvée entièrement calcinée. Elle est plaquée avec des plaques fausses et elle
00:21:39a été volée longtemps auparavant. Entièrement calcinée, on ne retrouvera aucun indice à
00:21:45l'intérieur du véhicule. La seconde voiture est découverte peu après, à quelques kilomètres
00:21:51de là. Les braqueurs l'ont aspergée d'essence, mais elle n'a pas pris feu. La seule chose que
00:21:59nous allons constater dans le Renault Scénic, c'est qu'au moins une ou plusieurs valises,
00:22:04on ne sait pas, ont explosé puisqu'on trouve des traces d'encre à l'intérieur du véhicule.
00:22:10Luc Bréhien, vous êtes responsable sécurité de la société AXI-TRANS,
00:22:21qui s'appelle aujourd'hui Oberture Cache Protection, et qui fabrique ces valises de
00:22:25transport de fond, valises dites intelligentes. Alors comment ça marche ? Donc c'est bourré
00:22:30d'électronique, d'informatique et une encre indélébile qui m'accule les billets, qui les
00:22:35détruit incertainement. Dans quels cas ces valises explosent-elles ? Alors il peut y avoir trois cas
00:22:41principaux. Le premier, c'est un dépassement du délai trottoir. Le convoyeur, avec son code dans
00:22:47son véhicule, va enlever cette valise intelligente du socle pour aller le livrer, dans un temps
00:22:53déterminé, le temps trottoir, à l'agence bancaire. D'accord. S'il dépasse ce temps, qu'est-ce qui se
00:22:57passe ? Ça déclenche systématiquement et ça va m'acculer entièrement tous les billets de banque.
00:23:01Donc si on ne la ramène pas sur son socle, elle se déclenche. Premier cas de figure. Le deuxième,
00:23:05c'est cette valise intelligente qui est sur son socle. Si vous l'arrachez, ça déclenche
00:23:10immédiatement. Et le troisième cas, c'est l'agression physique. L'agression physique avec
00:23:14un grand tournevis, un pied de biche, une disqueuse, tir de balle. Et on va essayer avec une meuleuse.
00:23:21Tout à fait. Vous avez entendu le déclenchement ? Oui. Donc qu'est-ce qui s'est passé là ? Donc
00:23:39voyez, l'encre a été projetée par la pyrotechnie, par l'explosif, sur l'ensemble des billets du
00:23:45tiroir. Donc les billets sont totalement inutilisables ? Totalement. Là, l'encre est
00:23:51complètement imprégnée dans les billets de banque et vous ne pouvez plus l'enlever. Donc
00:23:55c'est un système infaillible ? C'est quasi infaillible. Pour les policiers comme pour les
00:24:05gendarmes, ces braquages n'ont pas de sens. Pourquoi ? S'attaquer à ces valises puisque
00:24:10les billets seront inutilisables. Ce que les enquêteurs ignorent aussi, c'est que la bande
00:24:15des valises d'Alboucière et celle des mécanos ne font qu'une. De fait, chacun travaille dans son
00:24:21coin, l'enquête des gendarmes piétine, celle des policiers aussi. Jusqu'à ce que la Providence
00:24:27leur donne un petit coup de pouce. Le 19 avril 2004, deux mois après le braquage d'Alboucière,
00:24:36des policiers font une découverte intéressante, à Vitrolles, du côté de Marseille. Un hasard,
00:24:42puisqu'ils perquisitionnent un garage dans le cadre d'une enquête sur un réseau de voitures
00:24:45volées. Ce garage, c'est celui d'un certain Christian Giommi. Brigadier chef Axel Ponçart
00:24:52Charère, antenne de police judiciaire de Valence. À l'occasion de la perquisition,
00:24:57dans son bureau, ils vont découvrir des billets maculés d'encre. Ils vont penser que ça peut
00:25:04provenir d'un braquage. Et à ce moment-là, ils vont envoyer les billets à l'analyse au laboratoire
00:25:10de police scientifique. Car les billets sont traçables. Différents types d'encre sont
00:25:14utilisés. Et selon la couleur et la nature des tâches retrouvées, on peut déterminer de quel
00:25:19braquage les billets proviennent. Commandant Bruno Navarro, direction interrégionale de la police
00:25:24judiciaire de Lyon. Après analyse, ces billets vont s'avérer intéressants, puisque les expertises
00:25:30démontreront que ces billets provenaient du vol avec arme d'Alboucière. Christian Giommi est donc
00:25:38placé en garde à vue. Les policiers tiennent peut-être enfin l'un des braqueurs. Mais il a
00:25:43une autre explication. Christian Giommi va nous dire qu'il avait commandé un véhicule volé. Il
00:25:50nous dit qu'il l'a fait auprès de Gitans, qu'ils se sont acquittés de la commande. Il lui a amené
00:25:54cette voiture. Christian Giommi a regardé l'état du véhicule et il a découvert dans la boîte à
00:26:01gants de la voiture les billets immaculés. Il va ensuite nous dire qu'il ne connaît pas leur
00:26:06identité et qu'il ne peut pas nous amener à les identifier. Cette histoire de Gitans, les policiers
00:26:13n'y croient pas beaucoup. Alors ils organisent un tapissage. Mais aucun des convoyeurs ne reconnaît
00:26:18Giommi. Ce qui n'a rien de très surprenant puisque les braqueurs étaient cagoulés. Mais les policiers
00:26:24restent sur cette piste. C'est la seule qu'ils aient pour l'instant. Christian Giommi est mis en
00:26:28examen pour vol avec arme et recel et il est incarcéré. Une semaine plus tard, nouvelle
00:26:37apparition miracle de billets tachés. Cette fois-ci à Lyon. Nous sommes prévenus par la Banque de
00:26:45France d'une tentative d'écouler 211 billets qui sont maculés visiblement par un système de
00:26:53sécurité encore. C'est une fille de 23 ans, Sarah, qui s'est présentée à la banque pour échanger plus
00:27:00de 4000 euros. Nous allons apprendre que Sarah tentait dans un premier temps d'écouler les
00:27:07billets au sein d'une agence postale dans laquelle on va lui dire que vu qu'ils sont détériorés, il
00:27:13faut les amener à la Banque de France. L'employé lui a demandé de laisser les billets et ses
00:27:18coordonnées, le temps de se renseigner. Mais en guise de vérification, la Banque de France a
00:27:23prévenu le procureur qui a prévenu la police. Du coup, Sarah a droit elle aussi à un petit tour
00:27:30en garde à vue. Elle va nous expliquer qu'elle a trouvé ses billets dans un sac plastique au bord
00:27:36d'un canal près de son domicile. Ses billets, elle a bien essayé de les nettoyer, mais l'encre ne
00:27:42voulait pas partir. Alors elle s'est dit qu'elle allait les échanger sans imaginer une seule
00:27:47seconde, dit-elle, que cet argent provient d'un braquage.
00:27:54Sarah nous expliquera qu'elle a quelques problèmes d'argent et que quand elle a trouvé ce sac qui
00:28:00contenait les billets, elle n'a pas résisté à la tentation de les écouler pour son compte.
00:28:06Sarah a beau répéter qu'elle ne connaît pas de Christian Jomy, qu'elle a juste ramassé ses
00:28:12billets par terre, elle aussi est mise en examen pour recelle de vol avec arme et incarcéré.
00:28:18Pendant que les policiers s'acharnent à remonter la piste des recelleurs,
00:28:23les braqueurs, qui se sont fait la main, préparent leur plus beau coup.
00:28:283 septembre 2004, cette fois c'est dans la Drôme à la Coucourde que les braqueurs passent à l'action.
00:28:37Adjudant-chef Frédéric Arriva, directeur d'enquête, section de recherche de Grenoble.
00:28:43Quand on arrive, on voit une scène quasi apocalyptique, un tunnel de passage pour
00:28:50les animaux sous l'autoroute qui flambe, la fumée de partout, l'autoroute qui ralentit,
00:28:55on s'aperçoit très vite qu'on est en face de quelque chose qui sort de l'ordinaire.
00:29:01Une fois que la scène se calme un peu, on est en face d'un camion qui visiblement a été vidé de
00:29:07son contenu, douze mallettes sont au sol, on s'aperçoit qu'elles ont été ouvertes à côté
00:29:11du fourgon dans le tunnel. On retrouve encore des billets fumants, des liasses de billets qui
00:29:18ont été laissés sur place certainement parce que trop tâchés. A côté du fourgon, une voiture brûlée
00:29:26elle aussi. Le convoyeur est là en état de choc. Il nous décrit une scène étrange, il fait sa
00:29:37livraison comme habituellement, il arrive sur la départementale et lorsqu'il tourne sur la
00:29:41gauche pour se diriger vers la prochaine agence, il remarque un véhicule qui lui débouche devant
00:29:47semblant un peu le faire freiner, ça l'agace un peu. C'est une camionnette de chantier, pas de
00:29:54quoi s'inquiéter. Mais un homme en surgit et le braque. Sous la menace de son arme, il le conduit
00:29:59dans la buse. Alors une fois dans la buse, l'ambiance est très particulière. Premier point
00:30:04qui est surprenant, c'est qu'on va lui demander la feuille de route pour pouvoir extraire des
00:30:09malettes choisies par les braqueurs et non pas choisies par le convoyeur. Lui est extrêmement
00:30:15stressé, le milieu est confiné, c'est noir, il ne sait pas vraiment combien d'individus sont
00:30:20présents. Il entend les manettes qui s'ouvrent. Pour autant les braqueurs sont extrêmement calmes,
00:30:26au point de faire un brin de causette avec lui, se renseigner sur sa vie, remarquer des tatouages
00:30:35sur ses bras, lui demander si c'est un ancien militaire. Allant le rassurer sur le fait que le
00:30:39soir il nous verra sa femme et qu'après tout il n'en veut qu'à son argent et absolument pas à lui.
00:30:43Le convoyeur passe plus d'une heure dans le tunnel, le temps de sortir les valises une par une.
00:30:52Une fois le camion vidé, les braqueurs le poussent vers la sortie.
00:30:55Alors là c'est un grand moment de panique pour le convoyeur qui pour lui ayant vu des
00:31:03silhouettes, ayant quand même côtoyé ces individus pendant près d'une heure dans un
00:31:07tunnel sombre, se dit c'est pas possible, ils vont pas en rester là, je vais y passer,
00:31:11ils vont m'exécuter. Ils vont l'attacher sans même trop le serrer et repartir en lui faisant
00:31:18comprendre qu'il ne faut pas qu'il retourne au tunnel comme s'il voulait s'assurer qu'effectivement
00:31:23sa vie ne puisse pas être mise en danger pour ce qui va se produire dans le tunnel.
00:31:26Le braqueur qui l'attache ne parle pas français, c'est donc du doigt qui lui fait comprendre de ne
00:31:32pas rejoindre le fourgon, sinon boum. Ensuite tout le monde repart tranquillement avec la
00:31:39coquette somme de 695 000 euros. Et quelques minutes plus tard...
00:31:44On n'est pas en face d'un véhicule qui a incendié de manière basique avec un bidon
00:31:51d'essence et un briquet, on est en face d'un système de mise à feu à retardement.
00:31:57Un système artisanal mais efficace, une bougie de préchauffage, quelques fils électriques et un
00:32:03minuteur de cuisine. Les gendarmes sont encore occupés par ces constatations quand on les
00:32:09prévient que la camionnette de chantier vient d'être retrouvée. Girofard, faux autocollant,
00:32:15elle a tout l'air d'une vraie et elle, elle n'a pas brûlé. A l'intérieur, les braqueurs ont
00:32:21oublié plusieurs vêtements, notamment une veste de treillis, une cagoule beige et ce n'est pas tout.
00:32:28On est en face d'une fourgonnette qui contient des panneaux de circulation. Donc à l'instant,
00:32:35on se demande, on se dit, est-ce qu'elle a pu être volée comme ça ou est-ce que ces panneaux
00:32:39ont eu une utilité quelconque ? Voler comme ça, pas le genre de ces braqueurs. Les gendarmes en
00:32:46ont la confirmation trois jours plus tard. Visiblement, les gars se sont encore donnés du
00:32:51mal. Cette fois, ils ont monté un faux chantier sur la départementale 74, le trajet du convoyeur.
00:32:57Ils ont déroulé un câble sur plus de 400 mètres le long de la route pour contrôler à distance le
00:33:04feu rouge et maîtriser ainsi la circulation. Le fourgon n'avait aucune chance de leur échapper.
00:33:11Colonel Tabel, on peut parler d'un braquage spectaculaire. Vous mettez, j'imagine, des moyens
00:33:20à la hauteur de ce braquage. Alors quand on arrive sur place, on se rend compte que ce braquage est
00:33:27vraiment exécuté de manière extrêmement professionnelle. La préparation a été très
00:33:34minutieuse. L'exécution a été d'une efficacité redoutable. L'équipe était parfaitement organisée.
00:33:42Chacun savait ce qu'il avait à faire et chacun a joué son rôle vraiment de la manière la plus
00:33:49professionnelle qu'il soit. Est-ce qu'on n'a pas à faire... Vous vous sentez presque admiratif quand même.
00:33:52On n'est pas admiratif, mais on reconnaît quand même qu'il y avait du travail.
00:33:58Ce qui est certain, c'est que là, on se dit qu'il faut mettre des gros moyens. Donc je demande la
00:34:04création d'une cellule nationale d'enquête. Donc on aura 14 enquêteurs chevronnés,
00:34:09véritablement chevronnés, qui vont travailler d'arrache-pied sur cette affaire pendant des
00:34:13mois et des mois. On demande l'appui de la force d'observation du GIGN et évidemment l'appui
00:34:21pour l'identification et l'analyse des traces et indices de l'Institut de recherche criminelle
00:34:27de la Gendarmerie. Donc là, on met tous les moyens en œuvre pour avancer sur ce dossier.
00:34:33Les braqueurs récupèrent des billets qui doivent normalement être inutilisables. A votre avis,
00:34:40ils ont trouvé un truc pour contrer ce dispositif de sécurité ?
00:34:43À ce moment-là, on se demande s'ils les écoulent à l'étranger, s'ils les écoulent dans des endroits
00:34:50particuliers qui leur permettraient de ne pas faire en sorte que les billets ne soient pas repérés.
00:34:55On ne sait pas, on est vraiment interrogatif. On ne comprend pas quelle utilisation ils peuvent
00:35:01faire de ces billets qui sont maculés d'encre et d'une encre qui est porteuse d'éléments
00:35:06d'identification. Les gendarmes font et refont l'itinéraire du convoyeur. Toutes les voitures
00:35:17volées dans la région sont répertoriées, idem pour les armes, mais ça ne donne rien.
00:35:22On va faire des recherches sur les cabines téléphoniques, on va faire de la téléphonie,
00:35:28on va faire du voisinage, mais voisinage sur le lieu de chantier, sur le lieu de braquage.
00:35:33On va aller jusqu'à faire des vérifications à l'aérodrome, puisqu'un aérodrome est situé
00:35:38non loin, pour voir si toutefois, puisqu'on est en face de braqueurs astucieux, ils n'auraient
00:35:42pas pris l'option de quitter les lieux avec un petit avion personnel, chose qu'on n'est pas
00:35:48amené à penser traditionnellement dans ce genre de faits. Mais rien non plus du côté de l'aérodrome.
00:35:55Reste la veste de treillis et en attendant les résultats du labo, les gendarmes tentent
00:36:00d'en tirer quelque chose. C'est un modèle rare qui date de la guerre du Golfe. Avec un peu de
00:36:07chance, ils vont pouvoir retrouver le vendeur et remonter à l'acheteur. On va faire un grand
00:36:13nombre de vérifications des stocks américains, le milieu militaire et malheureusement, sur la
00:36:18provenance de cette veste, on ne va rien réussir à sortir d'intéressant. Quant aux convoyeurs, les
00:36:26gendarmes ne l'oublient pas. Ils ont découvert qu'il roulait sans verrouiller les portes et surtout,
00:36:31contrairement à ce qu'il leur avait dit, il n'a pas activé l'alarme du fourgon. De quoi faire de
00:36:36lui un suspect. L'homme est placé sur écoute, c'est relevé bancaire, ses déclarations d'impôt sont
00:36:43dépluchées. Mais tout ce que les gendarmes découvrent, c'est une maîtresse et deux enfants
00:36:48adultérins. L'enquête bégait ainsi pendant des mois de vérification en vérification.
00:36:55Dominique, pendant que gendarmes et policiers cherchent toujours les braqueurs, les attaques
00:37:00continuent. Oui, il va y avoir un nouveau braquage ici, à la Côte Saint-André, le 29 octobre 2004.
00:37:06Avec l'ancienne méthode des mécanos. Ça va rater parce que les malfaiteurs sont déjà à l'intérieur
00:37:12de la banque, mais là, ils ont un pressentiment, il y a un truc qui leur convient pas. Donc l'équipe
00:37:17décide de s'arracher. Et ils ont nez creux parce que les gendarmes ont été prévenus et les gendarmes
00:37:22sont en train d'arriver. Et la voiture des malfaiteurs va croiser celle des gendarmes dans
00:37:26une rue très étroite où deux voitures peuvent pas passer en même temps. Et là, grand seigneur,
00:37:32les malfaiteurs vont faire marche arrière, laisser passer la voiture des gendarmes, gyrophares,
00:37:38deux tons, qui filent vers la banque. Et les gendarmes vont faire le rapprochement avec la
00:37:44bande des mécanos parce qu'on va regarder les vidéosurveillance de la banque qu'on voit ici.
00:37:49Il y a une employée qui va dire, ces types-là, ils étaient habillés avec des codes de travail et ils
00:37:55avaient des oreillettes. Et là, les gendarmes vont se dire, mais c'est les types qu'on a croisés dans
00:37:59la voiture. Alors, anecdote, c'est que dans cette banque-là, la méthode a évolué. Ils ne sont pas
00:38:05arrivés par le plafond, ils sont arrivés par le sous-sol. Ce n'est plus un vol à la tombée, c'est
00:38:09un braquage à la montée. Et puis, il va y avoir une nouvelle série de braquages. Oui, retour aux
00:38:15valises axi-trans. Auparavant, on détournait les fourgons, mais c'était trop compliqué. On s'encombrait
00:38:20du fourgon, du convoyeur. Là, nouvelle méthode, les valises axi-trans, ils vont aller les chercher
00:38:26directement où elles sont, c'est-à-dire à l'intérieur des locaux des banques, là où elles sont
00:38:31entreposées. Donc, les mécanos vont fracturer les portes, entrer et récupérer les valises. Et des
00:38:37affaires comme ça, il va y en avoir cinq, Frédéric. Cinq entre le mois de janvier et le mois de juin
00:38:422005, dans ce secteur-là. La première, à Saint-Georges-d'Asperanche. Là, les malfaiteurs emportent deux
00:38:49valises vides. Ils se font avoir. Deuxième affaire, au péage de Roussillon. Là, ils prennent 45 000
00:38:56euros. Ils vont recommencer. Troisième affaire, Bourgoin-Jalieu, Crédit Agricole. Ils se font
00:39:02encore avoir avec deux valises vides. Quatrième coup, ils reviennent à la côte Saint-André, au Crédit
00:39:07Lyonnais, là où les gendarmes étaient arrivés. Donc, puisque les repérages sont faits, autant
00:39:12retourner sur place. Ils ramassent 40 000 euros. Et ils vont en faire une cinquième, ici dans l'Ardèche,
00:39:18à Davesieux. Donc, c'est au mois de juin. Ils prennent encore deux valises vides. Ça suffit. Ça
00:39:22rapporte pas assez. Donc, ça va s'arrêter là. La série va s'arrêter là, pour ce qui concerne les
00:39:27attaques de locaux bancaires.
00:39:34Pendant ce temps-là, les gendarmes avancent. En étudiant le système de mise à feu employé lors du
00:39:40braquage de la Côte-Courde, ils font un rapprochement. Le même dispositif a été utilisé quelques années
00:39:46plus tôt, lors d'une attaque spectaculaire. Un braquage à 10 millions de francs qui n'avait pas fait
00:39:51beaucoup parler de lui, à l'époque. Et pour cause.
00:39:5811 septembre 2001. Les yeux rivés sur les tours du World Trade Center, la presse fait peu de cas du
00:40:06hold-up de Saint-Estève, près de Perpignan. Ce matin-là, un commando de quatre hommes lourdement
00:40:12armés a littéralement pris d'assaut la Banque Populaire.
00:40:17D'un seul coup, un engin chantier a complètement défoncé un mur extérieur, donnant accès justement au
00:40:23centre de comptage, à la salle de comptage.
00:40:25En trois minutes, tenant en respect le personnel sous la menace d'armes de fort calibre, ils ont
00:40:30littéralement vidé la pièce et emporté plusieurs millions de francs.
00:40:3510 millions de francs.
00:40:37Une attaque quasi militaire.
00:40:39Les braqueurs ont pensé à tout pour assurer leur fuite.
00:40:42L'enquête dure des mois.
00:40:44C'est finalement l'analyse des communications passées depuis les cabines du coin et les portables
00:40:48détectés dans cette zone qui permet de remonter la bande.
00:40:52Les gendarmes arrêtent une quinzaine de personnes, mais deux des chefs passent entre les mailles du filet.
00:40:58Un certain Laurent Cocogne et son beau-frère Serge Kemma.
00:41:04Deux gars qui pourraient bien se cacher derrière le hold-up de la Coupe Gourde.
00:41:08Là aussi, les braqueurs ont su monter un système de mise à feu efficace avec trois fois rien.
00:41:13Un Walkman, un briquet et beaucoup d'ingéniosité.
00:41:17Adjudant-chef Frédéric Arriva, directeur d'enquête, section de recherche de Grenoble.
00:41:22Ils ont le profil.
00:41:23Ils ont vraiment le profil.
00:41:25Ils sont beau-frères.
00:41:26Ils ont confiance en eux.
00:41:27L'un est très calme, l'autre est très astucieux.
00:41:30On est en face, pour nous, du noyau de cette équipe de braqueurs qui est en train de s'amuser.
00:41:37De cette équipe de braqueurs qui nous intéresse tant.
00:41:41Autre coïncidence, Laurent Cocogne est un gars de la région, celle où sont commis les braquages.
00:41:46C'est le fils de Dédé Lyonnais, une figure du milieu.
00:41:50Dédé, père de Laurent Cocogne.
00:41:52Malheureusement, je ne l'ai pas vu grandir parce que quand il est né, j'étais en prison.
00:41:56C'est ma maman qui l'a élevé.
00:41:58Il a été élevé par ma maman parce que sa mère l'a abandonné.
00:42:01Il avait cet humour par là.
00:42:04Au départ, Laurent ne veut pas suivre les traces de son père.
00:42:07Marié et père d'une petite fille, il mène une vie tranquille.
00:42:11Il travaille dans une usine de yaourts.
00:42:14Il avait une bonne place.
00:42:16C'est dommage qu'il l'a quitté.
00:42:17Il n'allait pas ses chefs, il surveillait des machines, tout ça.
00:42:21Je lui disais, Laurent reste là-bas, mais il ne m'a pas écouté.
00:42:26Laurent, c'est un poisson.
00:42:28Un poisson, il réveille, il aurait voulu avoir une belle maison.
00:42:32Une belle maison, avoir une Ferrari, tout le luxe, il aimait le luxe.
00:42:37Je vais te dire la vérité, moi aussi, presque tout le monde aime le luxe.
00:42:42C'est comme ça, tenté par l'argent facile,
00:42:45que Laurent finit par glisser dans la délinquance et qu'il atterrit à la case prison.
00:42:50Pendant qu'il était à Villefranche, à prison à Villefranche,
00:42:53il a perdu sa petite fille qui s'appelait Camille.
00:42:57Il l'a très mal, très mal supportée.
00:43:00D'ailleurs, ça l'a viré complètement quand il a perdu sa gosse.
00:43:04Il va se réfugier dans la grande délinquance, il va rentrer dans sa bulle
00:43:09et va vivre à sa manière à lui,
00:43:12stoppant complètement ses activités professionnelles, traditionnelles.
00:43:19Il est mis en cause dans une affaire de trafic international de stupéfiants
00:43:24et il est en fuite.
00:43:30Je voulais pas qu'il se mette vraiment en cavale parce que je lui ai dit
00:43:34t'es jaune, tu pourras faire des années que t'as à faire
00:43:37parce qu'il l'avait condamné par coutumasse et Laurent m'a répondu
00:43:41pour pas que je t'écoute sur tout, mais sur ça je t'écouterai pas.
00:43:44Il m'a dit je retournerai jamais en prison.
00:43:48Quand les gendarmes qui enquêtent sur le braquage de la coupe courte
00:43:50s'intéressent à lui, Laurent Cocogne a déjà disparu de la circulation
00:43:54depuis six ans et ce n'est pas Dédé qui va les aider à les retrouver.
00:43:58J'ai pas de contact avec lui, c'est ce qu'ils veulent savoir les flics.
00:44:02Mais non, j'en ai pas de contact et puis, je leur dis comme ça à eux,
00:44:05voilà, qu'ils viennent pas me parler parce que c'est des gens
00:44:09qu'ils me font vomir quand je les vois.
00:44:11Je vais vous dire, j'aurais pu en avoir beaucoup de contacts
00:44:13et si j'en ai pas eu, c'est pas de ma faute à moi, c'est de la faute à Laurent
00:44:17parce que Laurent, c'est un type fantastique mon fils, c'est un phénomène.
00:44:23Il voulait pas que j'ai des contacts avec lui pour pas que moi
00:44:28ou pas que les flics, que je sois emmerdé par les flics.
00:44:34Quant à Serge Kemain, il est entré dans la famille en 88
00:44:37après avoir épousé la soeur de Laurent.
00:44:39C'est un homme rigoureux, ponctuel et sociable.
00:44:43Son grand malheur à Serge, c'est d'être tombé dans notre famille.
00:44:46Voilà, parce que moi, j'ai connu Serge, c'était un maçon,
00:44:50un super maçon, un professionnel,
00:44:52les entrepreneurs qui venaient chercher chez lui pour travailler chez eux.
00:44:56Donc, un beau sort, pas possible.
00:44:59Maître Bertrand Seine, avocat de Serge Kemain.
00:45:01Jusqu'à l'âge de 40 ans, un peu moins,
00:45:05sa vie n'avait été qu'une vie de travail, d'une vie de famille.
00:45:08Quatre mois d'ascédique sur cette période de 22 à 38 ans,
00:45:12donc une vie de travail et puis des voisins qui témoignaient
00:45:14de ce que le week-end, il retapait à la maison.
00:45:18Mais après, bien sûr, lui, pareil.
00:45:22Il a vu l'argent que j'avais, Laurent qui avait l'argent aussi et tout.
00:45:28Ça l'a machiné, quoi.
00:45:30Il a filoché Laurent, il est parti en vrille avec Laurent, quoi.
00:45:35Laurent l'aurait donc convaincu de monter avec lui sur un coup, un seul.
00:45:39Le braquage de Sainte-Eustève.
00:45:42Serge Kemain avait la volonté de s'arrêter, de se ranger après ce coup,
00:45:47puisqu'on a la démonstration en dossier qu'il a sans doute investi
00:45:51une partie des sommes qu'il avait récupérées après ce vol avec arme,
00:45:55puisqu'il a créé une société.
00:45:56Et on sait par le dossier qu'il a eu une information
00:45:58indiquant qu'il était recherché et que son implication dans l'effet de Sainte-Eustève
00:46:03commençait à être mise à jour.
00:46:06Suspecté, Kemain n'avait plus le choix.
00:46:08Pour éviter la prison, il a rejoint son beau-frère en cavale.
00:46:11Les deux hommes courent depuis trois ans.
00:46:14Trois ans pendant lesquels ils ont perfectionné leur technique.
00:46:18C'est en tout cas ce que se disent les gendarmes,
00:46:21maintenant persuadés d'avoir trouvé qui se cache derrière le braquage de la concourde.
00:46:34Annick Corona, vous êtes à l'époque juge d'instruction à la GIRS de Lyon,
00:46:38la juridiction interrégionale spécialisée.
00:46:40Un élément matériel dans cette histoire va vous conforter
00:46:44dans l'idée que Cocogne et Kemain sont bien impliqués dans le braquage de la concourde.
00:46:50Effectivement, puisque dans le braquage de la concourde,
00:46:52on sait que les auteurs ont laissé sur place un véhicule partiellement incendié
00:46:59dans lequel nous avons trouvé une cagoule,
00:47:01dans laquelle nous avons trouvé un ADN mitochondrial.
00:47:04Vous savez que l'ADN mitochondrial, c'est un profil génétique
00:47:08qui nous permet d'établir un lien entre la personne
00:47:13qui perd ce bout de profil avec la lignée maternelle.
00:47:18En prélevant la mère de Laurent Cocogne et la mère de Serge Kemain,
00:47:23la comparaison entre l'ADN de madame Kemain et la trace découverte dans la cagoule
00:47:29a révélé de façon positive qu'il s'agissait de l'ADN de Serge Kemain.
00:47:34Et la mère, elle a accepté comme ça de se prêter à ce prélèvement d'ADN ?
00:47:37Tout à fait. Elle savait que son fils était recherché dans le cadre d'autres faits,
00:47:41les faits notamment de Sainte-Estève,
00:47:44et plutôt de compliquer ses relations qu'elle pouvait avoir avec les gendarmes,
00:47:49puisque souvent les gendarmes venaient à son domicile
00:47:51pour essayer de trouver une trace de son fils.
00:47:54Et donc, elle a accepté tout à fait librement de se prêter à ce prélèvement ADN.
00:48:01Mais elle aurait pu refuser ?
00:48:02Elle aurait pu refuser.
00:48:04Donc, ce qui était qu'une hypothèse de travail devient une preuve ?
00:48:06Une preuve, une démonstration en tout cas,
00:48:09sur au moins un des auteurs d'un concours.
00:48:12Les policiers de Clermont-Ferrand
00:48:16Pendant que les gendarmes essayent de localiser leur suspect numéro un,
00:48:20Laurent Cocogne et Serge Kemain, les policiers avancent aussi.
00:48:27Au début de l'année 2005, la PJ de Clermont-Ferrand tombe sur un pont tuyau.
00:48:31Commissaire divisionnaire Jean-Jacques Colombi, PJ de Clermont-Ferrand.
00:48:35Un jour, un de mes collaborateurs recueille une information.
00:48:39On lui dit que deux individus qui sont installés en Auvergne,
00:48:46de manière surprenante,
00:48:49auraient trouvé le moyen d'écouler des billets
00:48:53qui étaient des billets tachés d'encre, maculés.
00:49:00Sur le moment, on n'y croit pas vraiment parce que pour les braqueurs,
00:49:04nettoyer les billets maculés, c'est un peu comme au Moyen-Âge la pierre philosophale.
00:49:09Tout le monde veut ça et personne n'y arrive.
00:49:13Mais rapidement, un deuxième renseignement vient conforter le premier.
00:49:17On est avisé par un casino de la région, à côté de Clermont,
00:49:22que dans les machines à sous qui servent aux changes
00:49:26pour les joueurs pour obtenir des jetons,
00:49:28des billets maculés aussi sont passés.
00:49:33Les policiers surveillent donc de près les casinos.
00:49:36Très vite, ils ont la confirmation que deux hommes écoulent bien ces billets.
00:49:39Un certain Jean-Pierre et un dénommé Alain Kenny.
00:49:44Kenny, c'est un personnage intéressant.
00:49:46Il est sorti de prison il y a quelque temps.
00:49:48Il était connu pour Trafic international de stupes.
00:49:51On le connaissait aussi pour avoir gravité dans le monde des braqueurs.
00:49:55C'est un touche-à-tout, c'est un type très intelligent.
00:50:01Quant à Jean-Pierre, c'est un ancien copain de prison de Kenny.
00:50:06Jean-Pierre Boris.
00:50:08Jean-Pierre, ça sera celui qu'on appelait dans le milieu lyonnais, le Russe.
00:50:14En fait, il n'est pas Russe, il est Ukrainien.
00:50:17Mais quand il est né, tout ça, c'était la même chose, si je puis dire.
00:50:21Il arrive en France tardivement, fin des années 60.
00:50:25Et très vite, il va acquérir, si je puis dire,
00:50:28un plan de maraisse criminel assez étonnant puisqu'en quelques années,
00:50:32il sera condamné plusieurs fois pour des infractions qui sont très diversifiées,
00:50:36qui vont du proxénétisme au braquage, mais surtout pour le braquage.
00:50:42C'est un malfaiteur bien connu qui est, au moment où on fait cette enquête,
00:50:47recherché par la justice.
00:50:50Fairplay, les policiers informent les gendarmes
00:50:52qui enquêtent sur le braquage de la Côte-Courde.
00:50:55Lorsqu'ils leur parlent de Jean-Pierre Boris, ça fait tilt.
00:50:58Adjudant-chef Frédéric Arriva, directeur d'enquête,
00:51:02section de recherche de Grenoble.
00:51:04Ce nom ne nous est pas inconnu, puisque dans l'affaire Saint-Estève,
00:51:09l'équipe de braqueurs qui a été en partie interpellée
00:51:13était des proches de Boris Jean-Pierre.
00:51:17Le fait que là, il soit mis en cause comme recelleur des billets
00:51:21nous laisse penser qu'il a à nouveau un lien avec Serge Kemain
00:51:26et Laurent Cocogne.
00:51:28Les enquêteurs passent alors un deal.
00:51:30Chacun travaille de son côté, mais on se tient au courant.
00:51:33Les gendarmes continuent de traquer Cocogne et Kemain,
00:51:36tandis que les policiers gardent un oeil sur Boris,
00:51:40qui apparemment a du mal à se tenir tranquille.
00:51:45Très rapidement, on se rend compte qu'on est dans le vif du sujet,
00:51:48si je puis dire, puisque fin mars,
00:51:50on intercepte une conversation téléphonique
00:51:53entre Jean-Pierre Boris et un inconnu
00:51:55par laquelle Jean-Pierre Boris dit à son correspondant
00:52:01qu'il a repris l'artillage.
00:52:04Donc on sait que le groupe est actif.
00:52:11En juin, on se rend compte qu'il y a de l'effervescence
00:52:15et qu'ils vont sans doute travailler.
00:52:17On les suit presque tous les jours
00:52:21et on les voit repérer des distributeurs automatiques.
00:52:23Le 22 juin, les gars passent à l'action.
00:52:27Boris tente de fracturer le distributeur
00:52:30d'un centre commercial à Saint-Priest,
00:52:31dans la banlieue lyonnaise.
00:52:33Pour les policiers, c'est l'occasion de faire un flag.
00:52:37Dans la foulée, ils foncent chez Alain Kenny,
00:52:40où ils font une découverte intéressante.
00:52:42Capitaine Jacques Chabroulin,
00:52:43Brigade de répression du banditisme de Lyon.
00:52:46On va retrouver des billets qui, notamment,
00:52:49proviennent d'un bras gauche.
00:52:51On va retrouver des billets qui, notamment,
00:52:52proviennent d'un bras gauche,
00:52:55du bras gauche qui a été commis à la coupe courde
00:52:58et dont sont saisis les gendarmes.
00:53:01Les deux hommes sont placés en garde à vue.
00:53:03Premier entendu, le Russe reste droit dans ses bottes.
00:53:07Malfaiteur d'habitude, il ne dit pas.
00:53:08Commissaire divisionnaire Jean-Jacques Colombi,
00:53:11PJ de Clermont-Ferrand.
00:53:14Il reconnaîtra
00:53:16la tentative sur laquelle il est arrêté
00:53:19et là, il aurait eu du mal,
00:53:20puisque, entre guillemets,
00:53:22on lui passe les menottes au sortir de la banque.
00:53:25Pour les billets, il va essayer de trouver une échappatoire
00:53:29et il va nous dire, de manière très minimaliste,
00:53:31qu'il a acheté les billets
00:53:33pour une somme modique, environ 100 000 euros,
00:53:37à quelqu'un dont il ne veut pas nous dire l'identité
00:53:40et qu'ensuite, il avait tenté de les faire nettoyer par Kenny.
00:53:44Maître Sylvain Cormier, avocat de Jean-Pierre Boris.
00:53:48En fait, il va admettre le recel.
00:53:50Juridiquement, c'est...
00:53:52On m'a proposé ces billets, je les ai achetés à 10 % du prix,
00:53:55il a chargé pour moi d'essayer d'enlever ces sept encrins délibiles
00:53:59et de les rendre utilisables.
00:54:02En revanche, les policiers en apprennent un peu plus du côté d'Alain Kenny.
00:54:08Kenny, lui, il est beaucoup plus prolixe.
00:54:11Il dit que c'est Boris qui les lui donne
00:54:14et que Boris lui aurait dit de les être procurés
00:54:19avec un groupe d'amis, 4 en tout, dont 2 sont en cavale.
00:54:24Deux hommes en cavale, sûrement cocognes et queuemains.
00:54:28Les policiers sentent qu'ils se rapprochent.
00:54:30La version de Kenny semble beaucoup plus fiable
00:54:33que celle de Boris et de son soi-disant vendeur de billets.
00:54:37Premièrement, les billets viennent de la Coucourde.
00:54:39C'est le laboratoire de police scientifique qui le dit.
00:54:43Point numéro 1.
00:54:45Point numéro 2, quand on l'interpelle,
00:54:48dans son sac, il y a un tournevis
00:54:50qui supporte des traces de couleurs différentes
00:54:55qui s'avèreront être des encres,
00:54:57qui sont des encres de maculation des billets.
00:55:00La version de Boris s'écroule comme un château de cartes.
00:55:08Les braqueurs tirent des leçons de chacune de leurs erreurs
00:55:11et tentent toujours de trouver la méthode parfaite.
00:55:14Ils se creusent la tête.
00:55:15L'attaque des fourgons, trop longue et trop coûteuse à préparer.
00:55:19Les agences bancaires, on ne sait jamais ce qu'on va y trouver.
00:55:24Alors, la bande a une idée, c'est le début d'une nouvelle période.
00:55:318 septembre 2005.
00:55:33Un convoyeur descend de son fourgon avec deux mallettes
00:55:36pour les livrer à la banque.
00:55:38Son collègue, lui, reste en couverture au volant.
00:55:41Convoyeur de fond.
00:55:42J'entendais des voix qui étaient un peu...
00:55:45Des chuchotements, pas des hurlements, mais bon, c'était pas habituel.
00:55:50Et au moment où je sors pour voir ce qui se passe,
00:55:52un braqueur arrive en face de moi et me montre du doigt
00:55:56et me fait comprendre qu'il ne fallait pas que je bouge,
00:55:59que je descende, que j'aille plus loin.
00:56:01Donc, c'est là où j'ai compris qu'on se faisait braquer.
00:56:06Son collègue, lui, n'a pas le temps de comprendre.
00:56:09Ma voiture est partie en deux-deux et elle n'a plus revu.
00:56:14Rapide, efficace, un braquage à l'arraché.
00:56:18Une nouvelle méthode que les enquêteurs baptisent
00:56:21l'attaque trottoir.
00:56:22Adjudant-chef Frédéric Arriva,
00:56:24directeur d'enquête, section de recherche de Grenoble.
00:56:28Juillet, une première attaque trottoir.
00:56:30Septembre, plusieurs attaques trottoir.
00:56:32Une psychose s'installe.
00:56:34On a l'impression que les faits deviennent de plus en plus rapprochés.
00:56:37Et que ça ne va pas s'arrêter.
00:56:41Mais côté braqueur, la chance commence à tourner.
00:56:44Car les convoyeurs transportent aussi des malettes vides
00:56:48pour que les banques les remplissent.
00:56:49Et c'est ce qui est arrivé deux fois de suite.
00:56:51Deux échecs.
00:56:55Conclusion, retour à la bonne vieille méthode du fourgon.
00:56:58Avec un nouvel accessoire, une balance.
00:57:07Ils connaissent le poids net d'une valise.
00:57:10Donc quand ils l'apaisent,
00:57:12ils sont en mesure de dire si elle contient ou non
00:57:14suffisamment d'argent pour ne pas repartir brenouiller.
00:57:18Grâce à la balance, la pêche est bonne.
00:57:21Mais un autre fourgon leur file entre les doigts quelques semaines plus tard.
00:57:26Il retombe sur le même convoyeur que la Cucourne
00:57:28qui, lui, est particulièrement vigilant.
00:57:31Et va très vite déjouer l'attaque de son fourgon
00:57:35en repérant une voiture qui lui paraît anormale.
00:57:39S'arrêter à quelques centaines de mètres.
00:57:41Partir en marche arrière.
00:57:42Et ainsi, ne pas permettre l'exécution du braquage comme c'était prévu.
00:57:47Nouvel échec.
00:57:49Nouvelle parade.
00:57:50Le fourgon suivant ne leur échappera pas.
00:57:52Les braqueurs l'attendent en embuscade,
00:57:54sous la neige,
00:57:55avec deux troncs d'arbre
00:57:58pour lui couper la route.
00:58:00Et pendant que la valse des attaques de fourgons continue,
00:58:03les policiers se rapprochent.
00:58:05Lentement.
00:58:06Mais sûrement.
00:58:07Commandant Bruno Navarro.
00:58:08Direction interrégionale de la police judiciaire de Lyon.
00:58:11Là, on apprend qu'un individu, un chimiste, surnommé Madagascar,
00:58:17détiendrait la formule pour nettoyer les billets, les laver.
00:58:21Et qu'il avait dans ses relations, ses proches relations,
00:58:23un certain Laurent Cocogne et son beau-frère Serge Kemain.
00:58:29Énième confirmation pour Cocogne et Kemain.
00:58:33Quant à Madagascar, il aurait un autre surnom, le Chauvre.
00:58:37Reste maintenant à l'identifier.
00:58:45Les taux se resserrent autour des braqueurs
00:58:47alors qu'ils prennent de plus en plus d'assurances et de risques.
00:58:50C'est ce qui va les perdre.
00:58:5530 mars 2006, à La Verpillère.
00:58:58Vers 8h15, un convoyeur sort de la banque populaire
00:59:01quand il entend hurler, monte dans le fourgon.
00:59:04Réflexe de survie, il part en courant.
00:59:06Le braqueur le course, mais il glisse sur la chaussée.
00:59:09Le convoyeur a le temps de se réfugier dans une boulangerie.
00:59:12Son collègue n'a pas autant de chance.
00:59:15Convoyeur de fond.
00:59:16J'ai eu le temps de rien voir parce que j'ai pris un coup
00:59:19et je suis tombé à terre.
00:59:20Il m'a dit couche-toi, tu ne me regardes pas.
00:59:22Donc, ça s'est passé en indignons.
00:59:28J'ai essayé de les interroger
00:59:29pour savoir si mon collègue était vraiment monté dedans.
00:59:31Ils m'ont dit, espèce d'andouille, tu ne vois pas que tu es tout seul.
00:59:34Donc, au moins, lui, il est sauvé.
00:59:36Les deux braqueurs ont pris le contrôle du fourgon,
00:59:39mais ils sont contrariés.
00:59:41Ils devenaient nerveux parce que sachant que mon collègue
00:59:44a pu s'échapper et donner l'alerte,
00:59:46ils savaient que la gendarmerie n'était pas très loin.
00:59:48Donc, ça les a agacés, je les entonnais tout le long.
00:59:50Chaque fois que je pose une question,
00:59:52ferme ta gueule, tais-toi, t'appuies sur la tête.
00:59:54Donc, j'ai pris des...
00:59:55J'étais bleu de voir tant qu'on me disait ça.
00:59:58Malgré cet accroc, les gangsters décident d'aller jusqu'au bout.
01:00:02Ils prennent le temps de vider le camion
01:00:05quand ils entendent un hélicoptère.
01:00:13Et c'est là que j'ai entendu un moment donné,
01:00:15bon, c'est bon, ça commence à être chaud, on se casse.
01:00:17Et ils m'ont dit, mets-toi là.
01:00:18Et puis, j'entendais l'autre qui disait,
01:00:19bon, si jamais il bouge, tu le flingues.
01:00:21Donc, là, c'est dur.
01:00:22C'est là que vous réfléchissez, vous dites, bon, qu'est-ce que je fais ?
01:00:24Et j'entendais cet hélico qui tournait, bon.
01:00:27Car pendant ce temps-là, le plan Milan a été déclenché.
01:00:30L'hélicoptère des gendarmes survole la zone.
01:00:33Il repère la 807 des braqueurs.
01:00:36Quelques instants plus tard,
01:00:37la voiture croise un premier barrage.
01:00:39Un gendarme la vise,
01:00:40mais la voiture lui fonce dessus et trace la route.
01:00:44Jusqu'à ce qu'elle soit rattrapée par une patrouille
01:00:46qui ne la lâche plus.
01:00:48Gendarme Didier Castellan,
01:00:49peloton de surveillance et d'intervention
01:00:51de la gendarmerie de Bourgoin-Jalieu.
01:00:53Ils ont pris un peu d'avance.
01:00:55J'étais à, je dirais, 80 mètres.
01:00:58Je suis sorti d'un virage à droite.
01:01:00Là, je vois le véhicule très près,
01:01:02comme s'il nous attendait.
01:01:04Et d'un seul coup, je vois la lunette arrière se briser.
01:01:07Et des impacts, des éclats de peinture de notre véhicule.
01:01:11Et mon collègue, il me dit, il nous rafale.
01:01:13Il nous rafale dessus.
01:01:16Mon collègue, il riposte à plusieurs reprises.
01:01:19Moi également, je tire deux fois sur le véhicule.
01:01:25La course-poursuite continue.
01:01:27Mais quelques centaines de mètres plus loin,
01:01:29c'est l'accident.
01:01:33J'ai tout pilé.
01:01:34Sinon, je vais rentrer dedans.
01:01:36J'étais à deux mètres, on va dire.
01:01:38Et là, je me suis dit, on est morts.
01:01:41Si tu tires, on est morts, là.
01:01:44Les braqueurs ne tirent pas.
01:01:46La 807 repart de plus belle.
01:01:48Adjudant-chef Frédéric Arriva,
01:01:50directeur d'enquête, section de recherche de Grenoble.
01:01:53Rien ne semble les arrêter.
01:01:55Ils ont essuyé des coups de feu.
01:01:56Ils ne s'arrêtent pas.
01:01:57L'accident ne les arrête pas.
01:01:59Ils ne s'arrêteront que quand le véhicule
01:02:01ne sera plus en mesure d'avancer.
01:02:03Le véhicule 807 fumé,
01:02:05il y avait des pneus éclatés.
01:02:07Moi, je m'arrête sur la droite.
01:02:09Et là, je vois le chauffeur descendre
01:02:12avec deux armes.
01:02:15Il n'a pas de cagoule.
01:02:17Par contre, le passager, lui, il a une cagoule.
01:02:19Il a deux armes.
01:02:21Ils ont l'air tout excités.
01:02:23Ils mettent les armes à la tampe,
01:02:25au niveau du coeur.
01:02:27Je me dis, mais qu'est-ce qu'ils font ?
01:02:30Coincés entre l'hélico et les gendarmes,
01:02:32les braqueurs refusent de se rendre.
01:02:34Mais ils ne tirent pas.
01:02:35Le malfaiteur cagoulé
01:02:37jette son pistolet mitrailleur.
01:02:39Le gendarme Castellan
01:02:41décide de s'approcher de lui pour discuter.
01:02:45Je suis arrivé sur lui.
01:02:47Et là,
01:02:49il me dit, je veux parler à un responsable.
01:02:52Je lui dis, il n'y a pas de souci, on va discuter.
01:02:54Et là,
01:02:56je range mon pistolet
01:02:58et je prends le pistolet à impulsion électrique,
01:03:01le taser.
01:03:04Et je tire.
01:03:06Les ardilles en partent
01:03:08et aucun choc électrique.
01:03:10Et là, il me dit, qu'est-ce que tu me fais ?
01:03:13Et je lui dis, il n'y a pas de souci, on va discuter plus loin.
01:03:16Il me dit, OK, toi, t'es armé, moi aussi, on y va.
01:03:21Je me dis, il va se tourner, je vais le taser dans le dos.
01:03:25Donc il se retourne, je le suis.
01:03:28Le moment où j'ouvre le feu et le taser,
01:03:31j'entends une détonation.
01:03:36Là, mes collègues lui sautent dessus
01:03:38et il y en a un qui dit, il ne va pas bien, il retourne.
01:03:41Et là, il a les yeux grands ouverts, tout blanc,
01:03:44et il a un trou dans le cœur.
01:03:46L'homme qui vient de se tuer, c'est Laurent Cocogne.
01:03:50Le fameux Laurent Cocogne,
01:03:52après qui nous courrions depuis tant de temps.
01:03:58L'homme qui est à genoux par terre, c'est Serge Kemin.
01:04:02Serge Kemin est blessé.
01:04:04Il a pris une balle dans le bras pendant la course-poursuite.
01:04:08Quant au 3e homme...
01:04:10Le conducteur s'avère être Hervé Carlier,
01:04:13un individu qu'on ne connaît absolument pas.
01:04:16Hervé Carlier, un ancien officier de 53 ans.
01:04:20Maître Jean-Marie Vialla, avocat d'Hervé Carlier.
01:04:24C'est un ancien militaire brillant.
01:04:26Il a été le plus jeune lieutenant du cadre noir de Saumur.
01:04:30Il a continué, il a fait l'école de guerre.
01:04:33C'est un garçon extrêmement brillant.
01:04:35De ce que j'en ai compris,
01:04:37un jour, on lui a demandé de créer une officine
01:04:41pour je ne sais quelle mission.
01:04:43Le jour où on n'a plus besoin de lui,
01:04:45on l'a laissé tomber.
01:04:47Après avoir pris son pécule,
01:04:50il s'est retrouvé sans arrond.
01:04:52Hervé Carlier a ensuite bourlingué.
01:04:55Ancien chef d'entreprise, ancien détective privé,
01:04:58c'est un homme qui a vécu plusieurs vies.
01:05:02Au-delà de cette apparence du militaire extrêmement reconnue,
01:05:06il a une autre facette, baroudeur.
01:05:09Il a tourné dans l'environnement de Bokassa.
01:05:13On ne sait pas exactement quels ont été ses agissements,
01:05:17mais il y a un côté assez sombre du personnage.
01:05:21Un mort, deux hommes arrêtés.
01:05:24Les gendarmes viennent de mettre fin à une longue série de braquages.
01:05:29La bande est sous les verrous.
01:05:31Les 41 gendarmes qui ont participé à l'arrestation
01:05:34seront tous décorés.
01:05:36Une série de perquisitions est organisée
01:05:39chez les suspects et leurs familles sans trouver grand-chose.
01:05:42C'est Hervé Carlier, le militaire,
01:05:44qui met les enquêteurs sur la piste la plus intéressante.
01:05:47En garde à vue, il leur parle d'une maison
01:05:50qu'il louait pour Cocogne et Kemins à Romand-sur-Isère.
01:05:54Adjudant-chef Frédéric Arriva,
01:05:56directeur d'enquête, section de recherche de Grenoble.
01:05:59Nous nous empressons d'aller sur place.
01:06:02Et là, c'est bizarre.
01:06:05La maison est à la fois en désordre
01:06:08et à la fois d'une armoire qui est vide.
01:06:12Pour nous, quelqu'un est passé avant nous.
01:06:15Les soupçons portent tout de suite sur les proches.
01:06:18Dédé, le père de Laurent, est interpellé et placé en garde à vue.
01:06:22Le vieil homme est sous le choc.
01:06:24Il vient d'apprendre la mort de son fils.
01:06:27Je suis rentré chez moi et ma femme m'a dit
01:06:30qu'il y avait un braquage dans la région qui a mal tourné.
01:06:33J'ai dit qu'on m'évite la télé.
01:06:35Un malfaiteur s'est suicidé
01:06:37après une tentative ratée de braquage
01:06:39contre un fourgon blindé à la Verpillère, dans le Nord-Isère.
01:06:43J'ai tout de suite pensé à Laurent.
01:06:53Je savais que ça allait finir comme ça.
01:06:55C'était obligé. Ça ne pouvait pas finir autrement.
01:06:58Ça a duré 9 puits, la cavale.
01:07:00C'est déjà beau, les braquages.
01:07:02Vous en faites un, vous en faites deux.
01:07:04Mais après, quand vous êtes 3, 4, 5, 6,
01:07:06et ça continue un jour ou l'autre,
01:07:08la chance, elle vous abandonne.
01:07:12Passée l'émotion, Dédé doit s'expliquer.
01:07:15Les gendarmes ont une écoute téléphonique.
01:07:17Ils savent qu'après avoir appris la mort de son fils,
01:07:20Dédé est allé à la planque de Romain Surizère.
01:07:23Adjudant-chef Frédéric Arriva,
01:07:25directeur d'enquête, section de recherche de Grenoble.
01:07:28Le père de Laurent Cocogne
01:07:30est une figure...
01:07:32On n'a pas affaire à un gamma,
01:07:34à quelqu'un qui connaît le système,
01:07:36qui connaît la poloche, comme on dit dans le jargon,
01:07:39et qui sait très bien qu'il ne faut rien dire
01:07:42et qu'il ne va rien dire, d'ailleurs.
01:07:44Je lui ai dit, qu'est-ce que vous m'emmerdez, là ?
01:07:47Mon fils aurait été vivant.
01:07:49Il m'aurait dit d'aller faire le ménage à la villa.
01:07:52Qu'est-ce que j'en ai à foutre ?
01:07:54Mais mon fils, il est mort.
01:07:56Qu'est-ce que vous m'emmerdez avec ça ?
01:07:59Ça ne changera rien.
01:08:01Vous n'allez pas me le ramener.
01:08:03Sinon, j'aurais été faire le ménage dans la maison.
01:08:06Même avec des piges à la clé.
01:08:08La compagne de Laurent est placée en garde à vue.
01:08:11Elle explique qu'elle n'était au courant de rien.
01:08:14C'est un certain Philippe Carlier
01:08:16qui est venu lui apprendre le braquage,
01:08:18les arrestations, le suicide de Laurent.
01:08:21Ce Philippe Carlier, c'est le fils d'Hervé.
01:08:24Il a 25 ans.
01:08:25C'est lui qui a fait le ménage dans la villa.
01:08:28Il a fait tout ce qu'il pouvait dans une voiture.
01:08:30Il est parti en oubliant quelques bricoles derrière lui.
01:08:34On retrouve des véhicules volés,
01:08:36des malettes taxi trans les unes à côté des autres.
01:08:39On retrouve des dizaines de plaques d'immatriculation.
01:08:42On retrouve des plans, des armes.
01:08:44On retrouve une quantité inestimable d'éléments matériels.
01:08:48C'est surréaliste.
01:08:49On a l'impression de rentrer dans la caverne d'Ali Babaï.
01:08:52Quant à la voiture, Philippe Carlier ne l'a pas cachée bien loin.
01:08:56On la retrouve dans la même rue.
01:08:58Dans cette voiture, on va retrouver
01:09:00tout ce qui peut correspondre à ce côté préparation extraordinaire
01:09:04des braquages,
01:09:05les communications avec des pictoriettes, des radios.
01:09:08On va retrouver des explosifs, des jumelles, des montres caméra.
01:09:13On va retrouver un matériel digne d'un espion.
01:09:17Pendant qu'une partie des gendarmes
01:09:19fait l'inventaire des centaines de scellés,
01:09:21une autre équipe interpelle Philippe Carlier.
01:09:25Après une première version fantaisiste,
01:09:27il reconnaît qu'il a nettoyé la maison
01:09:29et il se met à table.
01:09:32Il va tout de suite reconnaître
01:09:34qu'en fait, il joue un rôle de sonnette non armé
01:09:37et que c'est lui qui donnait l'alerte à l'équipe par radio.
01:09:41Le fourgon des convoyeurs arrivait sur la zone
01:09:45permettant ainsi l'exécution parfaite du braquage.
01:09:49Grâce aux éléments retrouvés dans la villa,
01:09:51les gendarmes identifient deux autres complices.
01:09:54Le premier, Philippe Gascon,
01:09:56un ami d'enfance de Cocogne,
01:09:58recruté lui aussi pour faire la sonnette.
01:10:01Le second, en revanche, a un autre gabarit.
01:10:03Il s'appelle David Gelé.
01:10:07Ce David Gelé, on va très vite travailler dessus
01:10:10et s'apercevoir qu'il correspond
01:10:13vraisemblablement au renseignement policier
01:10:16désignant un individu d'Imada Gascar ou Le Chauve.
01:10:19Renseignement qui s'avère d'autant plus crédible
01:10:23que David Gelé habite à Imada Gascar.
01:10:26David Gelé, petit-fils d'un général de l'armée de l'air,
01:10:29fils d'ingénieur et lui-même officier de réserve.
01:10:32Un passionné d'armes à feu que les gendarmes cueillent
01:10:35à l'aéroport à son retour de Tananarive.
01:10:39Annick Corona, vous avez entendu toutes les mises en examen.
01:10:43Comment se comporte-t-il ?
01:10:45C'est plutôt du genre qui parle ou qui se tait ?
01:10:47J'avais en charge dans mon cabinet une quinzaine de procédures
01:10:51qui étaient tous reliées les uns aux autres grâce au mode opératoire.
01:10:55Mais on n'avait pas d'éléments matériels sur tous les faits.
01:10:58Leur mode de défense a consisté à ne reconnaître que les faits
01:11:01pour lesquels on avait des éléments matériels.
01:11:04Et leur particularité aussi,
01:11:06c'était de reconnaître sa propre responsabilité,
01:11:09son rôle dans chacun des faits,
01:11:11mais n'impliquant jamais les autres
01:11:14dans les faits pour lesquels ils reconnaissaient leur responsabilité.
01:11:18Il ne balance jamais ?
01:11:19Non.
01:11:20Les interrogatoires se sont toujours bien passés.
01:11:22Il y avait dans leur mode de réponse,
01:11:25dans leur façon de se comporter, du respect.
01:11:29Du respect pour l'autorité judiciaire et du respect pour les gendarmes.
01:11:33Et j'ai une anecdote assez intéressante à raconter sur ce point.
01:11:37Un des auteurs écrit à son frère en lui expliquant
01:11:39les conditions dans lesquelles il a été interpellé
01:11:41et les conditions dans lesquelles il a été placé en garde à vue.
01:11:44Et il dit à son frère,
01:11:46si je n'avais pas choisi d'être du mauvais côté de la barrière,
01:11:49j'aurais bien aimé travailler avec ces gendarmes.
01:11:52C'est révélateur de l'ambiance
01:11:55qui a eu lieu tout au long de ces interrogatoires
01:11:58avec ces personnes qui ont joué le jeu.
01:12:02Vous dressez d'eux des portraits de voyous plutôt respectables ?
01:12:06C'est un dossier qui m'a mis en présence
01:12:10avec des malfaiteurs comme on les aime,
01:12:13c'est-à-dire qui ont un code de l'honneur,
01:12:17qui ont certes utilisé des armes pour commettre leurs méfaits,
01:12:21mais qui n'ont pas fait couler de sang.
01:12:23Des voyous à l'ancienne ?
01:12:24Des voyous à l'ancienne.
01:12:25Et comment vous faites le lien entre les mécanos,
01:12:28l'équipe des mécanos et les souris vertes ?
01:12:30C'est grâce à la perquisition réalisée au domicile de Carlier.
01:12:37On a retrouvé des plans, on a retrouvé des cartes.
01:12:40Ils positionnaient des petites aiguilles
01:12:43pour matérialiser le lieu de la commission des faits.
01:12:47On a retrouvé un ensemble de petits éléments
01:12:49qui nous ont permis de les rattacher à ces faits des mécanos.
01:12:57Dominique, on sait maintenant
01:12:59comment les braqueurs s'y sont pris pour récupérer les billets.
01:13:01Ils ont trouvé un truc assez astucieux.
01:13:03Le petit futé Frédéric, c'est lui, Serge Comin.
01:13:06Il va raconter pendant sa garde à vue aux enquêteurs
01:13:10et ensuite, il va le refaire pendant la reconstitution.
01:13:13Ça, c'est une photo de la reconstitution.
01:13:15La technique astucieuse qu'il a mise au point
01:13:18pour ouvrir, pour aller chercher les billets
01:13:21à l'intérieur des valises piégées.
01:13:23Il a mis au point une espèce de pince
01:13:26qui permet de maintenir une entreouverture de la valise.
01:13:31Et quand la valise est entreouverte,
01:13:33on la plonge dans un bac rempli d'huile de cuisine.
01:13:38L'huile entre à l'intérieur de la valise,
01:13:41imprègne les billets
01:13:43et ensuite, on ouvre la valise façon classique.
01:13:46Le système pyrotechnique fait exploser les cartouches d'encre.
01:13:50L'encre se répand sur les billets,
01:13:52mais les billets sont protégés par la pellicule d'huile.
01:13:55Ensuite, on les lave avec de la lessive, avec du savon.
01:13:58On lave les billets et on les étend sur un fil à linge
01:14:01avec des pinces à linge. On obtient des billets tout propres.
01:14:04Mais ils ont un autre problème.
01:14:06Ils ont trouvé la solution.
01:14:08Ils ont une voiture stationnée dans la forêt.
01:14:11Ils amènent le fourgon à proximité de la voiture.
01:14:14À partir du moment où le fourgon est là et où on sort les valises,
01:14:18ils ont 20 minutes pour ouvrir les valises.
01:14:21Dans ce fourgon, il y a des bacs d'huile de cuisine.
01:14:24Il y a plusieurs bacs.
01:14:26Ils peuvent ouvrir plusieurs valises en même temps.
01:14:29Serge Comin dira aux policiers
01:14:31qu'à la fin, quand son système était vraiment au point,
01:14:34il arrivait à sauver 98 % des billets
01:14:37qui étaient à l'intérieur des valises.
01:14:39D'où le surnom du gang,
01:14:41les souris vertes.
01:14:42Trempez-la dans l'huile, dans l'eau.
01:14:45Ça fera des billets tout beaux.
01:14:49Une équipe structurée comme une entreprise.
01:14:52Avec un braquage par mois,
01:14:54les employés ne chômaient pas.
01:14:56À leur tête, Laurent Cocogne,
01:14:58le PDG, le leader incontesté.
01:15:02Adjudant-chef Frédéric Arriva,
01:15:04directeur d'enquête, section de recherche de Grenoble.
01:15:07Une des principales caractéristiques de cette équipe,
01:15:10c'est d'être capable de prendre du temps pour monter un braquage
01:15:14et de faire en sorte qu'il soit le plus parfait possible.
01:15:17Laurent Cocogne était capable,
01:15:19juste parce qu'une maman passait avec une poussette
01:15:22non loin d'un braqueur, de dire
01:15:24qu'on ne le fait pas aujourd'hui, c'est trop risqué.
01:15:27Dédé, père de Laurent Cocogne.
01:15:29Il avait de l'expérience et de la pratique.
01:15:31Tout ce qu'il faisait, il le faisait à la perfection.
01:15:34D'ailleurs, les flics s'en sont aperçus.
01:15:39Il les a fait marrants quelques fois.
01:15:43Après chaque braquage,
01:15:45les parts sont réparties.
01:15:4710 % pour les guetteurs,
01:15:4970 à 80 % pour ceux qui montent au charbon.
01:15:52Le reste est mis dans un pot commun
01:15:55pour investir dans les prochains coups.
01:15:58On l'a vu au travers de différentes photos
01:16:00qu'on a retrouvées dans les perquisitions,
01:16:02plusieurs fois d'apparence.
01:16:04Nous avons mis en évidence que Laurent Cocogne,
01:16:07qui était en fuite depuis les années 2000,
01:16:09a eu pour projet, pendant de nombreuses années,
01:16:12de trouver quelqu'un qui lui ressemble
01:16:14de manière à usurper son identité.
01:16:16Il a retrouvé, par le biais d'un toxicomane,
01:16:21un individu qui lui ressemblait à s'y méprendre.
01:16:24Lionel Favreau, journaliste à Mac de Lyon.
01:16:28Ces faux-papiers marchent tellement bien
01:16:30que lors d'un contrôle pour vitesse excessive,
01:16:34Laurent Cocogne est au volant,
01:16:37il est interpellé, il présente ses papiers,
01:16:39et cela passe totalement inaperçu.
01:16:42De vrais faux-papiers.
01:16:44Et bien sûr, des voitures volées.
01:16:46Mais pas n'importe comment.
01:16:47Les souris vertes ont une astuce.
01:16:49La doublette parfaite.
01:16:51Le principe ?
01:16:52Copier et reproduire la plaque d'un véhicule
01:16:54de la même marque et de la même couleur
01:16:56qu'une voiture du coin où aura lieu le braquage.
01:17:01L'intérêt de ces voitures immatriculées en doublette parfaite,
01:17:04c'est que si un passant, un riverain,
01:17:07remarquait quelque chose d'étrange autour d'une banque,
01:17:09par exemple lors d'un repérage,
01:17:11s'il donnait le signalement de la plaque d'immatriculation
01:17:14de la voiture, sa couleur, son modèle,
01:17:17la vérification de routine démontrait que ça correspondait
01:17:20à quelqu'un qui avait effectivement
01:17:22cette voiture et cette plaque d'immatriculation,
01:17:24donc pas du tout quelque chose d'extraordinaire.
01:17:27De la rigueur, de l'organisation, mais aussi de l'humour.
01:17:31Adjudant-chef Frédéric Arriva,
01:17:33directeur d'enquête, section de recherche de Grenoble.
01:17:36On s'est aperçus dans cette enquête
01:17:38que les différents accents qui étaient mis en évidence
01:17:41par les témoignages, que ce soit espagnol, russe, maghrébin,
01:17:45en fait étaient des subterfuges et que Laurent Coquogne,
01:17:48c'est lui qui principalement s'amusait
01:17:50à prendre les différents accents
01:17:53et à parler de manière très maladroite, volontairement,
01:17:56pour nous orienter sur de fausses pistes.
01:17:58Et il est clair que oui, ça a marché un temps,
01:18:00ça nous a mis le doute.
01:18:02Un doute entretenu par une autre ruse, le déguisement.
01:18:06Des lentilles de contact, des colorations,
01:18:08du coton dans les gencives.
01:18:10Laurent Coquogne se travestissait même pour les repérages.
01:18:14La fameuse cléopâtre remarquée avant le braquage de Chabeuil,
01:18:18c'était lui.
01:18:19Maître Sylvain Cormier, avocat de Jean-Pierre Boris.
01:18:22On a vraiment ce mélange entre le charme, l'intelligence,
01:18:26l'organisation, la rigueur.
01:18:28Sans oublier les précautions de base.
01:18:31Jamais de téléphone, pas de cigarette,
01:18:34une synchronisation parfaite,
01:18:36de minutieux repérages et bien sûr, du sang froid.
01:18:40Une recette qui leur a permis d'amasser en 3 ans
01:18:431 374 807 euros.
01:18:52Toute la bande a rendez-vous le 14 janvier 2010
01:18:56à Lyon devant les assises du Rhône.
01:18:5814 braquages au final ont été retenus.
01:19:00D'autres ont fait l'objet de non-lieux,
01:19:02notamment l'attaque de Saint-Jus d'Ardèche.
01:19:05Un procès hors du commun pour une bande hors du commun.
01:19:14Christian Roussel, avocat général
01:19:16près de la cour d'appel de Lyon.
01:19:18Il y avait beaucoup de monde,
01:19:20beaucoup d'accusés, beaucoup d'avocats,
01:19:23un certain nombre de parties civiles
01:19:25parce qu'il y avait énormément de faits.
01:19:27Donc c'était quand même un dossier d'une certaine ampleur.
01:19:31Beaucoup de monde, mais un grand absent,
01:19:33Laurent Coquogne, le chef de la bande.
01:19:38Dans le boxe, 6 hommes.
01:19:40Serge Quemain, Boris Lerusse,
01:19:43les militaires Carlier et Gelé et les 2 sonnettes.
01:19:48Une femme, la compagne de Coquogne, comparée libre.
01:19:52Les accusés font tous très bonne impression.
01:19:55Tous, sauf peut-être Boris.
01:19:57Pascal Chabot, juré.
01:19:59Lui, je crois que...
01:20:04En fait, souvent, on s'est demandé
01:20:06ce qu'il faisait dans ce gang-là.
01:20:08Cet individu, c'était presque pathétique.
01:20:11On avait envie de lui dire
01:20:15d'arrêter de témoigner ou d'arrêter de parler
01:20:18parce que plus il en disait,
01:20:20moins c'était véridique, moins c'était vraisemblable.
01:20:23À tel point que David Gelé n'hésite pas à voler à son secours.
01:20:27Maître Sylvain Cormier, avocat de Jean-Pierre Boris.
01:20:31Lorsqu'il voyait que Boris s'enfonçait,
01:20:34à un moment donné, je crois qu'il lui dit
01:20:36ta gueule, Boris, se retournant vers le président,
01:20:39excusez-le, monsieur le président,
01:20:41il a le QI d'une tongue, Boris,
01:20:43de râler encore plus.
01:20:45Mais c'était intelligent parce qu'il y a vraiment
01:20:48un acte de protection pour dire à Boris
01:20:51tu t'enfonces, tais-toi,
01:20:53et puis d'essayer de rendre l'incident drôle.
01:20:55Intelligent, spirituel,
01:20:57le gang et son système de lessivage
01:21:00séduisent la salle.
01:21:02Dédé, père de Laurent Cocogne.
01:21:04Il était bon, celui-là.
01:21:06Parce que les flics, quand ils ont vu ses bagues d'huile,
01:21:09ils se demandaient ce que c'était.
01:21:11Ils ont pensé que c'était pour faire de la salade.
01:21:14On a retrouvé dans les scellés
01:21:16des milliers de pinces à linge
01:21:18pour faire sécher les billets.
01:21:20C'est assez extraordinaire
01:21:22d'imaginer ces billets au vent
01:21:24en train de sécher tranquillement.
01:21:26C'est hors norme, ça.
01:21:28Si la méthode est hors norme,
01:21:30l'avocat général ne perd pas de vue
01:21:32les motivations de ces braqueurs.
01:21:34Les motivations de quelqu'un qui fait un braquage,
01:21:37je n'ai pas besoin qu'il me l'indique,
01:21:40je sais que c'est pour l'argent.
01:21:42Ils ne vont pas me dire que c'est charismatique,
01:21:45que c'est pour faire le bien autour d'eux.
01:21:47Soit ils veulent financer quelque chose,
01:21:49un autre projet, criminel ou autre,
01:21:51soit ils veulent s'amuser
01:21:53et ils ont besoin de beaucoup d'argent.
01:21:55Être un voyou, ça coûte cher.
01:21:57Quant au parti civil,
01:21:59elles viennent rappeler
01:22:01qu'elles n'ont pas vraiment goûté à la sympathie de ce gang.
01:22:04Sympathie, c'est quoi ?
01:22:06C'est parce que je te braque, mais je te touche pas.
01:22:09Oui...
01:22:11On peut dire ça comme ça, mais non.
01:22:13Au fond de soi, non, c'est pas sympa.
01:22:15T'as une arme, t'es braqué.
01:22:17Un autre convoyeur de fonds.
01:22:19Ça reste quand même des braquages
01:22:21parce que finalement, il y a quand même
01:22:23des répercussions derrière,
01:22:25des chocs psychologiques pour certains.
01:22:27Mon collègue a été traumatisé.
01:22:29Ils l'ont pleuré dans le camion.
01:22:31Pascal Chabot, juré.
01:22:33Je me souviens d'un responsable d'agence
01:22:35qui, au départ, c'était quelqu'un
01:22:37dans une maîtrise parfaite.
01:22:39Et puis, au fur et à mesure
01:22:41qu'il racontait ce qui lui était arrivé,
01:22:43sa voix a commencé à trembler
01:22:45et à un moment donné, il s'est effondré à la barre.
01:22:48Il s'est mis à pleurer
01:22:50à tel point que le président
01:22:52lui a demandé de sortir
01:22:54dans la salle des pas perdus
01:22:56pour se calmer.
01:22:58On l'entendait pleurer de la salle.
01:23:00Les gendarmes qui les ont arrêtés sont là aussi.
01:23:03Ils racontent la course-poursuite,
01:23:06les échanges de tirs.
01:23:08C'est tout l'enjeu du procès.
01:23:10Y a-t-il eu ou non tentative d'assassinat ?
01:23:13Laurent n'a pas tiré sur les gendarmes.
01:23:15Il a tiré pour s'arracher
01:23:17parce qu'il voulait s'arracher.
01:23:19Il n'a pas tiré pour les tuer.
01:23:21Maître Bertrand Seyne, avocat de Serge Commun.
01:23:24Au début de la course-poursuite,
01:23:26les véhicules vont se retrouver
01:23:28à quelques mètres l'un de l'autre.
01:23:30Si les fuyards avaient voulu ouvrir le feu,
01:23:32ils auraient pu le faire à ce moment-là,
01:23:34On a un Moser qui tire 20 balles à la seconde
01:23:37dont personne ne va se servir sur les forces de police
01:23:40et dont on aurait pu se servir.
01:23:42Véritablement, l'intention n'était pas du tout homicide.
01:23:45Mais l'avocat général, lui, n'est pas de cet avis.
01:23:50Pour moi, il y avait une intention homicide qui était réelle.
01:23:54On ne peut pas, à mon sens,
01:23:56accepter que des gendarmes qui viennent interpeller
01:23:59des auteurs de vols à main armée
01:24:01soient accueillis par des coups de feu.
01:24:03Ça, là-dessus, c'est un créneau très ferme.
01:24:07Après les plaidoiries, c'est maintenant aux jurés de trancher.
01:24:10Huit clots dans la salle du conseil
01:24:12depuis bientôt 9h.
01:24:14Des délibérations exceptionnellement longues.
01:24:18Le 29 janvier 2010, le verdict tombe.
01:24:21Serge Commun est condamné à 16 ans de réclusion criminelle.
01:24:25Hervé Carlier prend 12 ans.
01:24:27David Gelet, 11.
01:24:29Boris n'est condamné que pour recel, 8 ans.
01:24:33Les sonnettes prennent 5 ans.
01:24:35Quant à la femme de Laurent Coquogne, elle est acquittée.
01:24:39La salle se vide, mais une question y pleine encore.
01:24:42Où est passé l'argent du gang des souris vertes ?
01:24:47Lionel Favreau, journaliste à Magdeleon.
01:24:49On sait que la bande a braqué plus d'un million d'euros.
01:24:52Une partie a sans doute été rendue inutilisable
01:24:55par les systèmes de sécurité des Vallis.
01:24:59Une autre partie a sans doute servi à financer la cavale.
01:25:02Parce qu'une cavale coûte cher.
01:25:04Est-ce qu'une autre partie a été placée, on ne le sait pas.
01:25:07Ca restera un des mystères de cette affaire.
01:25:09Dédé, père de Laurent Coquogne.
01:25:11Le butin, il est où ?
01:25:13Il n'y en a pas, le butin.
01:25:15Il n'y en a pas.
01:25:17Vous voyez bien comment je vis.
01:25:19Je suis dans un F2-F1.
01:25:21J'ai un tout petit logement.
01:25:23C'est pas le luxe, chez moi.
01:25:25Et il n'y a pas d'argent.
01:25:27Malheureusement, il n'y a pas d'argent.
01:25:32Même s'il y en avait, ils ne le verront pas.
01:25:43Maître Pierre-Olivier Lambert,
01:25:45vous êtes l'avocat de la société Axitrans,
01:25:48qui s'appelle aujourd'hui Oberture Cash Protection.
01:25:51Vous êtes l'une des 12 parties civiles
01:25:54et vous n'êtes pas à l'audience.
01:25:56Comment ça se fait ?
01:25:58Nous ne sommes pas présents à l'audience
01:26:01directe, nous avons vocation à être présents
01:26:04lors des opérations d'instruction,
01:26:06des opérations d'enquête.
01:26:08Rappelons que notre système
01:26:10est un système qui est très particulier
01:26:13avec un traçage de l'encre.
01:26:15Ces traceurs qui sont présents dans l'encre
01:26:18constituent l'ADN de l'encre.
01:26:21Et c'est cet ADN
01:26:23qui a permis de remonter la filière
01:26:26et cet ADN qui constitue en moyenne preuve
01:26:30judiciaire, qui a permis aujourd'hui
01:26:33d'amener au procès et de condamner ces personnes.
01:26:36Est-ce que cette histoire vous a fait du tort ?
01:26:39Cette histoire a été plutôt riche d'enseignements pour nous.
01:26:43Nous avons fait évoluer l'encre,
01:26:45nous avons fait évoluer les boîtiers.
01:26:47Depuis, c'est casse ?
01:26:49Bien sûr.
01:26:50Vous êtes adapté à l'ingéniosité des...
01:26:53Nous étions en adaptation permanente.
01:26:55Le boîtier en lui-même est en évolution permanente.
01:26:57Rappelons qu'Auberture Cache Protection
01:27:00est l'inventeur du système.
01:27:02Nous avons eu de cesse de faire évoluer ce système
01:27:05depuis son origine.
01:27:07Nous avons fait évoluer l'encre
01:27:09puisque nous en sommes, je crois,
01:27:11à la 8e génération d'encre.
01:27:13Aujourd'hui, notre système est inviolable.
01:27:16Et ce que l'on constate,
01:27:18c'est qu'il y a de moins en moins de braquages sur nos valises.
01:27:2857 ans de prison.
01:27:30Voilà donc ce que les souris vertes ont gagné aux assises.
01:27:33Quant aux recelleurs, la justice ne les a pas oubliés.
01:27:36Christian Jomi et la jeune Sarah
01:27:38se sont, eux aussi, retrouvés derrière les barreaux.
01:27:41La simple détention de billets volés est en effet un délit.
01:27:44Le recel est passible en France
01:27:46de 5 ans de prison et de 375 000 euros d'amende.
01:27:58Vous venez d'écouter le podcast de Faites entrer l'accusé
01:28:01consacré aux gangs des souris vertes.
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01:28:12Faites entrer l'accusé.